Lise Dion nous parle de la fin de sa carrière et de sa retraite
Daniel Daignault
Lise Dion était récemment au Salon des aînés de Saint-Jérôme, où Yvon Deschamps était l’invité d’honneur. Lorsque je l’ai croisée, elle s’apprêtait à lui rendre hommage avec quelques amis. Celle qui a en quelque sorte annoncé la fin de sa carrière d’humoriste et sa retraite était en belle forme. Comme toujours, elle a accepté de se confier sans retenue.
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Lise, la dernière fois qu’on s’est vus toi et moi, c’était avant ton infarctus. Tu n’avais pas encore décidé de mettre fin à ta tournée. As-tu totalement arrêté?
Oui. J'ai accepté de participer à des événements spéciaux, mais c’est sûr qu’il n’y aura plus de productions de spectacles.
Comment vis-tu avec cette situation?
Je suis obligée de te dire que je vis très bien avec ça. La crise cardiaque, je m’en suis remise facilement. Mais la fatigue des 367 shows a été plus difficile à surmonter. J’ai maintenant 69 ans. Je me suis dit que j’avais eu un avertissement et que s’il me restait 10 ans, 5 ans ou bien 4 ans, il fallait que j’en profite. Je me suis dit: «Fais ce que t’as envie de faire et profite des enfants, de ta vie, de la maison de campagne.»
Comment occupes-tu tes journées?
J’ai lu et j’ai lu! J’ai 5000 pages de lues de toutes sortes de livres! J’ai récupéré comme ça: avec la lecture, la piscine, les sorties. Je me suis changé les idées. Cet été, j’ai fait 46 activités. Je le sais parce que je les avais écrites; c’était des choses que je voulais faire. Je n’arrête pas de lire, mais j’ai aussi envie d’écrire. Ça, ça va toujours être là. J’ai une idée de roman, mais je ne veux pas me mettre de deadline. Ça ne me tente pas de me mettre de la pression. Les premières fois que j’ai dit non à des contrats, ça me piquait. Aussitôt qu’il était question du travail, je me sentais vraiment mal. Avant, je n’aimais pas ça dire non, mais je n’ai plus de remords aujourd’hui quand je refuse des choses, parce que j’ai compris qu’il faut que je m’occupe de ce qui s’en vient.
Tu as réalisé que tu t’en allais dans le mur et qu’il fallait que tu arrêtes?
Exact. Il me restait 17 shows à faire et j’ai dit à mon agent que je ne pensais pas qu’on allait les remettre et les faire. J’ai eu peur de m’en aller, je ne veux pas m’en aller tout de suite.
Te sens-tu bien?
Oui, je suis en forme! J’ai perdu 45 lb en environ un an. J’avais perdu 7 lb avant ma crise cardiaque, et le reste depuis ce temps-là. Je ne vais plus manger au restaurant aussi souvent, pas à tous les jours comme lorsque j’étais en tournée. Ça, je peux dire que ça a fait du bien. Et quand on sait comment les artères se bloquent, on regarde la viande et on se dit que ça se colle sur les artères, cette affaire-là! Ça fait peur. Je ne sais pas combien de temps ça va durer, cette peur-là, mais je mange beaucoup moins de viande et plus de légumes.
Donc, la récupération se passe bien depuis ton infarctus?
Oui, mais j’ai toujours peur de ressentir un symptôme. Il y a des gens qui m’ont dit que la première année (elle a fait son infarctus le 3 novembre 2023), c’était normal que j’aie peur. Quand tu ressens une petite affaire à gauche, tu te demandes si c’est ça... Ce sont des moments de panique, mais ça passe.
Tu fais toujours du quatre roues?
Oui, j’ai toujours le mien. J’en fais dans le bois, mais j’ai vendu le Spyder (sa moto à trois roues). J’étais trop nerveuse quand je conduisais. J’avais les mains tellement serrées sur les poignées que j’étais obligée d’arrêter parce que mes mains étaient trop engourdies! Je ne veux plus de stress, ça ne me tente plus. Le cardiologue m’a dit — et ça, il faut absolument que les gens le sachent — qu’on ne sait pas encore tout ce que le stress cause sur le coeur. Ce n’est vraiment pas bon! Je veux essayer d’en parler le plus possible. Les symptômes sont de gros problèmes d’estomac; lorsqu’on en a, c’est signe que le stress nous envahit. C’est sûr qu’on la ressent, la douleur de la crise, mais ça ne dure pas longtemps; quatre ou cinq secondes. C’est une grosse douleur qui te faire dire: «Ouch!» J’ai fait beaucoup de crises d’angoisse, et quand j’ai fait mon infarctus, je pensais que c’en était une de plus. Mais ce n’était pas ça.
Qu’est-ce que les gens te disent lorsqu’ils te croisent?
La plupart me disent que j’ai bien fait d’arrêter et d’en profiter. Il y en a d’autres qui ont de la peine et qui s’ennuient. Ils espèrent que je vais revenir sur scène. Ça me fait de la peine de leur dire non, mais je ne peux pas partir une autre production, un autre spectacle: c’est ma santé qui va écoper. Je vais faire d’autres apparitions, par exemple si on me demande de faire un sketch dans un gala. Mais j’avais besoin d’une année juste pour me remettre d’aplomb. Ça va faire un an bientôt, et j’ai l’impression que le monde du showbiz me donne un break. Je n’ai pas trop d’appels.
Tu as 69 ans, mais tu peux dire que tu es encore dans la soixantaine!
(Elle rit) Exactement. Les 70 ans vont être plus rough. Mais bon... J’ai le privilège d’être là, et je ne vois plus le 70 de la même façon. Ça me faisait suer avant, mais maintenant, ça va. Je suis en forme.
As-tu quelqu’un dans ta vie?
Non. Il va peut-être arriver quelque chose, parce que j’ai plus de temps. Je vais être chez moi les fins de semaine. Mais je te dirais que je suis bien heureuse toute seule. Si l’occasion se présente, c’est sûr que j’aimerais partager ma vie avec quelqu’un, mais ce n’est pas nécessaire. Ce n’est pas de rencontrer quelqu’un qui va me rendre heureuse. J’ai appris — et ç’a été un long processus pour moi — à aller au cinéma seule, à aller au restaurant seule, et ça ne me dérange pas pantoute! Et comme je ne suis pas accompagnée, il y a plein de gens qui me parlent. Je ne suis jamais vraiment seule.
Comment va ta fille?
Ma fille, c’est mon ange. C’est elle qui était là, le 3 novembre dernier. Une chance qu’elle était là! C’est elle qui m’a sortie de la scène.
Penses-tu que tu seras grand-mère un jour?
Ben non! Ni de mon garçon ni de ma fille. Ils ont 45 et 43 ans. À moins que Hugo rencontre quelqu’un qui a déjà des enfants, mais ce n’est pas ça pour le moment, et ça ne me dérange pas. Claudie aurait aimé me faire vivre ça, mais la vie, c’est la vie! Que veux-tu qu’on fasse? Je suis bien contente d’avoir mes enfants, ils sont tellement proches de moi. Ils sont mes meilleurs amis, on a bien du fun.
Pour en savoir plus sur la maison de production de Lise Dion, 6e sens, rendez-vous à sixiemesens.ca.