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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Le racisme systémique anti-autochtone persiste

Photo d'archives
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Photo portrait de Josée Legault

Josée Legault

2021-09-29T09:00:00Z
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Pour l’unique raison qu’elle était une Attikamek, il y a un an, Joyce Echaquan, une jeune femme de 37 ans et mère de sept enfants, est morte dans un hôpital du Québec sous un déluge d’insultes racistes. 

On le sait parce qu’elle s’est filmée, désespérée, en pleine agonie. Un an plus tard, on commémore cette tragédie. 

Jeudi, pour rappeler l’horrible sort réservé à des milliers d’enfants autochtones, disparus ou survivants d’abjects pensionnats, le Canada marquera aussi la première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.

Dans ce pays, l’héritage empoisonné d’un racisme profond envers les Premières Nations – incarné brutalement par l’infâme Loi fédérale sur les Indiens – nous hante toujours. Il nous appelle à poser des gestes concrets, étatiques et individuels, de reconnaissance, réparation et réconciliation.

Au Québec, le gouvernement Legault a bougé. Après la mort de Joyce Echaquan, le premier ministre a nommé Ian Lafrenière ministre responsable des Affaires autochtones. Un homme d’action et il faut le dire, d’écoute. 

Lui-même a nommé l’ex-journaliste Anne Panasuk au poste de conseillère pour le soutien aux familles d’enfants autochtones disparus ou décédés. Experte en la matière, elle est aussi l’auteure d’un livre fouillé et essentiel : Aussat : à la recherche des enfants disparus.

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Prendre conscience

Dans le réseau de la santé, le ministre Lafrenière a ordonné une formation obligatoire de sécurisation culturelle sur les réalités autochtones. Or, une infime partie seulement du personnel l’aurait suivie. D’où la demande du ministre de la Santé, Christian Dubé, d’accélérer sérieusement la cadence. 

Les Québécois, comme les autres Canadiens, prennent de plus en plus conscience des immenses dommages causés aux Premières Nations au fil des ans et des décennies.  

En cela, la volonté du gouvernement Legault d’agir n’est pas en cause. Ce qui pose problème est son refus néanmoins de reconnaître l’existence même d’un racisme systémique anti-autochtone.

Sur le plan politique, on comprend son désir de ne pas soumettre les Québécois, souvent accusés à tort d’être des racistes indécrottables, à un énième « procès » collectif.

Ce que l’on comprend moins est son refus d’accepter qu’en matière de racisme systémique, celui exercé au Canada contre les Autochtones, amplement documenté, est véridique. 

Le Québec n’est pas une île

Le Québec serait-il alors le seul État au pays à en avoir été exempté ? Bien évidemment, non. Jusqu’à nouvel ordre, n’étant pas une île, le Québec, y compris dans les pensionnats, y a aussi participé. 

Qu’au fil des dernières décennies des gouvernements québécois aient aussi adopté des politiques plus progressistes envers les Premières Nations est à saluer. C’est certain.

Elles n’empêchent pas toutefois la persistance d’un racisme systémique anti-autochtone dans nos institutions, tout comme pour celles du reste du pays. En 2020, au Québec, Joyce Echaquan en est morte.  

Dans nos vies comme dans celles des peuples, il existe en effet des mots qui blessent, détruisent et enchaînent. Mais il y a aussi des mots qui apaisent, réparent et libèrent.

Des mots qui libèrent par leur reconnaissance du réel et la volonté qu’ils traduisent de faire mieux.  

Pour avancer ensemble, accepter de dire la réalité du « racisme systémique » au Canada, dont le Québec fait partie, ne nous serait-il pas tout aussi libérateur ?

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