Les psychologues s’inquiètent pour la génération Z par peur qu'elle «manque des expériences»
Claudie Arseneault
Selon de nouveaux rapports universitaires, les jeunes de 11 à 25 ans n’auraient pas assez de FOMO, le fear of missing out, ou la peur de rater quelque chose, alarmant les psychothérapeutes. L’anxiété augmente chez les jeunes décrits comme sensibles avec une attitude trop prudente, ce qui risquerait de leur faire manquer des expériences de vie.
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Ce comportement identifié par les thérapeutes est relativement récent chez la «génération sensible» d’adolescents et de jeunes adultes en proie à l’anxiété sociale, ainsi décrite par la communauté d’experts, qui reste trop prudente face à la prise de risques.
Selon certains psychologues, plusieurs jeunes de la génération Z choisissent de rester dans leur zone de confort et de limiter leurs interactions à un petit réseau d’amis qui partageant les mêmes idéaux et valeurs.
En effet, ils sont très actifs sur les réseaux sociaux, ils ont des habitudes de vie saine et une consommation d’alcool modérée.
La génération Z pourrait ainsi passer à côté de certaines expériences de vie, puisqu’une grande partie de leurs activités sociales demeurent virtuelles, disent ces experts. Sans oublier qu’ils pourront développer de l’anxiété sociale lors des interactions hors ligne.
Une étude universitaire publiée dans le British Journal of Sociology a d’ailleurs déclaré sur le sujet que la génération Z affirme boire moins d’alcool que leurs parents parce qu’elle se sent sous pression pour réussir ses études, et plus soucieuse de sa santé, ne voulant pas perdre le contrôle.
Natalie Phillips, une psychothérapeute travaillant avec des enfants et des jeunes âgés de 11 à 25 ans, a contribué à cette étude. Elle a ajouté: «J'ai le sentiment que [cette génération] manque peut-être de faire des erreurs et le sentiment d'être jeune. Je pense qu'ils sont assez vieux avant leur temps.»
Mme Philipps a constaté une augmentation disproportionnée des références à l'anxiété sociale, l'anxiété professionnelle, la confiance en soi générale et les problèmes relationnels lorsqu'ils font face à la réalité d'être dans un bureau, dans un bar ou de se rendre à un rendez-vous.
Elle a ajouté que de nombreux jeunes avec lesquels elle travaille ont des «zones de confort restreintes» parce qu'ils travaillent à domicile ou interagissent plus souvent avec des collègues en ligne, et qu'ils ont peu d'amis qui partagent le même état d'esprit.
Cette tendance a été exacerbée par la pandémie, selon la psychothérapeute, qui a poussé davantage de jeunes personnes à travailler à distance et à moins socialiser en personne.
Des jeunes contrôlés et abstinents
L’étude en question, intitulée «Plus d'options... Moins de temps dans la hustle culture de la “génération conscientisée”: individualisation et déclin de la consommation d'alcool chez les jeunes adultes du XXIe siècle» a révélé que 70% des interrogés sentent plus de pression que leurs parents.
En effet, ces jeunes affirmaient se concentrer à réussir sur le plan scolaire et avoir «une bonne carrière», en leur laissant moins de temps pour socialiser et faire la fête.
Pour cette étude, les chercheurs des universités de Kent et de Leeds ont discuté en 2020 avec 517 Britanniques âgées de 18 à 25 ans se décrivant comme des buveurs modérés ou sobres.
Plusieurs de ce groupe ont déclaré avoir réduit leur consommation d’alcool en raison de la hausse du coût, de la dette universitaire et de la pression mise sur eux pour réussir dans leur milieu, et au-delà.
Jane Darougar, psychothérapeute à l'école d'art et de design Central Saint Martins, a reconnu être surprise de découvrir, dans cette étude, combien d'étudiants ont déclaré qu'ils étaient abstinents. Elle a attribué ce fait à leur grande prise de conscience des effets néfastes de l'alcool sur leur santé mentale.
«Je me rappelle avant, quand j’étais jeune, [...] on prenait un verre avant d’aller faire quelque chose qui semblait un peu épeurant ou angoissant. Je pense que c’est fini, les gens ne voient plus ça comme une manière constructive ou sensée de gérer ses émotions», a précisé Darougar.