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Montrez-nous plus de vrais pénis à la télé, pas des prothèses

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Photo portrait de Jean-Michel  Clermont-Goulet

Jean-Michel Clermont-Goulet

2022-12-09T21:42:26Z
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Euphoria, Sex/Life, Minx et, plus récemment, The White Lotus: bien qu’on nous montre de plus en plus de pénis à l’écran, la plupart du temps, ce qu’on voit, ce sont des prothèses. Mais tant qu’à multiplier les scènes de nudité masculine à la télé, pourquoi ne pas montrer la vraie affaire? 

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L’auteur et acteur Simon Boulerice ne passe pas par quatre chemins: montrer de faux pénis – la plupart du temps de taille impressionnante – à la télévision, c’est «vraiment malhonnête», en plus de contribuer à créer des standards «qui ne sont pas crédibles». 

«On ne veut pas montrer la nudité masculine pour créer des complexes, insiste-t-il. Si ce n’est que pour montrer des prothèses hypertrophiées, je ne pense pas que ce soit une bonne chose.» 

Photo d'archives
Photo d'archives

Le professeur et directeur de l’École des médias de l’UQAM, Pierre Barrette, abonde en ce sens: montrer des pénis prosthétiques à l’écran annule le fait de montrer des pénis à l’écran.  

«Ça devient une espèce de mascarade, un déguisement», regrette-t-il, tout en ajoutant que le fait de montrer que des pénis «extrêmement manifestes» a comme conséquence de sexualiser l’objet plutôt que dédramatiser la sexualité. 

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D'ailleurs, Simon Boulerice s’explique mal qu’on montre le corps féminin nu à la télévision, alors que dans le cas des hommes, c’est encore un peu mystérieux.  

Des pénis partout... et tout le temps 

Prothèse ou pas, il faut toutefois l’avouer: jamais on n’a vu autant d’hommes nus à l’écran.  

Pour expliquer cette omniprésence de la nudité, Pierre Barrette évoque la généralisation de l’accès à la pornographie en ligne au début du XXIe siècle, qui est venue en quelque sorte banaliser la sexualité.  

«Aujourd’hui, tout le monde peut, en quelques clics, se mettre des masses et des masses de pénis et de seins plein la face, souligne-t-il. Il n’y a plus les réactions choquées devant une femme ou un homme nu, comme il y a 20 ou 25 ans.» 

Dans sa websérie Géolocaliser l’amour, qui explore les relations sexuelles entre hommes au temps des applications de rencontre, Simon Boulerice a voulu montrer de la nudité masculine, pour insuffler une dose de réalisme à son récit.  

Même que dans une scène dure de la série, dans laquelle son personnage se fait agresser sexuellement, on peut apercevoir le (vrai) membre de l’acteur qui joue son agresseur. 

Le pénis en érection  

Malgré cette multiplication des membres masculins à l’écran, un malaise persiste.   

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Dans Géolocaliser l’amour, Simon Boulerice a dû revoir la scène, pour la rendre moins crue. Il a, par exemple, dû demander à ce que l’éclairage soit davantage tamisé, de sorte que le pénis soit moins visible à l’écran.  

Un autre tabou persiste autour de la nudité masculine: le pénis en érection.    

Pierre Barrette
Pierre Barrette PHOTO Courtoisie

«Au-delà de la full frontal nudity, qui est taboue à la télévision, ce qui est encore plus tabou, ce sont les pénis en érection», précise le directeur de l’École des médias de l’UQAM. 

«Un homme qui sort du lit le matin sans avoir le pénis au garde-à-vous, ça laisse entendre qu’il n’y a pas de sexualité», poursuit-il.  

Ne montre pas un phallus qui veut 

Par ailleurs, au Canada, on ne peut pas montrer de la nudité à toute heure du jour et comme bon nous semble.  

Selon les règles du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), les contenus à caractère sexuel doivent passer entre 21h et 6h et ils doivent être accompagnés d’avertissements.  

Les séries diffusées sur des plateformes comme ICI TOU.TV ou encore le Club illico n’échappent d’ailleurs pas totalement à ces contraintes, puisqu’elles finissent généralement par être diffusées à heure de grande écoute sur les chaînes généralistes.  

Si une série comportait trop de sexualité, «on serait obligé de repasser dans le montage et de les charcuter, de les découper ou de les diffuser très tard le soir», souligne Pierre Barrette.   

C’est justement le format inhabituel de Géolocaliser l’amour – les épisodes durent une dizaine de minutes et sont donc trop courts pour passer à la télévision – qui a donné plus de liberté à Simon Boulerice.  

«Des relations sexuelles débridées entre hommes passeraient probablement moins à heure de grande écoute à la télévision. La série n’aurait peut-être pas existé à la télé», conclut l’auteur. 

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