L’Oculus Quest 2 donne un nouveau souffle à la réalité virtuelle
Maxime Johnson
La révolution de la réalité virtuelle annoncée en grande pompe il y a cinq ans ne s’est jamais concrétisée. Avec sa simplicité d’utilisation, ses bonnes performances et son prix raisonnable, le nouveau casque Oculus Quest 2 lancé la semaine dernière pourrait toutefois renverser la tendance.
Vendredi soir, 22h. Je suis dans une salle devant un écran géant avec 7 autres spectateurs. Un jeune Tom Cruise se pavane à l’écran avec ses lunettes d’aviateur. Le confinement est peut-être en place au Québec, mais pour l’instant, en regardant Top Gun avec des étrangers, je me sens (un peu) comme dans une vraie salle de cinéma.
L’illusion n’est pas parfaite – mon voisin ne cesse de se plaindre qu’il est dans son lit et qu’il n’arrive pas à placer ses oreillers convenablement – mais la qualité d’image est bonne et l’expérience est assez réussie pour m’encourager à endurer le mauvais jeu de Val Kilmer et passer près de deux heures avec un casque de réalité virtuelle sur la tête.
Beaucoup de choses à faire
Regarder un film traditionnel dans une reproduction de salle de cinéma, voir un documentaire conçu spécifiquement pour la réalité virtuelle, assister à des concerts en direct, jouer à des jeux, participer à des réunions virtuelles, créer des œuvres d’art en trois dimensions : voilà le genre de choses qu’il est possible de faire avec l’Oculus Quest 2 de Facebook, un casque de réalité virtuelle autonome vendu 459$ au Canada.
Aucune de ces expériences n’est tout à fait nouvelle. La plupart des jeux et logiciels auxquels j’ai joué au cours des dernières semaines étaient d’ailleurs présents sur le premier Oculus Quest, mais aussi parfois sur l’Oculus Rift et même le PSVR de Sony. Mais l’Oculus Quest 2 est un modèle de simplicité, qui nous incite à l’utiliser plus souvent que les autres appareils sur le marché.
Alors qu’il fallait auparavant être branché à une console ou un ordinateur puissant pour profiter de la réalité virtuelle, la gamme Oculus Quest peut être utilisée de façon autonome. Il suffit donc de placer le casque sur sa tête pour être transporté dans un environnement virtuel en quelques secondes. On n’a pas besoin d’écouteurs, et même les contrôleurs peuvent être laissés de côté si on veut contrôler l’interface avec nos mains directement (en théorie du moins, car en pratique, les manettes sont plus efficaces).
L’Oculus Quest 2 est aussi un casque dit 6 DoF (six degrees of freedom en anglais), ou « six degrés de liberté ». On peut non seulement tourner notre tête pour voir ce qui se passe tout autour de nous, mais on peut en plus se déplacer dans le monde réel pour faire bouger notre personnage dans le monde virtuel.
Pour se faire, il faut au préalable indiquer au casque quelle est notre zone de jeu pour être certain de ne pas frapper un mur, une opération qui ne prend que quelques secondes à réaliser.
Le premier Oculus Quest permettait déjà de jouer de la sorte, mais avec sa puissance accrue, son successeur permet de lancer une partie plus rapidement, et offre une meilleure qualité visuelle, grâce à son écran ACL amélioré de 1832 par 1920 pixels. Les graphismes des jeux ressemblent plus à ceux pour téléphones intelligents qu’à ceux pour consoles, mais ils sont suffisants pour nous permettre d’apprécier l’expérience.
Parmi les titres qui m’ont accroché, notons l’excellent Beat Saber, un jeu musical qui mélange Dance Dance Revolution, Guitar Hero et Star Wars. Echoe VR, une sorte d’Ultimate Frisbee avec des jetpacks, vaut aussi le détour, tout comme le jeu d’escalade The Climb. Certains jeux à venir s’annoncent aussi prometteurs, notamment le jeu d’horreur Blair Witch VR (un genre qui se prête particulièrement bien à la réalité virtuelle) et Population: One, un jeu de tir inspiré de Fortnite. Certains logiciels sont gratuits, mais prévoyez généralement payer entre 20$ et 35$ l’unité.
