Ce que vous pouvez faire concrètement pour aider les abeilles, qui meurent par milliers au Québec
Anne-Sophie Poiré
Plusieurs apiculteurs du Québec enregistrent un taux anormal de mortalité chez les abeilles cette année, ce qui fait craindre le pire pour la production maraîchère. Il est toutefois possible d’aider les colonies à se régénérer par des gestes aussi simples que d’attendre au mois de juin pour tondre la pelouse.
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Les premières fleurs du printemps – comme les pissenlits – qui poussent dès le mois d’avril sont une source capitale de nourriture pour les pollinisateurs après un long hivernage.
Depuis quelques années, des mouvements comme No Mow May (mai sans tondeuse) ou le Défi Pissenlits incitent à laisser pousser le gazon tout le mois de mai pour éviter d’arracher aux abeilles l’une des rares sources de nectar et de pollen à cette période.
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«Pourquoi on parle du pissenlit? C’est qu’il pousse massivement sur nos gazons et qu’on le voit comme de la mauvaise herbe», rappelle le doctorant en toxicologie de l'environnement à l'UQAM et à l'Université Claude Bernard Lyon 1 Maxime Gauthier.
«L’idée, en fait, est de s’assurer de la succession florale tout au long de la saison [...] pour donner un maximum de nourriture aux pollinisateurs, surtout sur l’île de Montréal, où il y a une grande densité de ruches», précise l’expert.
Il doit y avoir des fleurs du printemps à l’automne, donc, si l'on considère que 35% de notre garde-manger dépend des insectes pollinisateurs.
Redoubler d’efforts
Mais cette année, l’hécatombe dans les colonies d’abeilles rappelle qu’il faut redoubler d’efforts pour faciliter leur travail.
«Normalement, un apiculteur devrait perdre entre 5% et 15% du nombre total de ses colonies. Mais depuis les 10 ou 15 dernières années, on est entre 25% et 30% au Québec et au Canada», fait valoir M. Gauthier.
Le biologiste de formation utilise l’analogie du petit canari dans la mine de charbon.
«Lorsqu’il arrêtait de chanter, ça voulait dire qu’il avait détecté une fuite de gaz et que les mineurs devaient évacuer immédiatement», dit-il. «Les abeilles qui meurent chaque année, c’est le petit canari qui arrête de chanter. Ça signifie qu’il y a un problème.»
Comment aider les abeilles?
Une bonne habitude qu'on peut prendre pour aider les abeilles, c'est d'éviter les pesticides, souligne M. Gauthier. «On essaie de ne pas faire de lutte chimique sur nos terrains, mais plutôt de la lutte physique.»
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«On peut utiliser des plantes de compagnonnage qu’on peut faire pousser à côté de notre laitue pour attirer les insectes ou mettre des coquilles d’œufs pour éloigner les limaces», illustre-t-il. «Il y a plein de solutions plus vertes, mais qui demandent plus de travail.»
Il suggère également de fabriquer des fontaines avec un petit bol d’eau et des billes par exemple, pour que les abeilles puissent s’y abreuver sans se fatiguer. «Dès qu’il fait au-dessus de 32 ou 33 °C, elles vont s’activer pour trouver de l’eau pour refroidir la ruche», détaille l’expert.
Une autre solution: les bombes de semences.
Ces petites boules de graines mélangées avec un agglomérant comme l'argile ou le compost peuvent être lancées ici et là pour attirer les pollinisateurs une fois les fleurs poussées, notamment dans les endroits difficiles à atteindre ou à cultiver.
«Les boules de semences, thumbs up», lance M. Gauthier. «Mais il faut s’assurer qu’elles sont remplies de plantes indigènes qui poussent naturellement au Québec pour qu’elles s’intègrent bien dans notre écosystème.»