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Le futur marchand de vitesse du CH?

Rob Rasmussen / Université Quinnipiac
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Louis-André Larivière

2022-03-31T12:37:12Z
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Champions de l’Association Big 10 de la NCAA, Thomas Bordeleau et ses frères d’armes de l’Université du Michigan ont confirmé leur place au prestigieux Frozen Four en domptant les Bobcats de l’Université Quinnipiac 7-4, dimanche. 

Après une récolte de deux points en finale d’association, le talentueux espoir des Sharks de San Jose a ajouté une contribution de trois points, un but et deux passes décisives, dans ce duel dominical sans lendemain dont l’enjeu était un billet vers Boston aussi difficile à dénicher qu’un ticket d’or dans une Wonka Bar

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Les Wolverines ont ainsi accédé au carré d’as de la NCAA, où ils affronteront les Pioneers de l’Université de Denver, qui s’étaient également vus attribuer le statut de no 1 dans leur section.

Ty Smilanic : vitesse et talent     

En finale régionale, Bordeleau affrontait un vieux complice dans le camp ennemi, soit l’espoir des Canadiens de Montréal Ty Smilanic, acquis à la période limite des échanges avec un choix de premier tour dans la transaction qui a envoyé le défenseur Ben Chiarot chez les Panthers de la Floride.

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Adolescents, les deux athlètes ont fait connaissance lors de leur passage avec le programme national de développement américain, entre 2018 et 2020. À leur première année ensemble chez les moins de 17 ans, le hockeyeur originaire du Colorado a conclu en tête des pointeurs. 

Aujourd’hui, il a beau être le deuxième plus jeune de l’effectif des Bobcats, il a conclu parmi leurs trois meilleurs buteurs (13) un an après avoir été en lice pour le titre de recrue par excellence de l’Association ECAC.

À écouter Bordeleau, dont le père a été repêché par le Tricolore en 1993 avant de jouer sous les ordres du grand-père avec le club-école de Fredericton, le CH a mis la main sur un prometteur jeune marchand de vitesse.

«Ce que tout hockeyeur doit avoir pour jouer à un haut niveau, c’est de la vitesse. En ce sens, tu n’y penses même pas ("no brainer"). C’est sa force depuis un jeune âge, a raconté Bordeleau dans un entretien récent avec le TVASports.ca depuis une chambre d’hôtel du Midwest américain.

«Les partisans peuvent s’attendre à un joueur très rapide qui est aussi un très bon tireur. Il n’a pas peur de lancer d’un peu partout. Quand je jouais avec lui, nous étions sur la même attaque à cinq. Il déployait son tir sur réception. Il aime lancer et marquer des buts.»

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Une année, Bordeleau se souvient d’un tournoi des espoirs en marge du repêchage. Smilanic s’est présenté malgré une blessure.

«Il est compétitif, fait-il savoir. Il avait un poignet ou une main cassée et il a joué avec un plâtre. Les thérapeutes avaient coupé son gant de sorte que son plâtre puisse tenir son bâton. Il ne pouvait pas l’enlever de sa main... et je crois qu’il a marqué au moins un but. Il avait disputé un bon match.»

Période des échanges angoissante pour certains espoirs     

Lorsque l’annonce de la transaction est tombée, plusieurs joueurs de Wolverines issus du programme américain étaient étonnés qu’il figure dans la transaction.

«Je lui ai texté "bienvenue à la maison" et de me dire s’il a besoin que je lui conseille des endroits où aller manger. C’est le fun de voir des gars avec qui j’ai joué aboutir à Montréal.»

Dans la meute des Wolverines, la dernière période annuelle des échanges a ajouté une pression supplémentaire pour certains qui se demandaient s’ils pouvaient être marchandés, car des rumeurs impliquaient des clubs qui détiennent leurs droits. 

Par exemple, le coéquipier de Bordeleau, Matthew Samoskevich, a été repêché par les Panthers au premier tour de l’encan de 2021, un an après la cuvée de Smilanic, et il aurait pu être transigé en retour d’un joueur d’impact, si telle était l’étiquette de prix.

«Ça nous donne une prise de conscience. C’est comme : "Oh! Ça peut arriver à n’importe qui". Dans le cas de Ty, il a toujours bien géré les situations (angoissantes).» 

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Cole Caufield et le chandail de hockey     

Bordeleau a passé la saison au Michigan, mais il avoue ne pas être indifférent face à ce qui se passe au Québec, la revigoration du CH, et cela lui donne parfois le mal du pays. 

En revanche, il se réjouit que son bon ami Cole Caufield, également un produit du programme national américain, s’éclate depuis le mois de février.

«J’en parle avec le sourire, contrairement au début de l’année (lorsqu’il se cherchait). Je suis tellement content pour lui.

«Je connais personnellement Martin St-Louis et ce sont deux personnalités qui s’accordent. Ils sont fouettés par le hockey. C’est vraiment un bon mariage avec Cole. Je lui parle souvent.» 

Bordeleau raconte qu’une dizaine de camarades et lui ont récemment reçu un chandail de hockey à leur effigie. Caufield l’a aperçu sur les réseaux sociaux et il a supplié Bordeleau de lui en poster un. 

Ce service pourrait bien lui coûter un juteux steak de deux pouces dans un restaurant huppé de la métropole!

