Le temps est venu de faire les choses différemment
Louis Jean
Les temps changent à Montréal. Et pas à peu près! L’embauche de Martin St-Louis comme entraîneur-chef par intérim des Canadiens de Montréal est extrêmement significative. C'est une cassure importante dans la façon que cette équipe opère depuis plusieurs décennies.
La tradition, le décorum et le conservatisme ont longtemps été certaines des plus grandes qualités de l’organisation, mais le temps est venu de faire les choses différemment. Très peu, voire aucune autre organisation n’aurait eu le courage de faire une telle embauche.
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C’est peu orthodoxe comme approche. Embaucher un «coach» qui n’a jamais dirigé dans les rangs professionnels, c’est presque du jamais vu. De le faire dans un marché aussi exigeant que Montréal relève quasiment d’un scénario de film... un peu trop poussé. Pourtant, c’est la réalité. Je peux vous dire que la fraternité des entraîneurs est sous le choc et surveille les choses de près.
En même temps, je me demande: qu’est-ce qu’on a à perdre de l’essayer? La saison est perdue de toute façon. Lors de son point de presse de jeudi matin, St-Louis a dit toutes les bonnes choses. Ses réponses n’étaient pas scriptées ou préparées d’avance. Le Lavallois était lui-même, authentique et vrai. Il a parlé du coeur. Il avait une présence impressionnante. Il expliqué qu’il se préparait depuis 10 ans pour ce défi. Surtout, il n’a pas reculé devant une tâche qui ferait peur à bien des entraîneurs d’expérience. Avec son regard perçant et la détermination qu’il a démontrée tout au long de sa carrière, le membre du Temple de la Renommée s’est dit «go», fonce!
«Montre-leur», comme lui disait toujours sa mère.
Cette embauche est une indication de ce qui viendra pour le Bleu-Blanc-Rouge. Dorénavant, au diable les conventions, les anciennes façons de faire. La société change. Le hockey évolue. Cette nomination démontre que Kent Hughes et Jeff Gorton entendent prendre une approche avant-gardiste pour relancer l'organisation la plus décorée dans la LNH.
«On veut s’entourer de champions» a précisé le DG. C’est assez clair. On veut redonner au Tricolore ses lettres de noblesse. St-Louis représente la culture qu’on veut établir. Un travaillant, un compétiteur, un joueur qui faisait preuve de persévérance. Comme coach, déjà, on le voit. Sa confiance était palpable lors de sa mêlée de presse. L’équipe en a besoin actuellement. Elle est fragile. Il va communiquer ses attentes avec ses joueurs, mais aussi sera là pour les écouter et leur donner des outils. Il va enseigner et développer les forces de ses hommes tout en exigeant l’imputabilité. Sa principale qualité comme joueur était sa force de caractère à toute épreuve. Il va pousser son équipe en ce sens aussi.
En fait, St-Louis coche toutes les cases qu’on voudrait d’un entraîneur, sauf une. Et c’en est une importante: l’expérience. Comment l’ancien gagnant du trophée Hart va-t-il se comporter derrière le banc? Sera-t-il en mesure de s’ajuster? Serait-il en mesure de faire ressortir le meilleur de son effectif? On ne le sait pas. Il avoue lui-même ne pas le savoir. Mais la beauté de la situation actuelle à Montréal est qu’il aura la chance de voir s’il est fait pour diriger dans la LNH. On ne le jugera pas par les résultats, mais par l’effort et la réponse de son club. Le message qu’il envoie à ses joueurs sera celui qui a guidé sa carrière de joueur: «prouvez et méritez» votre poste.
L’arrivée de St-Louis démontre aussi un autre point essentiel et important pour la relance: le pouvoir de persuasion de Hughes. L’une de ses forces comme agent était de trouver des solutions aux problèmes. Sa créativité et sa capacité à dénouer les impasses seront extrêmement importants pour redonner vie aux Canadiens. Il ne faut pas non plus sous-estimer l’effet domino que pourrait avoir l’annonce de mercredi. Montréal a toujours eu de la difficulté à recruter des joueurs autonomes. Si les choses se déroulent bien, est-ce que d’autres anciens joueurs voudront emboîter le pas et venir occuper un rôle dans la reprise du Canadien? Est-ce qu’il serait utopique de penser que St-Louis pourrait même aider à recruter des joueurs des universités américaines ou des joueurs autonomes? Il est trop tôt pour le dire.
Donnons la chance à St-Louis de défaire ses bagages et de s’installer à Montréal. Mais contrairement à ce que plusieurs avancent, je pense que le hockey est mûr pour ce type d’embauche. Et surtout, Martin St-Louis risque d'être exactement ce dont le CH a besoin actuellement. L’intérêt pour le Tricolore, d’ici la fin de saison, vient soudainement de renaître.