Manifestation à Ottawa: tensions et menaces en plein cœur de la capitale
Des résidents d’Ottawa sont exaspérés d’entendre des klaxons de camions durant 16 heures par jour
Francis Pilon et Clara Loiseau
OTTAWA | Des camionneurs « antitout » ont refusé de quitter le centre-ville de la capitale fédérale après trois jours d’occupation qui coûtent quotidiennement 800 000 $ au trésor public, malgré les demandes des autorités.
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Après avoir martelé toute la journée que les camionneurs devaient quitter dimanche soir, la police d’Ottawa s’est résignée à ne pas intervenir en fin de soirée.
« La police a évité de verbaliser et de remorquer les véhicules afin de ne pas provoquer de confrontations avec les manifestants », a finalement avoué dans un communiqué diffusé en fin de journée le service policier.
Les coûts financiers du maintien de l’ordre sont estimés à plus de 800 000 $ par jour, selon le corps policier.
Plans pour résister
Certains des manifestants ont expliqué n’avoir plus rien à perdre après 22 mois de pandémie et trois jours de siège.
« Je suis pas vacciné. Je ne peux plus aller aux États-Unis travailler. Pourquoi on quitterait Ottawa ? On va partir quand Justin Trudeau va mettre fin aux règles sanitaires », explique Kyle Mcgilly, derrière le volant de son poids lourd et en compagnie de son chat Zyna.
Sur place, des leaders du convoi ont pris la parole dimanche. Ils revendiquaient la fin du port du masque, d’autres dénonçaient la vaccination des enfants et l’un d’entre eux a même lu la Bible pour motiver le groupe.
Un représentant du Journal est d’ailleurs allé à la rencontre de Patrick King, 44 ans, qui est le principal organisateur du convoi au Canada.
M. King était coiffé d’une casquette sur laquelle l’on pouvait lire « théoricien du complot ». Il fumait aussi une cigarette à l’intérieur de l’hôtel où plusieurs manifestants logent durant le week-end.
« Si vous voulez qu’on quitte, annulez les mesures sanitaires. Aussi, il faut que le Parti libéral du Canada démissionne », soutient M. King, avec un rire gras.
Ce dernier est bien connu pour ses propos racistes sur les réseaux sociaux. Il parle souvent dans ses vidéos en ligne d’un « remplacement de la population » qui viserait à faire tomber la « race anglo-saxonne ». Il appelle notamment à la violence contre des groupes antiracistes sur sa page Facebook.
Lors de l’entrevue avec Le Journal, il arborait également un chandail en référence aux Soldats d’Odin, groupe suprémaciste blanc.
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Ras-le-bol des locaux
Des résidents ont aussi manifesté leur colère contre le convoi stationné dans leur quartier. Certains sont exaspérés d’entendre les klaxons durant plus de 16 heures par jour.
« Ça fait deux jours que je ne dors plus. J’en ai marre et je suis fatigué », a lancé avec colère un résident qui habite sur la rue Bank, où des camions ont élu domicile.
Le Journal a aperçu des Ottaviens lancer carrément des œufs ou des morceaux de glace sur les véhicules qui roulaient dans les rues du centre-ville.
En tout, sept convois de partout au pays se sont rendus dans la capitale fédérale ce week-end, selon la police. Ils étaient des milliers à hurler « liberté » et « fuck Trudeau » samedi. Dimanche, la moitié d’entre eux avaient déjà quitté le centre-ville, selon les autorités.