L’expansionnisme russe et l’erreur de Poutine
Loïc Tassé
Que la Russie attaque ou non l’Ukraine, une des conséquences sera la même : la Russie à nouveau perçue comme une puissance expansionniste.
Le rêve de reconstruire l’ancienne URSS est un cauchemar pour les pays qui ont vécu sous le joug soviétique.
La politique extérieure de Vladimir Poutine, souvent dépeinte comme une habile diplomatie, semble cette fois-ci travailler contre les intérêts de la Russie.
Il faut bien comprendre que c’est Poutine qui a annexé la Crimée, qui a soutenu les séparatistes russes du Donbass et qui menace d’envahir l’Ukraine. L’effort d’armement de l’Ukraine et les avertissements des pays de l’OTAN ne sont que des réponses aux menaces et aux actions de Poutine. Bien plus, sans la dictature de Poutine, les problèmes militaires russes actuels n’existeraient probablement pas.
Poutine continue d’accumuler ses troupes aux frontières de l’Ukraine. Aucune autre logique que celle de l’invasion ne justifie d’y masser autant de soldats.
Il ne manque qu’un prétexte pour attaquer. Il semble trouvé : Poutine accuse les Ukrainiens de provocation, tandis qu’il laisse entendre que l’OTAN pourrait incorporer l’Ukraine, ce qui est faux, en raison entre autres de l’opposition de l’Allemagne et de la France à un tel élargissement.
- Écoutez la chronique de Loïc Tassé au micro de Benoît Dutrizac sur QUB radio:
Effondrement américain
Pour justifier leur témérité militaire, les dirigeants russes parient sur l’effondrement intérieur des États-Unis et des autres démocraties. Des études qui prévoient cet effondrement circulent depuis les années 1980 dans les hautes sphères du gouvernement russe. Elles sont alimentées par le traumatisme du propre effondrement de l’URSS, qui est projeté sur les États-Unis, mais aussi par une augmentation réelle des inégalités américaines.
D’où les avertissements répétés de Joe Biden de ne pas miser sur l’affaiblissement des États-Unis.
Par ailleurs, les dictateurs sont loin des préoccupations de leurs citoyens.
Ainsi, sans aucun débat réel en Russie sur la pertinence d’une guerre, Poutine s’apprête à lancer son armée contre l’Ukraine. Si la Russie avait eu des médias libres et une opposition digne de ce nom, il est probable que la guerre serait évitée.
Au lieu de cela, le Parlement russe, qui est à la solde de Poutine, est en train de reconnaître l’indépendance des deux régions qui forment le Donbass. Une telle reconnaissance, si elle aboutit, serait l’équivalent d’une déclaration de guerre contre l’Ukraine.
Ennemi commun
Dans tous ses savants calculs et dans ses rêves fous de reconquête, Poutine semble avoir oublié une vérité pourtant évidente : lutter contre un ennemi commun raffermit les liens entre les États.
L’ennemi commun, c’est la Russie, qu’il offre en sacrifice aux peuples de l’Europe tout entière.
Pourtant, il n’y a pas de haine des Russes, comme autrefois les communistes soviétiques pouvaient être haïs et redoutés. S’il existe une haine, c’est plutôt celle des dictateurs, et en particulier, de Poutine et de ses acolytes.
Bref, Poutine est isolé, mais il ne le comprend pas.