Le Québec incapable d’atteindre ses objectifs de réduction de déchets
Agence QMI
- Les Québécois produiraient 724 kg de déchets par année.
- L'objectif de réduire ce poids à 525 kg par personne est un échef.
- Vraisemblablement, cet objectif ne sera pas atteint avant 2041.
Le Québec doit opérer un changement de cap majeur s’il veut enfin parvenir à réduire la production de déchets de ses citoyens et éviter l’aménagement de nouveaux dépotoirs, a conclu une commission du Bureau d’audience publique en environnement (BAPE) dans un rapport dévoilé mardi.
Selon les évaluations du BAPE, chaque citoyen du Québec produisait, en moyenne, 724 kg de déchets qui ont dû être éliminés en 2019. Ce faisant, tout porte à croire que l’objectif du gouvernement de ramener ce total à 525 kg par personne sera un échec.
Pire encore, le ministère de l’Environnement lui-même reconnaît que, selon un scénario «réaliste», cet objectif ne sera pas atteint avant 2041, tandis que la majorité des dépotoirs existants seront remplis d’ici là. «Il apparaît donc évident que de nouveaux lieux d’élimination ou des agrandissements de lieux existants devront être autorisés au Québec au cours des 20 prochaines années», a noté le BAPE.
Appuyer sur l’accélérateur
Pour expliquer ce problème, le BAPE pointe du doigt la stratégie concentrée sur le recyclage du gouvernement, qui s’avère insuffisante.
Pour faire changer véritablement les choses, l’organisation recommande à Québec d’imposer de nombreuses nouvelles politiques, parmi lesquelles l’interdiction de la mise en vente de produits à usage unique, des règlements pour lutter contre l’obsolescence programmée, l’étiquetage des impacts environnementaux des produits et la mise en place d’incitatifs financiers pour favoriser la réparation et le réemploi.
Mais au-delà des mesures coercitives, des réglementations et des incitatifs financiers, le gouvernement devra aussi trouver le moyen de «créer un sentiment de responsabilité tant individuelle que collective» vis-à-vis de ce problème.
«La société d’État devrait également poursuivre le recentrage de ses messages, non plus sur le bon geste de recyclage à poser, mais sur la consommation responsable», a fait valoir le BAPE, en soulignant que cela «n’exclut en rien la mise en place de mesures contraignantes et même coercitives pour réguler les actions.»
L’organisme RECYQ-QUÉBEC, de son côté, devrait être doté de plus de pouvoir pour mener à bien sa mission. «RECYC-QUÉBEC devrait avoir la responsabilité d’effectuer le suivi, la compilation, l’analyse et la diffusion annuelle de l’ensemble des données relatives à la gestion des matières résiduelles, incluant l’élimination», a notamment proposé le BAPE.
Défensive
Le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charrette, a promis de «prendre au sérieux» les conclusions du BAPE.
M. Charrette ne s’est pas prononcé sur l’incapacité d’atteindre l’objectif de réduction de la production des déchets, mais a fait valoir que son gouvernement travaille sur diverses mesures, dont l’élargissement du programme de consigne, la récupération des matières organiques et l’assujettissement de plusieurs produits au principe de la responsabilité élargie des producteurs.
L’organisme environnemental Équiterre juge pour sa part que le BAPE a mis le doigt sur le véritable problème, soit le principe d’économie linéaire («extraire, transformer, consommer puis jeter») décrié dans le rapport.
«Le déchet le plus facile à gérer, c’est celui qu’on ne produit pas et le BAPE le souligne à gros trait. Il est dit clairement qu’au Québec, si on poursuit dans la voie actuelle, on fonce dans un mur. Il y a une limite à essayer d'enfouir nos problèmes. On doit absolument changer de stratégie et miser d’abord et avant tout sur la réduction à la source et le réemploi», a fait valoir Amélie Côté, analyste en réduction à la source chez Équiterre.