Droit à l'avortement: le débat américain inquiète beaucoup ici
La décision pourrait stimuler des regroupements canadiens

Laurent Lavoie et Roxane Trudel
Les débats sur l’avortement aux États-Unis ravivent les inquiétudes des organismes libre-choix qui craignent qu’une décision antiavortement chez nos voisins du sud ne vienne attiser les tensions ici.
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«Si ça passe aux États-Unis, ça vient crinquer les groupes antiavortement ici. C’est extrêmement inquiétant [...] On trouve ça absolument scandaleux», lance Anne-Valérie Lemieux Breton, cocoordonnatrice du Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale.
La possibilité pour les États américains d’interdire l’avortement, que pourrait entériner la Cour suprême des États-Unis, a eu l’effet d'une bombe chez les organismes québécois qui accompagnent les femmes dans leur choix de terminer ou non une grossesse.
Énorme recul
«C’est un énorme recul si ça se produit. C’est très inquiétant pour nous parce que ça montre que l’accès à l’avortement n’est pas nécessairement un droit acquis. On ne voudrait pas que ça influence ici, mais c’est sûr qu’il va y avoir une visibilité antichoix dans les prochaines semaines», estime Sylvie Pedneault, directrice générale chez SOS Grossesse.
Ce genre de décision viendra nécessairement «donner du gaz» aux groupes québécois qui militent contre l’avortement, déplore Josiane Robert, directrice générale de l’organisme Grossesse-secours inc. Reste à voir l’ampleur que prendra le mouvement.

«Ça leur donne de la matière pour faire des revendications [...] Il faut rester vigilant: on ne souhaite pas que ce qui se passe aux États-Unis ait des répercussions ici», explique-t-elle.
Mais ce que les organismes déplorent, c’est que le droit à l’avortement peut rapidement chavirer, forçant les femmes à se tourner vers des méthodes dangereuses et clandestines pour avorter.
Droit à la vie des femmes
«C’est le droit à la vie qui est attaqué. Parce qu’on sait que l’avortement est pratiqué de toute façon, mais on tombe dans des avortements qui sont non sécuritaires», poursuit Mme Lemieux Breton.
Surtout qu’au Canada, sept projets de loi ont été déposés par des députés pour restreindre l’accès à une interruption de grossesse depuis 2007 – le dernier datant de mai 2021.
«C’est inquiétant, on ne sait pas ce qui va arriver dans l’avenir. Le débat est toujours ramené sur la table», conclut Mme Pedneault.
Intimidation sur les réseaux sociaux
Ce qui inquiète également, c'est l'effet d'une telle décision sur les groupes situés à droite sur l’échiquier politique qui ont gagné des appuis durant la pandémie.
«Il est trop tôt pour savoir si leurs partisans seront autant mobilisés contre l’avortement», indique Louis Audet Gosselin, directeur scientifique et stratégique au Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence.
«Faudra voir si l’expérience de militantisme qu’ils ont acquise dans le mouvement anti-mesures sanitaires va se transférer en partie sur cet enjeu-là», indique-t-il, mentionnant néanmoins qu'il a déjà observé de l’intimidation sur les réseaux sociaux à ce sujet.
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