Michel Jean explique pourquoi il prend sa retraite
Jean-François Brassard
Journaliste, Michel Jean le sera toute sa vie. Mais il décidait récemment de mettre ce volet de sa vie en veilleuse pour privilégier sa carrière d’écrivain et retrouver un équilibre dans sa vie personnelle. «À force de trop de passion, on peut brûler la chandelle par les deux bouts!»
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Ainsi, après 15 ans à RDI, puis 20 autres à TVA, Michel Jean annonçait en milieu de semaine dernière qu’il prenait sa retraite du télédiffuseur privé. Puis, le vendredi, il animait son dernier bulletin TVA Nouvelles Midi. Les choses se sont déroulées rapidement. «J’ai prévenu mes patrons il y a deux semaines, avant de partir en vacances. Je leur ai dit qu’à mon retour, je ne renouvellerais pas mon contrat.»
Après avoir communiqué sa décision, l’homme de 64 ans dit avoir éprouvé un soulagement. «Ensuite, je me suis senti un peu triste. J’aimais beaucoup animer le TVA Nouvelles Midi parce que c’est une émission qui me ressemblait. Ensuite, j’ai pensé à l’équipe avec laquelle je travaillais et avec qui je m’entendais super bien. C’est triste un peu...» Lundi dernier, au moment de notre entretien et tandis qu’était donné le coup d’envoi de la nouvelle saison, dans quel état d’esprit était-il? «Serein.»
Le prix du succès
En 2008, le journaliste faisait paraître un premier bouquin: Envoyé spécial. D’autres publications avaient suivi avant qu’en 2019, son roman Kukum ne connaisse un phénoménal succès populaire autant que critique. Traduit notamment en anglais, en espagnol et en allemand, ce livre lui a valu son lot d’honneurs, dont le Prix littéraire France-Québec. Depuis, ses ventes ont franchi le cap stratosphérique des 300 000 exemplaires. Cet accueil est valorisant, certes, mais les responsabilités qui en découlent sont à la même hauteur. L’effet sur sa vie privée a été direct: «Depuis six ans, je n’ai pas eu de vacances. J’ai eu seulement deux semaines, qui m’ont permis d’amener ma mère en France. Depuis plusieurs années, toutes mes vacances sont consacrées à écrire et à faire des tournées littéraires en Europe.» Lundi dernier, au moment de notre entretien, il n’avait pas encore eu de répit de l’été. «C’est comme si j’avais deux emplois à temps plein.» D’où le besoin de faire un choix.
Durant les périodes critiques d’activité, sa vie n’avait plus de sens. Concrètement: «Je me levais à 4h ou 5h et j’écrivais jusqu’à 7h. Jusqu’à 7h45, je préparais ma revue de presse pour ma rencontre de 7h45, puis je travaillais jusqu’à 14h à TVA. Je restais toujours une autre heure à la station et, à 15h, j’allais m’installer dans un café pour écrire jusqu’à 17h ou 18h.»
Deux jobs, deux passions. Mais les journées n’ont que 24 heures, pour lui comme pour nous. «J’ai fait ça un certain temps, mais j’ai fait beaucoup de sacrifices. Je veux remettre plus d’équilibre dans mon existence.» Cycliste de haut niveau, son vélo était pratiquement devenu décoratif. Il entend corriger le tir.
En équipe avec Anik Jean
Sitôt sa décision de quitter TVA communiquée à ses patrons, Michel Jean recevait un coup de fil de l’équipe d’Il restera toujours la culture, animée par Émilie Perreault à la radio de Radio-Canada. «Ils voulaient que je fasse des critiques littéraires. C’est l’écrivain qui les intéressait; pas le journaliste.» Il a saisi avec enthousiasme cette perche tendue. «J’ai eu d’autres offres. Je vais choisir les choses qui me tentent et qui me demanderont moins d’énergie qu’une émission de deux heures par jour.»
D’ici là, d’autres projets sont en mouvement. Voilà deux semaines, il remettait la première version du scénario de Qimmik, adapté de son dernier roman, paru l’an dernier. «La scénarisation est un nouvel exercice pour moi. En même temps, je suis une personne visuelle et mon écriture l’est aussi. Ça m’a aidé à faire la transition.»
Anik Jean, à qui il voue une admiration sans bornes, réalisera le long métrage. «Pour l’écriture, je me sentais en confiance parce qu’Anik est une amie. C’est une fille extraordinaire, en plus d’être une grande réalisatrice. Avec elle, je savais que ce serait le fun.»
Écrivain et journaliste, il le restera toujours. Niaut*, Michel Jean, et... à tout de suite!
* Au revoir en langue innue. Michel Jean est un écrivain et journaliste innu.