«J’ai vu combien ç’a coûté avec les frais d’expédition. Quand je vais revenir à Montréal... disons que ce n’est pas donné!»

Un entraînement avec la famille St-Louis     

Grand responsable de la relance de Caufield, St-Louis connait Sébastien Bordeleau depuis leur jeunesse dans le hockey mineur, aux dires du joueur de 20 ans, d’autant plus qu’ils se sont momentanément croisés pendant leurs carrières respectives dans la LNH. 

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Lorsque le fils du Lavallois, Ryan, lorgnait le programme de développement américain - où le fils cadet de Kent Hughes a aussi évolué - il a demandé à Sébastien Bordeleau de l’encadrer sur la glace le temps d’un entraînement.

«Martin a demandé à mon père de mener un entraînement avec ses garçons. J’ai commencé à patiner avec eux, Martin et mon père. Ce qui est drôle, c’est que mon père dirigeait ses gars et Martin me "coachait" moi! 

«C’était comme un échange de famille, plaisante-t-il. C’est comme ça qu’on s’est connu. Il est demeuré en contact avec moi et me souhaite bonne chance ici et là. Je l’ai remercié, mais je ne lui ai pas parlé depuis qu’il est à Montréal.»

Dernier tour de piste     

Dès le 7 avril, les Wolverines uniront leurs forces au tournoi du Frozen Four de la NCAA. Lorsque Bordeleau parle des éliminatoires, on dénote un brin de nostalgie. Ce noyau de jeunes universitaires tissé serré profite de ses derniers moments de gloire fraternelle. Gagne ou perd, tel Le Cercle des poètes disparus, ces troupiers ne jurent que par le carpe diem

«Il nous reste possiblement deux matchs ensemble. C’est un peu stressant, confie-t-il. Il reste que l’énergie est bonne, puisqu’on sait que c’est un peu notre dernier tour de piste.

«En ce moment, les affrontements peuvent aller d’un bord comme de l’autre. On veut avoir la meilleure "game" de notre vie et on est vraiment meilleurs qu’en début d’année. On contrôle ce qu’on peut contrôler avec la même énergie, en ayant le même plaisir. 

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«On voit que sa tire à sa fin et on est dans un état d’âme où on ne veut aucun regret.»

Rena Laverty / USA Hockey
Rena Laverty / USA Hockey

Bordeleau a beau souligner avec justesse qu’ils sont jeunes et qu’ils font parfois preuve d’inconstance, sur papier, les Wolverines ont du talent à revendre. Owen Power, Matty Beniers, Brendan Brisson, Luke Hughes, Samoskevich et Kent Johnson ont tous été repêchés au premier tour au cours des deux derniers encans. 

Le nom de Bordeleau a été appelé au 38e rang au total en 2020, soit neuf rangs plus loin que son ami Brisson, fils de l’agent influent, Pat, qui conseillera la famille une fois son parcours universitaire révolu, le mois prochain. 

Des moments éprouvants     

Bon nombre de ces hockeyeurs de talent se côtoient depuis longtemps, notamment au programme national américain de développement. Et les voici pour certains à la croisée des chemins avant d’entamer la carrière professionnelle à laquelle ils rêvent et qu’ils reluquent depuis l’enfance. 

Ils sont humains avant tout. Et parfois, la pression et les faux espoirs pèsent lourd. 

Bordeleau l’a appris à la dure après la dernière rentrée. D’abord, pour la deuxième année consécutive, il a dû renoncer au Championnat mondial de hockey junior en raison d’un résultat positif à la COVID-19. Ensuite, le rêve olympique ne s’est pas matérialisé pour l’attaquant terrebonnien.

«Pour la première fois de ma vie, je peux dire que j’ai broyé du noir. J’ai vécu une forme de dépression, a-t-il relaté avec une transparence désarmante. Heureusement, je suis bien entouré et j’ai réussi à m’en sortir.»

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Partout où il est passé, Bordeleau a toujours été un des meilleurs – sinon le meilleur – pointeurs de sa formation. Il admet que les nombreux objectifs qu’il s’est fixés ont fait qu’il en avait parfois trop sur les épaules. 

«Je veux m’améliorer chaque année. Je suis encore un joueur offensif, mais au début de l’année j’étais dans une glissade. Les gars faisaient tous des points et moi je n’en produisais plus autant.»

«Ce fut un moment pour me retrouver et je pense que j’ai vraiment réussi à développer une facette de mon jeu que je peux amener au prochain niveau et avoir plus confiance. Avant, je n’étais pas aussi confiant en mon jeu défensif, mais j’avais plein de points à ma fiche, donc c’était correct. 

«Là, je veux mettre l’emphase sur ces petites choses et je ne me soucie pas des facteurs extérieurs comme les médias et les prix (individuels). Tout est en sourdine et j’apprécie chaque jour avec les gars. Je donne tout ce que j’ai à l’aréna et je fais le plus de pas vers l’avant que je peux.»

Le report du Championnat mondial de hockey junior en août pourrait s’avérer positif pour Bordeleau. L’entraîneur de la formation américaine lui a récemment acheminé un texto qui le nourrit d’espoir.

«Il m’a écrit "la troisième fois est la bonne (third time's a charm)", mais je ne veux pas recommencer à me faire des attentes...»

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