Avec un ordinateur puissant et un câble USB (Facebook en vend un à 109$, mais n’importe quel câble USB 3 Type-C fera l’affaire), vous pouvez aussi utiliser l’Oculus Quest 2 pour diffuser des logiciels PC en réalité virtuelle, grâce à la fonctionnalité Oculus Link. Vous pourrez alors essayer les jeux conçus pour l’Oculus Rift, mais aussi ceux des autres plateformes, comme l’excellent Half-Life: Alyx.
Une plateforme communautaire
L’aspect qui m’a le plus étonné de l’Oculus Quest 2 est sa communauté. Plusieurs jeux sont conçus pour permettre aux joueurs de se rencontrer avant les parties, et il existe de nombreux logiciels pour regarder du contenu vidéo en groupe ou passer du temps ensemble.
Ce contenu est d’ailleurs mis de l’avant avec brio. L’interface de l’Oculus peut par exemple indiquer qu’il y a beaucoup de gens en train d’utiliser Rec Room, une sorte de maison des jeunes pour geeks en réalité virtuelle. Encore mieux, Oculus peut même préciser que les utilisateurs y jouent principalement au paintball en ce moment, ce qui peut nous inciter à les rejoindre. La réalité virtuelle nous isole peut-être du monde qui nous entoure, mais on ne s’y sent jamais seul.
Fait intéressant, plusieurs fonctionnalités ont été mises en place pour s’assurer que tout le monde s’y sente en confiance. On peut ainsi empêcher les gens d’entrer dans notre bulle et on peut les mettre en sourdine (c’est d’ailleurs ce que j’ai fait avec le fatigant qui parlait de ses oreillers pendant Top Gun).
Quelques décisions douteuses
Pour toutes ses qualités, l’Oculus Quest 2 a quand même quelques problèmes.
Je regrette par exemple qu’il soit essentiel d’enregistrer son compte Facebook pour utiliser la plateforme. Les joueurs devraient être libres de le faire ou non. Le réseau social s’impose aussi de quelques autres façons dans l’expérience. La seule manière de partager une capture d’écran, par exemple, est de la publier sur Facebook ou Messenger. J’ai ainsi été forcé de créer un faux groupe Facebook privé pour télécharger les captures mises en ligne avec cette chronique. Facebook est assez gros, l’entreprise n’a pas besoin de nous enfoncer son service dans la gorge de la sorte pour survivre.
L’Oculus Quest 2 est malheureusement aussi livré avec une sangle de basse qualité. Celle-ci tient bien l’appareil en place, mais elle n’est pas très confortable et laisse des traces sur notre visage après une séance de jeu. Il existe une meilleure option, la Élite Quest 2, mais celle-ci est vendue 79$ de plus. Notons qu’il existe aussi une sangle avec batterie pour prolonger l’autonomie du casque (assez courte à 2 heures environ), mais n’importe quelle batterie externe pour téléphone intelligent peut aussi être utilisée à cette fin.
Le mécanisme pour ajuster les lunettes à nos yeux risque finalement de ne pas convenir à tous les visages, mais je n’ai personnellement eu aucun problème de ce côté, et vous pouvez de toute façon retourner l’appareil s’il ne vous convient pas.
Malgré ses défauts, l’Oculus Quest 2 permet d’apprécier la réalité virtuelle comme jamais auparavant. Je ne pense cependant pas qu’il va transformer le marché à lui seul : la technologie devrait demeurer de niche pour encore quelques années. Mais alors que mes autres casques de réalité virtuelle prennent surtout la poussière dans mes tiroirs, je prévois utiliser l’Oculus Quest 2 dans ma vie de tous les jours. C’est un gros pas en avant.