«On ne parle pas assez de Roman Josi»
Jean-François Chaumont
Bobby Orr (six fois), Paul Coffey (cinq fois), Denis Potvin, Al MacInnis et Brian Leetch sont les cinq uniques défenseurs de la LNH avec une ou plusieurs saisons de 100 points.
Des cinq, Leetch est celui qui a réalisé cet exploit le plus récemment. Il l’a fait en 1991-1992 avec les Rangers de New York. Mark Messier venait de débarquer à Manhattan. Sur la scène politique, Brian Mulroney était le premier ministre du Canada, alors que George W. Bush (père) dirigeait les États-Unis.
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Exactement 30 ans plus tard, un autre défenseur cogne à la porte d’une saison de 100 points. Auteur de 81 points (18 buts, 63 passes) à ses 66 premiers matchs, Roman Josi a des chances mathématiques d’y parvenir.
« C’est drôle que tu me parles de ça. J’ai fait exactement la même recherche sur le site de la LNH. J’ai ressorti les noms des derniers défenseurs avec 100 points et plus. Ça remonte à loin. De mémoire, c’était Brian Leetch au début des années 1990. »
Celui qui parle n’est pas un quidam qui s’intéresse à l’histoire du hockey. C’est Alexandre Carrier, défenseur des Predators de Nashville et partenaire de Josi à la ligne bleue depuis la blessure causée à Dante Fabbro.
« Roman connaît un mois de mars du tonnerre, a rappelé Carrier. Il n’y a rien d’impossible pour lui. Je crois réellement qu’il peut atteindre le chiffre 100. Et il le ferait en 2022, pas en 1990. Je n’enlève rien à cette époque, mais les gardiens sont meilleurs aujourd’hui : ils ont de meilleurs équipements et il y a moins de buts dans la LNH aujourd’hui qu’avant.
« Les joueurs sont encore plus étudiés en 2022 en raison de l’amélioration des technologies. On peut connaître les tendances, les forces et les faiblesses de tous les joueurs. »
En mars, Josi a amassé 28 points (4 buts, 24 passes) en seulement 14 matchs.
Pas assez reconnu
À Nashville, les Predators représentent une belle histoire d’amour. Depuis leur participation à la finale en 2017, il y a un engouement encore plus fort pour le hockey dans la ville du country. Mais ça restera toujours un petit marché qui n’a rien de comparable avec Toronto, New York, Montréal ou Chicago.
Dans ce sens, la saison de Josi passe trop sous le silence.
« Je suis d’accord pour dire qu’on ne parle pas assez de Roman, a dit Carrier. Il a déjà plus de 80 points et ce n’est même pas sûr encore qu’il gagnera le trophée Norris. On parle souvent d’autres candidats. À mes yeux, il le mérite. Il l’a déjà gagné et c’est pour une raison : c’est un défenseur incroyable. Il est aussi solide défensivement, ce n’est pas juste une machine offensive. »
« Il connaît une saison exceptionnelle. J’ai la chance de jouer avec Roman depuis quelques matchs. Pour moi, ce qui le sépare des meilleurs, c’est sa capacité à faire la différence dans un match. Dès qu’il saute sur la glace, il veut avoir un impact. Quand on a un avantage numérique, il n’est pas heureux à son retour au banc si on n’a pas marqué. Il a une grande intensité. »
Trophée Hart ?
Josi mérite-t-il de se retrouver dans la conversation pour l’obtention du trophée Hart, décerné au joueur le plus utile à son équipe ? Carrier n’est pas complètement impartial, mais il a la chance d’être un témoin de son immense impact au sein de l’équipe.
« Pour moi, c’est un candidat aussi pour le Hart. Sans Roman, on n’a pas les succès qu’on connaît. Quand on regardait les prédictions pour cette saison, les experts nous plaçaient au 7e rang ou au dernier rang de notre division. Juuse Saros a aussi une très grosse saison. »
« Josi n’est pas juste bon offensivement, il joue souvent plus de 25 minutes. Il se retrouve sur la glace contre le gros trio de l’autre équipe. Il bloque des tirs. Si je ne me trompe pas, il mène notre équipe pour les tirs bloqués. Il fait un peu de tout sur la patinoire. C’est ça qui le démarque des autres défenseurs. »
Carrier a raison. Le Suisse de 31 ans, qui a gagné le Norris en 2020, est au sommet des Preds avec 109 tirs bloqués. Il devance un certain numéro 45 (Carrier) qui a bloqué 99 rondelles.
Les derniers défenseurs avec 100 points
- Brian Leetch, Rangers, 1991-1992 - 102 points
- Al MacInnis, Flames, 1990-1991 - 100 points
- Paul Coffey, Penguins, 1989-1990 - 103 points
Les derniers défenseurs avec 90 points
- Raymond Bourque, Bruins, 1993-1994 - 91 points
- Phil Housley, Jets, 1992-1993 - 97 points
Alexandre Carrier surpasse ses propres attentes
Mattias Ekholm et Roman Josi. Depuis le début de la saison, Alexandre Carrier a principalement joué à la droite des deux défenseurs étoiles des Predators de Nashville.
Âgé de 25 ans, Carrier a cimenté sa place au sein du top quatre à la ligne bleue des Predators. Il vient au troisième rang de l’équipe avec un temps de jeu moyen de 20 min 50 s, soit après Josi (25:20) et Ekholm (23:28).
Mais il n’y a pas juste les grosses minutes. Le défenseur originaire de Québec est en route vers une première saison de 30 points. Il a déjà 27 points (2 buts, 25 passes) après 63 rencontres et il présente un dossier de +25, l’un des meilleurs de la LNH.
« Oui, je suis heureux de ma saison, a dit Carrier. Pour les statistiques, je ne m’attendais pas à ça. C’est une production qui surpasse mes attentes. L’an dernier, j’avais fini sur une bonne note et je jouais de grosses minutes. Je voulais repartir au même niveau. J’ai continué à m’améliorer. Je suis probablement encore plus constant. »
« Il y a eu des périodes un peu plus difficiles, mais j’ai trouvé des façons de rebondir. »
Une devise importante
Dans l’Ouest, les Predators sont au cœur d’une bataille pour les dernières places disponibles pour accéder aux séries. Ils s’accrochent à cette possibilité en étant la première équipe repêchée pour l’instant (wild card).
Roman Josi n’est évidemment pas étranger aux succès de l’équipe.
« Une de nos devises dans le vestiaire des Preds, c’est qu’on doit sortir notre meilleur hockey quand les matchs sont importants, a expliqué Carrier. Plus l’enjeu est gros, meilleur qu’on doit être. Et Roman a compris ce message.
« On se retrouve dans une course aux séries et il roule à un rythme de près de deux points par match depuis le début mars. Et c’est un défenseur. Il veut faire la différence. C’est notre capitaine, c’est notre meneur. On veut le suivre. »
Carrier a décrit une facette moins connue de son capitaine.
« Roman est un boute-en-train. Il a un très bon sens de l’humour. Avec les médias, il reste souvent plus réservé. Il est notre capitaine, il se montre sérieux. Mais il aime déconner. Quand on joue au soccer avant les matchs, c’est toujours lui qui crie pour mettre de l’ambiance. »