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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Le Rocket et Flower, personne d'autre

Avec Guy sur la rue Broadway dans le quartier Time Square à New York, pas long- temps après sa signature avec les Rangers.
Avec Guy sur la rue Broadway dans le quartier Time Square à New York, pas long- temps après sa signature avec les Rangers. Photo d'archives
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Photo portrait de Réjean Tremblay

Réjean Tremblay

2022-04-22T15:14:25Z
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Les chiffres ne peuvent pas toujours mentir. Le Rocket portait le 9. Flower le 10. Ils se suivaient, comme soudés.

• À lire aussi: Le légendaire Guy Lafleur s’éteint à 70 ans

Maurice fut la passion d’un peuple opprimé. Guy Lafleur fut l’amour de ce peuple libéré. Les années 1950 et les années 1970. Avec René Lévesque faisant le passage. Dans sa toute dernière longue entrevue pour un documentaire en août dernier, Lafleur n’a plus été capable de parler. C’était la toute dernière question. Comment voulait-il que les gens se souviennent de lui? 

Il s’est étranglé dans de longs sanglots avant de soupirer après des minutes d’éternité : «Que j’aurai tout donné. Tout ce que je pouvais donner.» 

Le peuple le sentait. Le peuple l’aimait. Maurice Richard était vénéré. Jean Béliveau était admiré. Guy était aimé. Tout juste aimé. Dans le vrai sens du mot. Dans toute sa richesse. Il était aimé comme il était. Imparfait, parfois colérique, excessif dans ses passions. Mais aussi père fier et debout pour ses enfants même quand tout allait mal. 

Et l’idole aimait ceux qui l’aimaient. Ti-Guy aimait le monde. Les riches, les grands, les ordinaires, les humbles, tout le monde. 

Même malade, il répondait aux gens. Et jusqu’à la fin, il a signé ses autographes avec une écriture appliquée. Pour que le jeune puisse la montrer dans la cour d’école sans se faire dire que c’était une fausse signature. 

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Photo d'archives
Photo d'archives

MON PREMIER GRAND REPORTAGE

Guy Lafleur, je l’ai aimé. Comme j’ai aimé peu de personnes dans ma vie. Je ne le fréquentais pas. Il était une superstar et j’étais journaliste. Mais je lui parlais souvent. Il connaissait mes problèmes, je connaissais les siens. 

Quand je me suis lancé dans l’écri- ture dramatique, il m’a parfois donné des indices qui me permettaient d’al- ler plus loin dans l’âme des person- nages. La passion tourmentée et le désir fou de gagner de Marc Gagnon joué par Marc Messier lui doivent beaucoup. 

Quand j’ai coproduit un long métrage documentaire sur la santé mentale réalisé par un autre grand passionné, Jean-Claude Lord, Lafleur a été d’une générosité sans nom. Il était profondément blessé dans sa personne et sa fierté, mais il a fait face à la caméra. 

Guy LafleurGuy Lafleur | 1951-2022
30 mars 1991 - Ovation pour Guy Lafleur lors de son dernier match a vie au Forum dans l'uniforme des Nordiques. Les archives / Le Journal de Montreal
Guy Lafleur durant ses années avec Le Canadien Bruce Bennett Studios via Getty Images
Guy Lafleur André Toto Gingras LE JOURNAL DE MONTRÉAL/AGENCE QMI
Le club de hockey Canadien présente les récipiendaires des prix d’excellence et du mérite Guy-Lafleur pour 2017-2018 CHANTAL POIRIER / LE JOURNAL DE MONTRÉAL
Guy Lafleur lors du dernier match de sa tournée d'adieu au Centre Bell, le dimanche 5 décembre 2010. Sébastien St-Jean / 24Heures / Agence QMI
11 septembre 1971 - À la veille de son premier camp d'entrainement avec le Canadien de Montréal, pour la première fois Guy Lafleur en profite pour donner quelques coups de patin sur la patinoire du Forum. Sur la photo il est en compagnie de Jean Béliveau. Les archives / Le Journal de Montreal
Photo dédicacée de Guy Lafleur dans son uniforme des Remparts de Québec Courtoisie
Guy Lafleur dans le cadre de la soirée du retrait du numéro 4 de Guy Lafleur au Centre Slush Puppie de Gatineau le mercredi 29 septembre 2021 MARTIN CHEVALIER / LE JOURNAL DE MONTRÉAL
Guy Lafleur et sa bannière dans le cadre de la soirée du retrait du numéro 4 de Guy Lafleur au Centre Slush Puppie de Gatineau le mercredi 29 septembre 2021 MARTIN CHEVALIER / LE JOURNAL DE MONTRÉAL
Dernier match de Guy Lafleur avec les Nordiques de Québec, à Montréal le 30 mars 1991 Les archives / Le Journal de Montreal
Sculpture de Guy Lafleur en bronze Les archives / Le Journal de Montreal
Guy Lafleur, Pee-Wee Collection Tournoi Pee-Wee de Québec, Fonds Photo Moderne
Guy Lafleur, Pee-Wee Collection Tournoi Pee-Wee de Québec, Fonds Photo Moderne
Guy Lafleur et les trophée Art Ross, Conn Smythe et Lester B. Pearson, Forum de Montréal, 1976 Denis Brodeur / NHLI via Getty Images
Guy Lafleur, alors membre de Team Canada, signe des autographes durant un entraînement pour la Coupe Canada, Montréal 1976 Denis Brodeur / NHLI via Getty Images
Guy Lafleur et le gardien de but Murray Bannerman #30 des Blackhawks de Chicago, Forum de Montréal 1980 Denis Brodeur / NHLI via Getty Images
Guy Lafleur et le gardien Mike Palmateer des Maple Leafs de Toronto Dick Darrell / Toronto Star via Getty Images
7 mars 1975 - Guy Lafleur devient le premier joueur de toute l'histoire du club Canadiens à atteindre les 100 points en une seule saison Lors d'une victoire de 8 à 4 contre les Capitals de Washington Les archives / Le Journal de Montreal
Guy Lafleur sur le banc durant un match (3) de finale contre les Bruins de Boston, Boston Gardens, 1977 Dick Raphael / Sports Illustrated via Getty Images
Annonce de la première retraite de Guy Lafleur Les Archives / Le Journal de Montréal
La LHJMQ retire le numéro 4 de Guy Lafleur au Centre Videotron de Québec, jeudi le 28 octobre 2021 STEVENS LEBLANC / JOURNAL DE QUÉBEC / AGENCE QMI
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Flower m’a donné mon premier grand reportage dans le sport. Lui, la superstar ultime, le plus grand joueur des années 1970, il m’a accueilli dans le vestiaire du Canadien. Les Glorieux jouaient à Atlanta, mais Lafleur était blessé à un doigt. 

