L’Ukraine sous observation
Jacques Lanctôt
Pendant que les gros bras semblent vouloir dicter aux gouvernements et aux spécialistes de santé publique la marche à suivre pour ce qui est du combat contre la COVID-19 et que frétillent de joie les complotistes et autres réfractaires aux mesures sanitaires, d’autres gros bras, ceux de Washington et de l’OTAN, menacent de transformer notre environnement en un vaste champ de désolation.
Un peu d’histoire
L’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique Nord) a été créée en 1949, en pleine «Guerre froide». Il s’agissait de faire face au «péril soviétique», au sortir de la Seconde Guerre mondiale, où la Russie avait payé un lourd tribut — plus de dix millions de morts — pour libérer de l’enfer nazi une partie de l’Europe jusqu’à Berlin. À part les États-Unis et le Canada, les dix autres pays qui adhérèrent au traité de défense étaient tous européens. Lorsqu’éclata l’Union soviétique, en 1991, les gouvernements occidentaux promirent à Gorbatchov, le dirigeant de la Russie, que l’OTAN ne s’étendrait pas au-delà des limites qu’elle occupait alors.
Or, petit à petit, les nouvelles répliques de l’Europe de l’Est, nées avec l’éclatement de l’Union soviétique, ont été sollicitées pour intégrer l’OTAN. Ce faisant, les États-Unis y ont installé des bases militaires et ont armé ces pays pour faire face au même «péril soviétique», devenu «péril russe». On peut dire qu’aujourd’hui, la Russie est complètement encerclée sur sa façade occidentale, à part la Biélorussie et l’Ukraine.
Depuis plusieurs années, la Russie, un des plus grands producteurs de gaz, s’affaire à construire un immense gazoduc capable d’alimenter toute l’Europe. Un premier contrat a été signé avec l’Allemagne. Ce projet entre directement en conflit avec les intérêts des États-Unis, qui visent le même marché pour écouler leur production de gaz de schiste. Or ce gazoduc russe traverse le territoire ukrainien. Vous me suivez?
Les États-Unis ont tout intérêt à répandre la rumeur d’une invasion russe en Ukraine. En même temps, ils installent un peu partout autour de la Russie des fusées à tête nucléaire capables d’atteindre Moscou en quinze minutes, soit à peine le temps de les intercepter. La Russie a donc massé des troupes le long de la frontière ukrainienne en avisant qu’elles ne se retireraient qu’avec la promesse que l’OTAN et les États-Unis n’installeraient aucune base militaire en territoire ukrainien. Car à partir de l’Ukraine, ces mêmes fusées ne mettraient que cinq minutes pour atteindre Moscou. Impossible de les intercepter dans un si court délai.
La Russie répète à qui veut bien l’entendre qu’elle n’a nullement l’intention d’envahir le territoire de son voisin ukrainien. Que diraient les États-Unis si la Russie agissait de la même façon? s’est interrogé le président Poutine. Si la Russie installait des rampes de lancement en direction des États-Unis, à partir du territoire mexicain, ou du Venezuela ou du Canada? Combien de porte-avions russes stationnés devant la ville de San Francisco ou de New York? Aucun! On peut donc se demander ici: qui menace qui?
Ce mauvais théâtre de la peur, mis en scène par Joe Biden pour donner l’illusion que les États-Unis sont toujours le numéro 1 au box-office, vise à sauver sa gouvernance en perte de crédibilité, mais surtout à faire en sorte que l’Europe ne dépende pas de la Russie pour sa sécurité énergétique, mais plutôt des États-Unis. Des milliards de dollars sont en jeu. Tout comme les fameuses «armes de destruction massive» de Saddam Hussein, en Irak, ou les attaques avec armes chimiques de Bachar el-Assad, en Syrie, l’invasion imminente de l’Ukraine par la Russie est une autre fausse nouvelle lancée par le maître de la Maison-Blanche et qu’a reprise le chœur de l’OTAN. Mais ce qui est bien réel, cependant, c’est la menace d’une guerre nucléaire.