L’étau se resserre autour de Donald Trump
Pierre Martin
Chaque jour, le dossier accablant de l’ex-président s’alourdit, mais il semble à l’abri des conséquences et le culte qui l’entoure persiste.
Plusieurs des gestes reprochés au milliardaire semi-retraité de Mar-a-Lago sont criminels, mais la lenteur exaspérante des tribunaux américains et la perspective d’un Congrès républicain dès 2023 lui permettent d’espérer s’en tirer indemne. De plus, son emprise sur le Parti républicain est telle que sa candidature et son élection en 2024 sont loin d’être exclues.
Détournement de démocratie
La commission de la Chambre des représentants sur l’insurrection du 6 janvier était restée bien discrète, mais ses sorties récentes suggèrent qu’elle prépare un acte d’accusation étoffé contre celui qui a ouvertement encouragé ses partisans à envahir le Capitole et qui n’a rien fait pour les arrêter. L’incitation à l’insurrection est un crime et le lien est facile à faire entre le discours de Trump et ce qui l’a suivi. La commission a aussi dévoilé quelques aspects du plan concerté de Trump pour renverser les résultats de l’élection de novembre afin de s’approprier la victoire. C’est littéralement une tentative de coup d’État qui prend forme avec chaque nouvelle révélation.
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Des crimes en série
Pendant ce temps, les tribunaux de New York préparent des poursuites criminelles contre Trump, alors que des données publiquement disponibles suggèrent qu’il a commis des gestes flagrants de fraude fiscale. La récente initiative de Trump pour financer en bourse son projet d’entreprise médiatique fait aussi l’objet d’une enquête pour délits d’initiés et autres malversations financières. Il y en a tellement qu’on oublie presque la quinzaine d’allégations sérieuses d’inconduites sexuelles qui continuent de hanter Trump, ou les paiements à ses anciennes maîtresses qui ont mené son complice en prison.
Objet de culte
Et pourtant, même s’il est clair qu’un nouveau mandat présidentiel serait pour Trump l’occasion de se protéger contre les poursuites, de gracier ses complices et de se venger de ses opposants, son emprise sur le Parti républicain demeure totale.
Les républicains du Congrès sont déterminés à faire oublier ses actions du 6 janvier, même s’il n’a pas répondu à leurs appels de détresse quand leur vie était menacée. Aujourd’hui, près de la moitié des électeurs républicains sont convaincus du Grand Mensonge de Trump, qui affirme encore avoir gagné l’élection de 2020, et les élus sont pétrifiés à l’idée de subir ses foudres s’ils le contredisent. Au cours des prochains mois, l’étau va continuer à se resserrer sur Donald Trump, mais ça n’ébranlera probablement pas le culte que lui voue son parti. La survie politique de Donald Trump malgré son lourd passif pose un défi à l’explication. Il est toutefois trop facile de l’attribuer à la stupidité des électeurs américains. C’est la détérioration des normes démocratiques et la glissade du Parti républicain vers l’extrémisme qui ont rendu le trumpisme possible et même si Trump finit par tomber sous le poids des accusations portées contre lui, le mal qui afflige la démocratie américaine ne sera que partiellement soulagé.