Maude Guérin s’ouvre sur sa nouvelle vie à la campagne avec son amoureux
Pascale Wilhelmy
Les derniers mois ont été riches en émotions pour la comédienne que le public aime tant. Non seulement elle a terminé les tournages du téléroman 5e rang, quittant ainsi la famille qu’elle côtoyait depuis plus de cinq ans, mais elle a aussi tout récemment emménagé avec son amoureux dans une maison ancestrale située à la campagne.
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J'arrive au studio alors qu’elle vient tout juste de terminer les essayages et les dernières retouches à son maquillage, qui la rendent encore plus lumineuse. Elle parle de ses projets, raconte qu’elle profitera du fait qu’elle est en ville pour aller faire des courses pour un souper à préparer. Elle évoque aussi un tapis rouge à venir à Lille, en France, pour le Festival Séries Mania, où sera présentée Société distincte, qu’on découvrira en juin. En l’observant pendant qu’elle fixe la caméra, sourit, prend un air plus sérieux, on réalise que Maude Guérin excelle dans l’art de poser tout en restant authentique. Elle est solaire, forte et vulnérable à la fois. On a l’impression que la lentille du photographe saisit son essence profonde. Comme le dirait la chanson, «elle a ce tout petit supplément d’âme» qui change tout.
Maude, c’est la fin d’une belle aventure. Tu as terminé le tournage de 5e rang en décembre.
Oui. Ça agite beaucoup de choses. C’est un virage pour moi. Tu sais, c’est cinq ans et demi de travail où tu es bien, avec la même gang. Tu arrives sur le plateau et c’est facile, car tu connais tout le monde. Là, je redeviens pigiste. C’est une autre réalité, que je n’avais pas vécue depuis cinq ans. Mais c’est celle des comédiens habituellement. J’ai été privilégiée de travailler pendant tout ce temps et d’être le lead de ce téléroman.
Marie-Luce, ton personnage, était la femme forte du clan, celle qui le tenait ensemble. Te ressemble-t-elle?
Oui, et j’ai aimé ça! C’est drôle, car je l’ai crié haut et fort. Je ne suis pas quelqu’un qui se vante, au contraire, mais je dis souvent que je suis faite pour ça, rassembler les gens. J’ai une énergie rassembleuse. J’aime arriver sur le plateau et parler aux gens, être là pour tout le monde, être l’oreille attentive. Je m’aperçois que c’est important pour moi. J’ai vraiment cette énergie-là. Il va falloir que je fasse quelque chose avec ça.
C’est vrai que tu es solaire. Les gens sont attirés vers toi...
Je le réalise de plus en plus. Tu sais, ça fait 37 ans que je fais ce métier-là, et je sens ça. Des fois, je dis à mon chum: «Il faut que j’utilise cette énergie- là!» Mais je ne sais pas encore quelle forme ça va prendre. J’aimerais réaliser mes projets personnels, que ça vienne de moi, accomplir des choses différentes aussi. Je suis ouverte en ce moment. Or, je sais bien que je n’aurai pas un autre premier rôle demain matin. À l’âge où je suis rendue, c’est plus difficile des fois. Alors, je pense à la suite.
C’est vrai que la fin de cette belle et longue aventure te fait vivre une forme de deuil, mais ça te laisse de l’espace pour d’autres projets.
Oui, j’ai du temps pour me poser, pour voir plus loin. Mais la vérité, c’est que ça entraîne aussi un stress. Les gens ne sont pas inquiets pour moi, mais tu sais, je pense que c’est différent pour les actrices à un certain âge. Bon, je vais en parler puisque c’est la réalité: François Papineau, que j’adore et qui faisait mon chum dans 5e rang, joue déjà dans deux ou trois autres séries. C’est comme ça pour les acteurs vieillissants. Pour les femmes, c’est plus dur. Je le dis tout le temps: il y a plein de bonnes actrices de ma génération, beaucoup de femmes qui ont du talent. Le choix est donc vaste. Il faut voir ça d’un oeil positif.
En général, à la fin d’un projet, on se promet qu’on va se revoir, mais ces promesses tombent souvent à l’eau. Ce n’est pas le cas avec tes «soeurs» de 5e rang...
C’est justement ça, mon souper de demain soir! C’est pour ça que je m’en vais faire des courses. Moi et les comédiennes qui jouaient mes soeurs dans l’émission, on se voyait occasionnellement pendant qu’on tournait. Par exemple, on se retrouvait sur une terrasse l’été. Demain soir, elles ne pourront pas toutes venir, mais plusieurs viennent souper chez moi. On s’est dit qu’il fallait faire ça vite, parce que sinon, tu as raison, on se perd de vue. C’était une gang particulière. On dit ça à chaque projet ou presque, mais là, c’était réel, vraiment. Les actrices qui jouaient mes soeurs ont des âges différents et des parcours différents, mais on est toutes à l’écoute, on partage plein d’affaires, on se raconte ce qu’on vit.