Je m’étais pointé au Forum avec mes patins, le relationniste Camil Desroches a cru que j’étais un joueur venu d’Halifax et on m’a ouvert tout simplement la porte du vestiaire. Lafleur m’a prêté un bâton de Steve Shutt, et m’a montré plein de trucs sur sa glace. 

J’ai même déjoué Wayne Thomas qui s’entraînait avec Lafleur.

Une semaine plus tard, j’entreprenais ma carrière sur la couverture du Canadien. Juste à temps pour couvrir le premier 50e but de Ti-Guy. Contre Denis Herron au Forum. Il le fera cinq autres fois.  

  • Réjean Tremblay était sur les ondes de QUB radio avec Richard Martineau et Benoit Dutrizac pour revenir sur la carrière de Guy Lafleur :

CONTRAT À NEW YORK

J’ai toujours été là dans les grands moments de Lafleur. Quand il est revenu au jeu, j’ai travaillé avec Tom Lapointe sur le scoop. 

Et quand il a signé son contrat avec les Rangers, lui et son agent et ami, Yves Tremblay, sont venus me rejoindre dans un restaurant italien au coin de Saint-Mathieu et De Mai- sonneuve en descendant de l’avion. 

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Je m’étais enfermé dans le bureau du propriétaire en fin de soirée pour écrire et envoyer mon texte. Flower était tellement heureux. 

Vous le savez, vous l’avez lu, j’ai accompagné Lafleur comme journaliste pendant sa longue maladie. Quand quelque chose d’important se passait, il demandait à son fils Martin : 

«Appelle Réjean, il va donner l’heure juste.» 

J’écrivais un texte en protégeant le père et le fils contre la jalousie de la compétition et en camouflant ma source. Il n’y avait pas d’entente, c’était juste comme ça. 

Après une grande entrevue pour un documentaire, Guy a accepté de se faire photographier avec les membres de l’équipe et moi. Cette photo, tout sourire, le représente bien. Malgré la fatigue du tournage et ébranlé par la chimio, il a tout donné jusqu’au bout.
Après une grande entrevue pour un documentaire, Guy a accepté de se faire photographier avec les membres de l’équipe et moi. Cette photo, tout sourire, le représente bien. Malgré la fatigue du tournage et ébranlé par la chimio, il a tout donné jusqu’au bout. Photo courtoisie

FLOWER EST PARTI

Voilà, Guy Lafleur est parti. Comme le Rocket. Comme son idole et mentor Jean Béliveau. 

La vie et les années m’ont permis de partager de beaux moments avec les trois.

Dans le temps des Fêtes, j’allais chez Maurice, rue Péloquin, et je lui demandais de m’inspirer pour un conte de Noël. Il riait... et son rire m’inspirait. 

Avec Béliveau, c’était différent. J’ai passé de longs moments à discuter avec lui des romans de la collection Marabout dont il était le porte-parole au Québec. Les Trois Mousquetaires de Dumas, Guerre et Paix de Léon Tolstoï, Crime et Châtiment de Dostoïevski, le grand Jean les avait tous lus. 

Mais le grand Jean discourait des passions des héros de ses romans. Le Rocket et Flower vivaient ces passions. 

À fleur de peau. 

Adieu Ti-Guy. On va toujours t’aimer. 


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