La Ronde est en train de détruire le Minirail construit pour l'Expo 67 en secret
Olivier Faucher
Le Minirail de la Ronde, l’un des derniers vestiges de l’Expo 67 dans le parc d’attractions, est en train d’être démoli en catimini, a appris Le Journal.
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«L’âme de la Ronde a complètement disparu. Les éléments qui gardaient le lien entre la Ronde et la population montréalaise sont en train de disparaître, et le Minirail, c’est peut-être le symbole le plus fort», s’insurge Roger La Roche, historien de l’Expo 67.
La Ronde a confirmé au Journal que la démolition du fameux manège était en cours, alors que le parc est fermé pour l’hiver depuis le 30 octobre.
«On a essayé de trouver des solutions pour le rouvrir, mais malheureusement, on est arrivé à ce point-ci», explique au bout du fil Nathalie Béland, directrice du marketing pour La Ronde (Six Flags).
Après avoir roulé sur le site pendant un demi-siècle, l’installation est tout simplement arrivée à la fin de sa vie utile, explique-t-elle, invoquant des inspections effectuées au cours des dernières années. Restaurer le manège voudrait carrément dire de tout reconstruire.
La décision a «surpris» le cabinet de la mairesse Valérie Plante qui déplore ne pas avoir été avisé.
«Considérant l’importance historique du Minirail, qui a transporté des générations de Montréalaises et de Montréalais, nous aurions aimé être avisés en amont des enjeux relatifs à la préservation du manège afin de pouvoir discuter des possibilités de préservation du train», a indiqué le cabinet, lorsqu’appelé à réagir.
Le Minirail n’avait pas roulé depuis 2019 en raison des mesures sanitaires de la pandémie qui interdisaient que des personnes soient assises côte à côte dans le train, ce qui a contribué à la détérioration de son état.
Aucune annonce au public
La Ronde a ainsi entrepris de détruire une relique de l’Expo 67 sans jamais avertir le public.
Cette façon de faire est «inacceptable», aux yeux de Roger La Roche.
«Disons que ça ne leur [La Ronde] tente pas d’avoir un débat, soutient-il. Ils ne sont pas très habiles pour diffuser l’information quand vient le temps de faire ce genre de chose là.»
Même s’il reconnait que l’installation ne pouvait plus être restaurée, l’historien fait néanmoins valoir que la disparition du Minirail s’inscrit dans une orientation prise par le parc d’attractions qu’il juge inquiétante, au détriment selon lui du patrimoine et des familles.
«La Ronde se concentre sur une clientèle jeune ado et jeune adulte, en oubliant l’historique même de l’Expo 67 qui devait être un lieu privilégié pour la famille», souligne-t-il en invoquant la fermeture du manège La Pitoune, en 2017.
En réponse aux critiques sur la gestion du patrimoine, Mme Béland indique que des discussions sont en cours pour rendre hommage au Minirail sur le site et que des trains ont été conservés à cet effet.
L’attraction «la plus appréciée» de l’Expo 67
Construit pour l’exposition de Lausanne de 1964 en Suisse, le Minirail a été racheté et installé à Montréal pour l’Expo 67.
À la grande surprise de plusieurs, y compris de la direction de l’Expo 67, le Minirail qui comprenait à l’époque trois circuits distincts sur les îles Sainte-Hélène et Notre-Dame fut le coup de cœur du public qui assistait à la grande exposition universelle.
«C’était l’élément le plus fort de l’expérience touristique, raconte l’historien Roger La Roche. Le plaisir du minirail, entre autres pour passer dans la Biosphère, a été excessivement fort.»
Ses usagers appréciaient pouvoir observer les pavillons du haut des airs grâce à la vitesse ralentie des trains. L’expérience similaire qu’il a offerte aux clients de La Ronde lui a garanti un succès pour les cinq décennies suivantes.
«Le simple fait de se promener pas vite dans le Minirail, c’était souvent une expérience de relaxation après les repas, pour calmer les jeunes. C’était un manège qui était très associé aux plus vieux qui utilisaient le site. Souvent, c’était les grands-parents qui faisaient découvrir le site à leurs petits-enfants avec le Minirail.»