Le Canada, un pays à parti unique, ou presque


Mathieu Bock-Côté
Les sondages ne se trompaient pas: le PLC vient de remporter les élections.
Il formera un gouvernement minoritaire.
Il a su transformer les élections en référendum anti-Trump.
Cela dit, nous sommes obligés de constater que le Canada est concrètement, au-delà d’un pluralisme politique de façade, un pays à parti unique, ou presque.
Le PLC peut ainsi se maintenir au pouvoir quelles que soient les circonstances, grâce à l'appui de la technostructure fédérale et de certains médias qui le traitent comme la seule formation politique légitime.
Conservateurs
Tout le circuit des élites canadiennes les conduit naturellement à embrasser le PLC, qui tire plus que jamais les avantages du coup de force constitutionnel de 1982, concrétisé politiquement dans le règne d’une Cour suprême plus autoritaire que jamais.
L’électorat canadien est à ce point formaté idéologiquement qu’il a suffi de peu de choses aux libéraux pour engendrer un comportement électoral moutonnier dans de grands pans de la population. La peur fonctionne politiquement.
Le Canada de Mark Carney poursuivra le Canada de Justin Trudeau par d’autres moyens. Il poussera plus loin que jamais l’expérience mondialiste, immigrationniste et diversitaire qui caractérise la fédération depuis plusieurs décennies.
Cela n’est pas sans mener à des questions sur la nature de la démocratie canadienne.
Au Canada, les conservateurs sont traités comme un corps étranger, et plus encore lorsqu’ils essaient de se décomplexer idéologiquement. Ils sont alors la cible d’une campagne de diabolisation permanente.
Chaque cycle électoral trouvera son motif diabolisant. Auparavant, on attaquait la droite morale, en laissant croire qu’elle chercherait à interdire l’avortement si le Parti conservateur du Canada prenait le pouvoir. Maintenant, Trump a remplacé l’avortement comme repoussoir idéologique.
Les conservateurs, à terme, pourront gagner une élection sur cinq, dans des moments de grand ras-le-bol, mais pas davantage. Ils devront se replier sur les provinces pour exister politiquement. C’est déjà le cas, d’ailleurs.
L’Ouest canadien entre aujourd’hui en crise politique. Son aliénation par rapport au «Canada central» est totale.
Au Québec, plusieurs conservateurs pourraient en venir à considérer plus favorablement l’indépendance pour sortir de ce pays artificiel.
Quant aux indépendantistes québécois, ils paient le prix d’élections transformées par le PLC et les circonstances en référendum anti-Trump, et d’une campagne où ils ont davantage joué la carte du progressisme amidonné que du nationalisme.
Québec
Pour autant, le score du Bloc n’est pas déshonorant. Il a résisté et tenu bon.
Le Québec est moins compatible que jamais avec le Canada.
De toute façon, pour les Québécois, la prochaine grande étape aura lieu en octobre 2026: si les indépendantistes du Parti Québécois l’emportent, nous aurons probablement un référendum sur l’indépendance en 2027 ou en 2028, qu’ils peuvent gagner. Et c’est évidemment l’essentiel, dans tout cela.
Je m’amuse déjà à l’idée de voir Mark Carney jouer au chef du camp du Non.
L’Histoire est pleine de contorsions, mais nous conduit en ce moment dans la bonne direction.