L’autre crise qui nous guette: celle de la biodiversité
Élizabeth Ménard
Montréal accueillera la deuxième partie de la Conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15), en décembre, plutôt qu’en Chine. Au menu: des discussions urgentes sur cette crise qu’on dit encore plus grande que celle du climat.
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La Chine ayant déjà reporté à quatre reprises la tenue de cette deuxième partie de la COP15 à cause des restrictions sanitaires imposées par la COVID-19, c’est plutôt le Canada qui l’accueillera du 7 au 19 décembre.
Montréal est le lieu «par défaut» parce que la ville héberge le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique des Nations unies.
Une crise complexe et urgente
Les multiples reports des deux dernières années n’ont fait qu’amplifier l’urgence de tenir ces discussions internationales.
Alors que tous les yeux sont tournés vers la crise climatique, de plus en plus de voix s’élèvent dans le milieu environnemental pour dire que celle de la biodiversité serait... encore plus grave.
«En ce moment, à cause des activités humaines, de la surexploitation des ressources, des énergies fossiles, non seulement on est en train de réchauffer la terre avec les gaz à effet de serre (GES) qu'on émet, mais on est aussi en train de détruire notre habitat», explique M. Pérez.
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Selon lui, la perte de biodiversité n’est pas plus grave que la crise climatique, mais certainement plus complexe.
«On la comprend mal, même à l'échelle internationale. On en parle de façon isolée. On se dit qu'on va régler la crise climatique dans une chambre de négociations et dans l'autre chambre on va régler celle de la biodiversité, dit-il. Mais, de plus en plus, on se rend compte que cette approche est erronée parce qu'on ne prend pas en considération les liens et les causes qui existent pour les deux.»
Une seule et même crise
Les deux problématiques forment un tout indissociable, juge-t-il.
"We cannot address biodiversity loss without tackling climate change, but it is equally impossible to tackle climate change without addressing biodiversity loss. Protecting and restoring ecosystems can help us reduce the extent of climate change and cope with its impact" pic.twitter.com/HTZYkp0NYY
— Leon Barthel #Klimavor8 (@mementonature) November 3, 2020
«Les impacts des changements climatiques forcent des espèces à se déplacer, à refaire leur habitat. L'acidification des océans a aussi un impact considérable sur les habitats marins, notre capacité à les utiliser, à vivre près d'eux et à assurer une sécurité alimentaire, surtout dans les zones côtières», donne-t-il en exemple.
Six giraffes dead in drought. What does that count, against fossil fuel industry profits?
— Sheldon Whitehouse (@SenWhitehouse) December 16, 2021
Except for someone who knows when a sparrow falls. pic.twitter.com/qy16v7xKEH
C’est d’ailleurs ce qu’avait conclu le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat et la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) dans leur premier rapport conjoint publié l’an dernier.
Les changements climatiques entraînent une perte de biodiversité, ce qui a pour conséquence... d’accélérer le réchauffement climatique. Les arbres et les océans, par exemple, absorbent une partie des GES. Lorsqu’ils ne peuvent plus faire ce travail ou que leur capacité de le faire est amputée, les deux crises s’aggravent.
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«Cette dégradation et cette déconnexion avec la nature, avec la biodiversité et avec nous-mêmes a des conséquences considérables. Non seulement dans l'immédiat, mais aussi dans les années à venir», affirme Eddy Pérez.
Les espoirs d’un Accord de Paris 2.0
Lors de cette COP15, les États membres tenteront de décider d'un cadre de protection de la biodiversité à l’échelle internationale.
Selon les récentes discussions sur le sujet, l’accord devrait être de protéger 30% des écosystèmes marins et terrestres, ce à quoi le Canada s’est déjà engagé.
Les espoirs et les attentes sont élevés.
«Il y a des négos en cours pour qu'on se donne, comme on l'a fait à Paris, des objectifs un peu plus contraignants, où les États doivent rapporter, mettre de l'avant, des cadres de transparence, indiquer ce qu'ils vont faire dans un temps défini et un mécanisme de rehaussement de ces objectifs-là dans le temps» explique M. Pérez.
Celui-ci souligne que le Canada devra impérativement accélérer ses objectifs de réconciliation avec les peuples autochtones s’il veut rester crédible.
«Ça va donner l'opportunité d'avoir des discussions franches sur ce qu'il faut faire et les liens entre réconciliation et protection de la biodiversité», dit-il.