L’endettement historique du Canada, l’héritage de Trudeau?


Emmanuelle Latraverse
À la lumière de son dernier budget, il serait tentant de réduire l’héritage de Justin Trudeau à l’endettement historique du Canada.
En sept ans, il aura accumulé des déficits plus imposants que tous ses prédécesseurs combinés. La carte de crédit fait tellement partie de ses habitudes que son gouvernement n’a aucune gêne à reporter encore l’horizon d’un retour à l’équilibre. Pire, il a même abandonné le petit ancrage qui lui restait, celui de réduire le poids de la dette d’année en année.
La ministre des Finances Chrystia Freeland a beau parler d’investissements, cette dette est avant tout politique. Elle était déjà une arme redoutable pour contraindre les ambitions des conservateurs.
Voilà que le déficit libéral est maintenant en train de réécrire en sourdine la Constitution du Canada.
La bougie d’allumage
La tentation était toujours là, mais l’arrivée d’une progressiste, activiste, comme Chrystia Freeland à la tête du ministère des Finances a permis de libérer les grandes ambitions de Justin Trudeau.
Fini les réserves à l’égard d’un interventionnisme débridé de l’État. Les taux d’intérêt au plancher, il fallait en profiter, aller où les gouvernements fédéraux précédents n’avaient jamais osé.
Ce shangrila libéral, c’est la plus grande expansion de l’État providence fédéral depuis la mise en œuvre du Régime de pensions du Canada par le gouvernement Pearson en 1966.
Au terme de l’exercice, le Canada aura non seulement un régime de garderies subventionnées, mais aussi un programme d’assurance dentaire. D’ici cinq ans, ce seront 13 G$ par an qui seront monopolisés par ces programmes sociaux.
Or, les garderies, les soins dentaires, ce sont là des champs de compétences provinciales.
C’est ainsi que petit à petit, le Canada se centralise, les règles du jeu qui encadrent la fédération sont sacrifiées sur l’autel de la grande redistribution de richesse.
Peu importe le prochain gouvernement, il sera bien difficile, voire impossible de reculer et de démanteler ces programmes.
Certes, Québec résiste, mais pour combien de temps encore? L’effondrement du front commun en santé n’a-t-il pas déjà démontré la fragilité de l’arrangement ? Et qu’arrivera-t-il le jour où le gouffre sera infranchissable?
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Or, les conséquences de ce détournement idéologique libéral dépassent l’unité nationale.
Pendant qu’Ottawa s’occupe de ce qui ne le regarde pas, il néglige ses responsabilités premières.
On n’a qu’à penser à la Défense nationale. Le Canada gratte des fonds de tiroirs pour armer l’Ukraine, l’état de sous-financement des troupes canadiennes s’amplifie, les Chinois envoient des ballons dans l’Arctique, les Russes des sous-marins. Peu importe, pas un sou dans le budget.
On en a déjà fait assez, a plaidé la ministre Chrystia Freeland, en évoquant l’achat des F-35 d’ici 2029, et la modernisation des radars du NORAD d’ici 2028.
Vraiment? Une chance que le secrétaire général de l’OTAN et le président Biden doivent rester polis.
Parlant des 28,44 G$ que coûteront les garderies et le programme d’assurance dentaire d’ici 2025-2026, imaginez le levier pour attirer des capitaux privés et financer une vraie transition énergétique au pays?
Mais non, il est plus facile d’être féministe, progressiste, plus facile d’acheter l’appui du NPD et celui des électeurs que d’oser s’attaquer aux problèmes structurels mais peu sexy de l’économie canadienne.