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L'article provient de Le Journal de Québec
Société

Noël: la messe de minuit en voie de disparition au Québec

Cette tradition bien québécoise est en voie d’être révolue dans la province malgré sa popularité

Tout est en place à la cathédrale de Saint-Hyacinthe pour la présentation des messes de Noël. Le vicaire général Claude Lamoureux est heureux de constater que son diocèse proposera 16 messes de minuit aux paroissiens.
Tout est en place à la cathédrale de Saint-Hyacinthe pour la présentation des messes de Noël. Le vicaire général Claude Lamoureux est heureux de constater que son diocèse proposera 16 messes de minuit aux paroissiens. Photo Martin Alarie
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Photo portrait de Louis Deschênes

Louis Deschênes

18 décembre 2022
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La tradition de la messe de minuit est en voie de disparition au Québec. L’époque où les citoyens se rendaient à l’église du village, souvent située à deux pas de la maison, pour vibrer au son du Minuit Chrétien est maintenant révolue.

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En l’espace de quelques décennies, le Québec est passé de 500 messes de minuit à seulement une cinquantaine cette année.

Les intervenants contactés expliquent cette forte diminution par le vieillissement des prêtres et la rareté des bénévoles. Pourtant, cette célébration demeure « la plus populaire de l’église catholique au Québec », confirme Alain Pronkin, chroniqueur spécialisé en actualité religieuse.

« Je me souviens, dans les années 60, toutes les petites paroisses avaient leur messe de minuit. À Côte-des-Neiges, tu avais deux messes à minuit dans la même église. En haut, tu réservais en payant ton billet et tu avais une messe gratuite au sous-sol », raconte-t-il.

Une compilation du Journal permet de constater que plusieurs diocèses en région, tels que Gaspé (1), Rimouski (1), Sainte-Anne-de-la-Pocatière (1), Chicoutimi (2), Rouyn-Noranda (2) et Amos (2) ne proposent qu’une ou deux messes de minuit pour un territoire qui peut compter jusqu’à 70 églises.

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« C’est un drame, il ne faut pas se le cacher. Comment tu veux remplir une église si tu n’as plus de prêtre », réagit Alain Pronkin. Il croit même qu’un jour des laïcs seront autorisés à célébrer des messes dans certaines régions.

Des diocèses se démarquent

Malgré la baisse considérable d’affluence au fil des ans, des diocèses se démarquent et de petites communautés continuent de tenir à bout de bras la traditionnelle messe de minuit dans leur paroisse.

Ainsi, sur le territoire du diocèse de Saint-Hyacinthe pas moins de 16 messes de minuit seront célébrées, ce qui fait la fierté du vicaire général Claude Lamoureux.

« Chez nous, il y a une véritable volonté de perpétuer cette tradition. Les paroissiens travaillent pour trouver des bénévoles et les prêtres sont généreux de leur temps », souligne-t-il.

Le chanoine Lamoureux remarque également un bel engouement cette année pour la tenue de messes de minuit après deux ans de pandémie.

L’Estrie est aussi une région qui met beaucoup d’efforts pour conserver ses messes de minuit. Le diocèse de Sherbrooke confirme que neuf célébrations seront présentées dans ses églises. La messe de la petite paroisse de Racine est reconnue comme l’une des plus belles à travers le Québec.

Avec la célébration de plusieurs messes, la soirée du 24 décembre devient un véritable marathon pour les prêtres. La charge de travail est encore plus éreintante dans les régions alors qu’un curé peut visiter plusieurs paroisses en quelques heures seulement.

  • Écoutez la chronique d’Alain Pronkin, spécialiste des religions au micro de Benoit Dutrizac sur QUB radio :
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Cinq en un soir

Sur le territoire d’Amos, le prêtre Crescent Mboninyibuka commencera sa soirée de travail par une messe à 16 h pour la terminer après minuit.

Il aura alors célébré cinq messes à Roquemaure (16 h), Duparquet (18 h), Sainte-Germaine-Boulé (20 h), Palmarolle (21 h 30) et Gallichan (23 h) tout en ayant parcouru environ 150 kilomètres aller-retour.

« On ne réalise pas, mais c’est du stock faire quatre messes. Dans les régions parfois, il y a des distances de 50-60 kilomètres entre les villages. Imaginez s’il y a une tempête de neige », conclut Alain Pronkin.

  • Des messes de minuit pourraient se rajouter d’ici le 24 décembre.
  • Les diocèses de Longueuil, Saint-Jérôme et Valleyfield n’ont pu transmettre leur horaire. Le diocèse de Montréal attendait toujours la confirmation de quelques églises pour compléter sa liste.

Source : Compilation à partir des informations fournies par les diocèses du Québec

 

Une communauté de l’Estrie se mobilise pour sauver sa célébration

Depuis 10 ans, la messe de minuit à Racine débute par la fête de la Lumière alors qu’un vin chaud est servi à l’extérieur de l’église.
Depuis 10 ans, la messe de minuit à Racine débute par la fête de la Lumière alors qu’un vin chaud est servi à l’extérieur de l’église. Photo fournie par Brigitte Bombardier

Des citoyens de Racine, une petite communauté de 1300 âmes en Estrie, montent la garde pour conserver l’une des plus vieilles traditionnelles messes de minuit au Québec.

Malgré tous les efforts, l’événement pourrait en être à sa dernière édition cette année, si la paroisse ne se déniche pas un nouveau célébrant en 2023.

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« Oui, on craint de perdre la messe de minuit. On ne sait pas ce qui nous pend au bout du nez », affirme Brigitte Bombardier, coordonnatrice de l’événement qui existe depuis 100 ans selon plusieurs interlocuteurs. 

Même cette année, le défi était de taille pour maintenir cette tradition. Heureusement, le prêtre collaborateur George Harkins a prolongé son mandat d’un an ce qui lui permettra de célébrer la messe à minuit.

La responsable doit encore trimer dur pour trouver des bénévoles. À la fin novembre, elle s’est vue dans l’obligation de passer une annonce, dans les médias, à la recherche de volontaires. Aux dernières nouvelles, elle avait encore six places à combler, ce qui ne compromet pas la tenue de la messe, précise-t-elle.

Sans interruption

Même la pandémie n’a pas empêché les organisateurs de présenter la messe de minuit à Racine. « Non, nous n’en avons pas passé une [année] », lance avec fierté Brigitte Bombardier.

« On a pu chanter la messe en bulle familiale et toutes les autres règles sanitaires ont été respectées », explique celle qui a pu procéder avec son conjoint Bertrand Cloutier et trois de leurs enfants.

Depuis 10 ans, les organisateurs de l’événement ont ajouté une activité au grand plaisir des paroissiens. Dès 23 h, la veille de Noël, les citoyens sont attendus à l’extérieur de l’église pour prendre un vin chaud ou un chocolat chaud.

Des foyers et de petites cabanes y sont aménagés. À 23 h 30, les gens sont invités à l’intérieur de l’église pour un mini-concert de la chorale, le Chœur de Racine. Sur le coup de minuit, Bertrand Cloutier entonne l’émouvant Minuit Chrétien, qui est chanté de père en fils à Racine. Son père, Paul-Émile Cloutier, avait fait frémir les spectateurs pendant de nombreuses années.

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