Marie-Joanne Boucher revient sur les années plus difficiles où elle a eu moins de rôles
Patrick Delisle-Crevier
Il n’y a pas si longtemps encore, la comédienne Marie-Joanne Boucher songeait à faire complètement autre chose comme métier, tellement le téléphone ne sonnait plus pour elle. Puis, le projet Sorcières, qu’elle a créé en compagnie de Céline Bonnier et Noémie O’Farrell, l’a ramenée à l’avant-plan. Voilà qu’elle est en nomination pour un Gémeaux grâce à son rôle dans la série. Nous nous entretenons avec elle sur la vie de famille, le rôle marquant de Claudie qu’elle a campé dans Virginie, de la cinquantaine qui approche, et de presque 30 ans de carrière.
Marie-Joanne, tu viens de recevoir une belle nomination aux Gémeaux. Comment le vis-tu?
Savoir que mon émission Sorcières récolte de belles nominations lors de la prochaine cérémonie des Gémeaux, ça me touche. Moi-même, je récolte ma première nomination en carrière, dans la catégorie Premier rôle féminin pour Sorcières.
Il y a eu une période très tranquille pour toi, à une certaine époque. Voilà que ta carrière a un nouveau souffle. Comment accueilles-tu ça?
Je suis très contente, d’autant plus que Sorcières est un projet que Céline Bonnier, Noémie O’Farrell et moi-même, qui incarnons les trois soeurs dans la série, avons entrepris. Nous voulions travailler ensemble, et ce projet est né sur Zoom pendant la pandémie. Nous l’avons travaillé pendant trois ans. Pour l’écriture, nous avons ensuite passé le flambeau à des auteurs. Mais j’ai l’impression, puisque je l’ai créé, de posséder vraiment mon personnage.
Te voilà en nomination pour ton rôle dans cette série. Qu’est-ce que ça représente pour toi?
Ça représente beaucoup de choses. Recevoir ma première nomination aux Gémeaux, à l’approche de mes 50 ans, c’est une belle tape dans le dos. C’est même plus qu’une belle tape dans le dos... c’est comme un gros câlin! Ça fait le plus grand bien. Faire partie d’un tel projet et pouvoir s’installer pendant longtemps dans le salon des gens, c’est un beau privilège qui n’arrive pas souvent dans une carrière d’actrice.
On ne t’a pas vue pendant un certain temps. Croyais-tu encore à ce métier?
Il y a 11 ans, quand j’ai eu ma fille, j’étais découragée, parce que ça n’allait plus du tout sur le plan professionnel. Je me souviens que j’allaitais ma fille et que je regardais les programmes universitaires. Je songeais vraiment à retourner aux études pour gagner ma vie dignement. Aujourd’hui, je fais encore ce métier, mais je ne suis pas qu’une actrice. Si je ne fais pas ce métier, je fais autre chose, et je crée mes projets. Je suis beaucoup trop hyperactive pour attendre à côté du téléphone qu’on me choisisse pour un rôle. Quand je n’ai pas travaillé, j’ai eu mes deux enfants et j’ai aussi écrit des livres de recettes. Je dois dire que je suis une maman impliquée et très présente. C’est très important pour moi d’être là, de m’occuper de ma marmaille et de faire à manger. Ma priorité, c’est d’être là pour mes enfants, et la carrière passe après. J’ai aussi un petit côté entrepreneur, que je mets en pratique de temps en temps.
As-tu eu, éventuellement, à faire autre chose?
Non, j’ai eu la chance d’avoir un conjoint qui a beaucoup travaillé pendant la période où j’étais à la maison avec les enfants. Il est producteur de musique. Nous alternons et nous nous lançons la balle: quand l’un travaille plus, l’autre est à la maison.
À quoi ressemble ton été?
Nous sommes en pause de tournage pour Sorcières. Ça nous permet de prendre des vacances et de respirer un peu. J’en profite, parce que l’été, ça passe trop vite. Pour moi, c’est important de passer du temps avec mes enfants durant la belle saison. Le reste de l’année, ils sont tellement occupés avec l’école, les activités parascolaires et tout le reste. Nous décrochons quelques semaines en famille, et ça fait le plus grand bien. Nous allons toujours à la plage aux États-Unis. Je veux aussi en profiter pour lire et penser à différents projets.
Tu es l’une des créatrices de la série Sorcières. Comment est née cette idée?
Ça s’est fait de façon naturelle. J’avais depuis longtemps envie de travailler avec Céline Bonnier. Dès que nous avons commencé à collaborer, il y a eu une espèce de résonance entre nous. Et ce fut la même chose avec Noémie O’Farrell. Même si nous sommes dans trois univers différents, dans trois décennies de vie différentes... Je suis au seuil de la cinquantaine (en mars prochain), Céline entre dans la soixantaine et Noémie, dans la quarantaine. C’est Noémie qui a eu l’idée de base pour Sorcières, et nous l’avons développée ensemble.
Tu auras bientôt 50 ans et, l’an prochain, tu célébreras 30 ans de carrière...
C’est un choc, tellement ça a passé vite. En même temps, je constate que c’est un métier qui a changé. Il y a des choses qu’on a perdues, mais d’autres qu’on a gagnées, dont notre authenticité. Nous faisons une télévision unique, au Québec! Je trouve ça beau, là où nous sommes rendus dans nos productions. C’est une grande victoire d’être authentique, et un privilège de ne plus avoir à chercher à ressembler aux autres.
Si je te dis «Claudie», qu’est-ce que ça évoque en toi?
C’est comme une amie de longue date. Elle a été tellement marquante pour moi. Ce que je trouve drôle, à 50 ans, c’est que les jeunes de 30 ans avec qui je travaille me parlent tous de Virginie et de mon personnage. Ça me fait chaud au coeur de voir qu’elle a encore une place dans le coeur des gens et que ce téléroman a été marquant.
Avoir 50 ans, qu’est-ce que ça représente pour toi?
Je vis ça du mieux que je peux! Mais c’est un travail de tous les jours de s’accepter... Je souhaite être l’une de ces femmes qui vieillissent bien. C’est certain que c’est parfois difficile, mais je m’inspire de certaines femmes qui sont plus vieilles que moi.
Sorcières, lundi 20 h, à TVA, dès le 9 septembre.