Négociations constitutionnelles: Québec veut pouvoir choisir tous ses juges


Patrick Bellerose
Le gouvernement Legault pose un nouveau geste pour accroître l’autonomie du Québec. Il veut pouvoir choisir les juges nommés par Ottawa.
Le ministre Simon Jolin-Barrette déposera une motion à l’Assemblée nationale, au cours des prochains jours, afin de forcer le gouvernement fédéral à tenir des négociations constitutionnelles.
Pour le moment, le Québec nomme seulement les juges de la Cour du Québec et des cours municipales ainsi que les magistrats de paix.
Le gouvernement réclamera donc que «[l]es juges des cours supérieures du Québec [soient] choisis parmi les membres du Barreau du Québec ayant été recommandés par le gouvernement du Québec».
À la fois ministre de la Justice et responsable des Relations canadiennes, Simon Jolin-Barrette s’est bien gardé, mardi, de critiquer le travail des juges québécois ou de laisser entendre qu’Ottawa pourrait favoriser des magistrats à tendance fédéraliste.
«À partir du moment où les juges sont nommés, ils sont neutres, indépendants et impartiaux, assure-t-il. On a pleinement confiance dans les juges.»
Processus vicié
«Cependant, le processus fédéral, il est vicié», estime le ministre, en dénonçant les délais de nomination et l’absence du Québec dans le processus.
Selon lui, il n’existe aucun autre exemple de fédération dans le monde où les États fédérés ne participent pas au processus de sélection. «Les juges vont être appelés à contrôler la constitutionnalité des lois québécoises», souligne M. Jolin-Barette.
«Donc c’est normal qu’un État comme le Québec puisse participer au processus de sélection des gens qui vont avoir à se prononcer sur les lois, ajoute-t-il. Je pense que c’est une question de confiance.»
Négociations
En vertu du jugement de la Cour suprême du Canada dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec, le gouvernement fédéral a l’obligation de négocier à la demande d’une province.
Mais, puisque la nomination des juges de droit civil ne concerne que le Québec, la manœuvre devrait déclencher uniquement des négociations bilatérales, qui n’impliqueront pas les autres provinces ou les Premières Nations.
Pas question, donc, de grandes rondes constitutionnelles comme celles de Charlottetown ou du lac Meech.
La motion inscrite au feuilleton mardi pourrait être débattue dès cette semaine, sinon dans deux semaines, au retour de la pause parlementaire.
Au cabinet du ministre, on fait remarquer que les élus de l’Assemblée nationale ont adopté une motion à l’unanimité, en février dernier, pour réclamer que le Québec participe au choix des juges des tribunaux supérieurs sur son territoire.
Le gouvernement caquiste s’attend donc à un appui unanime.
Accueil tiède
Pourtant, les partis d’opposition ont accueilli tièdement la proposition mardi matin.
Le PQ et QS se sont dits d’accord sur le principe, mais attendent peu de résultats face au gouvernement fédéral. «Le Québec a besoin de tous les pouvoirs, y compris en matière de justice», a souligné le député péquiste Pascal Paradis.
La co-porte-parole solidaire, Ruba Ghazal, estime que la tentative se soldera par un échec, comme «les autres demandes que le gouvernement du Québec fait à Ottawa».
Le Parti libéral, lui, a préféré ne pas commenter pour l’instant. «C’est sous analyse, on pourra, on vous revenir», a déclaré son chef par intérim, Marc Tanguay.
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