Ton amoureux, Christian Vézina, écrit. Maintenant que tu as plus de temps, as-tu envie d’écrire à ton tour?
Oui, mon chum écrit, et on pense à développer une émission ensemble, tranquillement. On va voir. Chose certaine, on a des idées. On a monté la pièce Love Letters. Il s’agit de correspondances de lettres amoureuses. C’est facile et agréable à faire: deux tables, deux verres, puis on parle aux gens et on lit des textes d’amoureux. Il y a quelqu’un qui serait intéressé à ce qu’on présente le spectacle en tournée, et j’ai le goût de me retrouver avec mon chum sur scène. Ça me tente.
Ton conjoint, qui est auteur et poète, a écrit entre autres L’inventaire des miracles, un recueil de poèmes qui parlent de tous les petits moments, «ces petits riens» qui rendent la vie belle. Ces moments, pour toi, ressemblent à quoi?
Nos petits bonheurs sont tout simples. Ça commence le matin quand on prend deux cafés, et ça peut s’étirer pendant une heure et demie. On profite du moment. Parfois on lit. Je me suis remise à lire. Je fais d’ailleurs partie du club de lecture de Marie-Claude Barrette, avec Sophie Prégent et Guylaine Tremblay. C’est formidable! On lit un livre par mois, puis on échange sur le sujet. Tu vois, quand je dis que je veux m’ouvrir à autre chose, c’est un peu ça aussi. Je lisais beaucoup de textes de théâtre et de scénarios de téléromans, mais je me suis aperçue que je ne lisais plus de fiction. D’autres moments de bonheur, pour moi, c’est quand on va promener notre gros caniche royal dans le bois. Je regarde alors les arbres, et je trouve ça beau... On habite maintenant à la campagne. C’est tout récent, ça fait quelques mois seulement. On fait de la raquette, on pense à nos semis pour le printemps, mon chum fait du pain au sarrasin, du yogourt... C’est plein de petites choses comme ça qui nous rendent heureux. On est vraiment dans un «trip» campagne en ce moment.
Tu sembles t’y plaire vraiment!
Tellement! Moi, je regarde une fleur et je suis heureuse! On veut d’ailleurs se faire un petit jardin. Je cours les brocantes aussi. J’adore ça! Il y a assez de meubles sur la planète; ça suffit, la surconsommation! Récemment, je suis revenue de La Tuque avec une commode. Hier, je me suis fait venir une lampe d’un antiquaire en Ontario. Chaque détail est pensé chez nous. On ne se presse pas, c’est un work in progress. On a acheté une maison de 1853 et on a vendu tous nos meubles avant d’y entrer. Mon chum et moi, on habitait un duplex centenaire: lui restait en bas et moi, en haut. Et là, comme un jeune couple, on vit ensemble. Et c’est formidable! Il y a une rallonge à la maison, et on a plein de projets. On veut mettre de la tapisserie dans certaines pièces, je pense à des appliques... On y va lentement. En ce moment, j’ai le temps de le faire en plus. Je n’ai pas eu ça souvent dans ma vie, du temps pour moi, pour mon couple.
Justement, comment se passe cette nouvelle vie à deux?
Ça n’a pas changé grand-chose en fait. On se donne de l’air quand même. Mon chum est parti à Montréal hier; il est allé à la Grande Bibliothèque, puis il est revenu en soirée avec des livres et des films à regarder. On aime être ensemble et aussi avoir chacun nos moments. Mon chum rêve de se construire une petite cabane dans le bois pour aller écrire. J’ai toujours aimé la campagne. Je viens de La Tuque, et j’ai un petit chalet sur pilotis là-bas, au bord du lac de mon enfance, juste à côté de celui de ma soeur. C’est mon antre de paix. Ici, on n’a pas de lac, mais on a une forêt, et c’est parfait.
Tu as l’air heureuse, Maude...
Oui, je suis heureuse. Je suis dans une belle période de ma vie. Dans ma voiture, j’ai accroché un petit lapin en laine qu’une dame m’avait tricoté et offert quand j’ai participé à l’émission La petite séduction. Je l’ai toujours et je le serre fort en disant: «Mon Dieu, merci la vie!» Je remercie la vie tous les jours, et je lui demande de me donner du temps, parce que je veux qu’on passe de belles années encore, mon chum et moi. Ma mère est décédée récemment, et je lui parle également. Je lui dis: «Maman, on est bien, on est heureux.» Et je lui demande du temps à elle aussi...
Elle est en vedette dans 5e rang le lundi à 20 h, à Radio-Canada. La grande finale sera diffusée le 25 mars. On la verra dans Société distincte, sur Club illico, cet été.