Les personnes handicapées sont les grandes oubliées de la crise climatique
Andrea Lubeck
En matière de crise climatique, les gouvernements à travers le monde ignorent systématiquement les personnes en situation de handicap. Ces dernières sont pourtant particulièrement à risque face aux conséquences de conditions météorologiques extrêmes, révèle une étude.
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Peu de plans d’adaptation aux effets des changements climatiques tiennent compte des besoins des personnes en situation de handicap et aucun programme de réduction des GES ne les mentionne, selon une analyse de l’Université McGill et de l’International Disability Alliance.
«J’ai été très déçu par nos conclusions», a indiqué Sébastien Jodoin, professeur à l’Université McGill et coauteur du rapport, en entrevue avec le Guardian. «Les pays n’ont pas réfléchi à la manière dont les personnes handicapées peuvent être incluses dans les plans climatiques. Elles ont été systématiquement ignorées.»
Les personnes en situation de handicap sont parmi «les plus marginalisées» et les plus vulnérables aux conséquences des changements climatiques, en partie en raison de la nature de leur handicap, mais aussi à cause des désavantages sociaux auxquels elles font face, souligne le coauteur.
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Il donne d’ailleurs l’exemple de l’ouragan Katrina, qui a frappé la Louisiane en 2005. Des personnes en fauteuil roulant se sont alors retrouvées bloquées, d’une part parce qu’elles ne pouvaient utiliser les véhicules adaptés, mais aussi parce qu’il n’y avait aucun plan d’évacuation pour elles. Les mêmes problèmes se sont présentés lors de l’ouragan Sandy, en 2012.
Seulement une poignée de pays en font mention
Pour en arriver à ces conclusions, les chercheurs ont écumé les engagements climatiques que les 192 pays doivent soumettre en vertu de l’Accord de Paris de 2015. Ce dernier exige d’ailleurs que les personnes en situation de handicap soient prises en compte dans l’élaboration de ces politiques, ce que, vraisemblablement, la majorité des États ont ignoré jusqu’à présent.
En effet, les chercheurs ont constaté que seuls 35 des 192 États mentionnent les personnes handicapées dans leurs politiques détaillées, alors que 45 y font référence dans leurs programmes nationaux d’adaptation aux changements climatiques.
Mais lorsque les personnes en situation de handicap sont mentionnées, c’est fait de «manière superficielle, sans inclure de mécanismes significatifs pour [les consulter] ou garantir le respect de leurs droits», peut-on lire dans l’étude.
Sébastien Jodoin plaide pour une plus grande sensibilisation et une meilleure compréhension des liens entre le handicap et la crise climatique, qui sont actuellement mal compris.
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«J’ai parlé à des experts du climat et leur ai dit: “Je travaille sur le handicap et le changement climatique”, et ils m'ont regardé en disant: “Qu’est-ce que cela signifie?”» déplore-t-il.
C’est le même genre de réaction que les gens avaient il y a 10 ans lorsqu’on travaillait à établir un lien entre le genre et les changements climatiques, a-t-il ajouté.