Le crime et la violence n'ont aucune race


Maria Mourani
Ce n’est pas la première fois qu’on entend les mots «immigrants», «réfugiés» ou «migrants» employés avec «criminalité», inférant ainsi directement ou indirectement une intersection entre ces termes. Souvent, le mot «criminalité» est substitué à celui de «violence», tel un synonyme.
La criminologie de la mobilité ou des frontières est un sous-champ qui s’intéresse à plusieurs dimensions de l’immigration et de la criminalité, dont celui de son association dans le discours politique. Dans ce cas, il est courant d’utiliser la peur de l’Autre, et plus particulièrement de l’étranger, par une diabolisation, voire une criminalisation symbolique de l’immigration au nom d’une soi-disant sécurité. Cela permet alors de justifier certaines politiques migratoires et sécuritaires ainsi qu’un protectionnisme des frontières ou encore de se donner bonne figure dans un monde de plus en plus polarisé.
Bien souvent, je me rends compte que les mots «immigrants» et «personnes racisées» sont devenus interchangeables. Un bon exemple? Si je vous dis «gangs de rue», à quoi pensez-vous?
Gangs de rue et Hells Angels
Outre l’organisation, la structure, la ramification des réseaux et l’âge des membres, les gangs de rue et les Hells Angels ne sont pas si différents. Ce sont des groupes criminels qui s’adonnent principalement au trafic de drogue et au trafic humain. Ils sont tout aussi violents et ne se gênent pas pour régler leurs conflits par des assassinats. Si les gangs procèdent d’un recrutement sans discrimination de la race, les Hells ne choisissent que des Blancs dans leurs rangs, comme le prescrit leur charte.
Pourtant, lorsqu’on parle des gangs, il est courant de faire référence aux personnes racisées, principalement les Noirs, inférant ainsi un lien entre race et crime. Or, cette association n’est jamais soulevée lorsqu’il est question des Hells qui est une organisation criminelle de Blancs.
Racialisation du crime
La racialisation d’un phénomène criminel revient à associer un groupe d’une population à un type de crime. Le traitement différentiel entre les gangs et les Hells en est un bel exemple. Il s’inscrit dans la peur d’une jeunesse dite étrangère, inadaptée et dangereuse. Certains pseudochercheurs sont même allés jusqu’à dire que ces jeunes proviennent de pays violents. Évidemment, la violence est le propre de l’étranger. N’est-ce pas?
Posez-vous la question : qu’est-ce que la race apporte à la compréhension d’un phénomène criminel? Absolument RIEN. Par contre, ce genre de lien contribue à la stigmatisation et à la discrimination de communautés. En fait, les raccourcis cognitifs de ce type, loin d’être portés par la science, nourrissent certains discours politiques populistes et ne s’inscrivent nullement dans une volonté de mieux comprendre la complexité de l’acte criminel et ainsi trouver des solutions efficaces et durables.
Alors, ne vous laissez pas tenter par le chant des sirènes qui participe à votre emprisonnement dans le préjugé, le rejet, le racisme et la peur. Soyez plus grand, plus fort et plus bienveillant.