Les sanctions actuelles contre la Russie d'une portée «assez marginale»

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La portée des sanctions économiques prise à ce jour contre la Russie est «probablement assez marginale» pour Moscou, a affirmé vendredi à l'AFP Christopher Dembik, responsable recherche et stratégie pour la Saxo Bank.

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Selon lui, Moscou avait certainement «anticipé» l'hypothèse d'un «durcissement» de ces sanctions occidentales. En revanche, il reste possible de lui «porter des coups élevés» avec de nouvelles mesures, mais leur impact pourrait être aussi «massif» sur les économies européennes.

Q: Quelle est la portée des sanctions occidentales actuelles sur l'économie russe?

R: «Elle est probablement assez marginale, pour deux raisons. Vous avez une économie qui a un niveau record de réserves de changes et ça, c'est une soupape de sécurité extrêmement importante. (...) L'autre point, c'est que vous avez eu ces dernières années, au niveau de la balance commerciale un surplus très marqué. L'économie russe n'a pas besoin, en tout cas pour les entités publiques, de recourir aux marchés financiers étrangers (...). Depuis 2014, vous avez finalement une économie qui est devenue très résiliente. La seconde raison, (...) c'est que vous avez eu une intensification très importante des relations commerciales avec la Chine, des contrats d'exportation de gaz qui ont été signés pour une durée de 25 ans. (...) Et si on regarde les réserves de la banque centrale russe, (...), il y a eu un vrai processus de diversification. (Avec) du yuan et surtout beaucoup d'or, ce qui rend l'économie russe beaucoup moins dépendante du système dollar. J'imagine parce que la Russie avait anticipé l'hypothèse d'un durcissement des sanctions».

Q: Cela rend-il l'arme des sanctions inopérante?

R: «Sur (le système bancaire) Swift, à mon avis, la portée serait limitée en raison des réserves de changes. En revanche, si demain on prend des sanctions draconiennes au niveau des hydrocarbures et des matières premières agricoles - une forme d'embargo -, on peut porter des coups extrêmement élevés. Mais il y a un manque flagrant de consensus au niveau des Européens. (...) L'impact sur les économies européennes serait également massif. Pour donner un exemple très précis, les importations de gaz naturel de Russie vers l'Allemagne, c'est à peu près 46% du besoin allemand. En 2012, on était 12 points inférieurs, la dépendance énergétique s'est accentuée. Si on réduit du jour au lendemain l'approvisionnement russe, où est-ce qu'on trouve des alternatives? Il y en a sur du long terme - typiquement, on pourra demander au Qatar, à l'Algérie (...). Mais ça prend du temps, ça nécessite des infrastructures idoines. Sur du court terme, la seule solution, c'est de demander aux Américains d'exporter davantage de gaz naturel liquéfié. Mais il n'y a pas non plus de capacités infinies».

Q: En l'état actuel, le gouvernement estime que l'économie française est «peu exposée». Partagez-vous cette analyse?

R: «À l'instant T, je serais sur la même ligne que (le ministre de l'Économie) Bruno Le Maire. Tant qu'on n'a pas la Russie qui prend des mesures de rétorsion, il n'y a pas de risque majeur. (...) Mais la Russie a des angles d'attaque (dans cette hypothèse, NDLR). Un angle, ce sont les prix élevés des matières premières. Moscou pourrait réorienter ses exportations vers l'Asie du Sud-Est, ce qu'elle a déjà commencé à faire. Jusque-là les contrats avec l'Europe ont été honorés, mais, hors contrat, ils ont récemment vendu au plus offrant. Et il s'agissait des pays d'Asie du Sud-Est».