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L'article provient de Le Journal de Québec
Opinions

Musée national d'histoire du Québec: non au tout-numérique

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Photo portrait de Antoine Robitaille

Antoine Robitaille

2024-05-14T04:00:00Z
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Le projet de Musée national de l'histoire du Québec (MNHQ) suscite un débat animé. 

C'est fou ce qu'on a pu entendre depuis quelques jours. À écouter certains, il y a en préparation dans la Capitale nationale un Musée nazifiant du Québec français pur.

À partir de quelques maladresses de François Legault, certains sonnent l'alerte maximale: on préparerait une entreprise de nettoyage ethnique de la mémoire; un Musée des «vainqueurs» (!), visant à exclure tous les «Autres», au premier chef, les Premières Nations.

Des propos totalement excessifs. On a parfois l'impression désormais que tout discours sur le Québec comme nation est nécessairement porteur de je-ne-sais quelle volonté coupable. C'est à se demander si l'on peut encore, sans être suspect, affirmer qu'il y a une telle chose que la nation québécoise avec son histoire propre.

  • Écoutez la rencontre politique entre Antoine Robitaille et Benoît Dutrizac via QUB :

Totalement numérique?

J'admets toutefois éprouver des craintes sur un aspect. Quand j'entends le ministre de la Culture Mathieu Lacombe déclarer: «J’ai l’ambition d’en faire le musée le plus numérique au pays. Il faut attirer les jeunes. Je ne veux pas juste des dates et des portraits de gens qui nous ont gouvernés sur les murs».

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À l'heure où disparaît l'emballement puéril pour le numérique, où l'on prend de plus en plus conscience du caractère néfaste des écrans pour l'apprentissage, où l'on expulse les cellulaires des classes, la déclaration du ministre Lacombe semble surannée; fait très 1996... Notamment parce qu'on y décèle cette affligeante association entre le numérique et les «Djeunzes» (vocable rigolo forgé en France pour railler les gens plus âgés souhaitant paraître «cool» aux yeux des jeunes générations).

Collections riches

Si le Québec mérite son musée national d'histoire, c'est aussi pour une raison très concrète: il y a des quantités inouïes d'artefacts de l'époque de la Nouvelle-France notamment, qui dorment dans les entrepôts. Le PDG du Musée de la civilisation Stéphan La Roche estimait à quelque «680 000 objets, documents, archives et œuvres d’art» la collection du MCQ. «C’est gigantesque !»

Le défunt Musée de l'Amérique française, jadis situé à un jet de pierre de l'édifice où s'élèvera le futur MNHQ, exposait une fraction de cette riche collection.

Espérons que le MNHQ ne propose pas une sorte de déambulatoire dans un site web géant. Son ambition devrait au contraire consister à exposer le plus grand nombre d'artefacts de cette Amérique française, devenue Québec après avoir été Nouvelle-France, Canada, Bas-Canada, etc., enrichie par les contacts, échanges et métissages avec les premiers peuples et l'immigration, bien sûr.

Un ami historien m'écrit: «Les jeunes n'iront pas au musée pour "voir" du numérique.» Ils vont se déplacer justement pour sortir du virtuel, pour voir des choses réelles, des artefacts. En plus, les Musées, souvent, offrent du mauvais numérique: «Il faut à tout prix éviter ce type d'exposition où il n'y a presque pas d'objets», mais où l'on se retrouve devant de «grands murs blancs avec un ou deux panneaux interactifs.» Bien dit!

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