Combien de temps la Chine pourra-t-elle poursuivre sa politique du zéro COVID?
Agence France-Presse
La souche Omicron met sous pression la stratégie chinoise de lutte contre le coronavirus comme jamais depuis la première vague du COVID il y a deux ans. Forcée à reconfiner des millions d'habitants, combien de temps la Chine pourra-t-elle poursuivre sa politique du zéro COVID?
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Le zéro COVID à la chinoise, qu'est-ce que c'est?
Dès l'apparition de cas de COVID, les autorités prennent des mesures de confinement des personnes contaminées et de leur environnement au sens large. Des quartiers entiers peuvent ainsi se retrouver coupés du monde du jour au lendemain.
Lors de la vague initiale début 2020, près de 60 millions d'habitants de la province du Hubei s'étaient retrouvés en quarantaine pendant plus de deux mois.
Avec l'arrivée d'Omicron, des villes entières se retrouvent à leur tour confinées, notamment la métropole de Shenzhen, aux portes de Hong Kong. Ses 17 millions d'habitants doivent rester chez eux depuis dimanche.
Dans tout le pays, les indispensables applications de traçage permettent de retrouver rapidement les cas contacts et de les enfermer au besoin.
Il n'est pas rare qu'un centre commercial, une école secondaire, un parc de loisirs ou un immeuble de bureaux soient bloqués d'un moment à l'autre après la détection d'un cas contact. Et que les personnes concernées se retrouvent coincées à l'intérieur pendant des heures, voire des jours, en attendant le résultat de leur test de dépistage.
Parallèlement, la Chine a pratiquement fermé ses frontières en mars 2020, réduisant les vols internationaux à la portion congrue.
Quels résultats?
Si l'on en croit les chiffres officiels, en l'espace de deux ans, la Chine n'a enregistré qu'à peine 115 000 cas de contamination, dont 4636 décès très exactement. Une fraction des bilans accumulés dans le reste du monde.
Le régime communiste y voit une validation de son système politique autoritaire, et ses médias s'étendent largement par contraste sur la situation sanitaire catastrophique du grand rival américain.
Si Pékin devait changer d'approche, il lui faudrait commencer par modifier la perception du virus dans la population. Un exercice risqué pour le président Xi Jinping, qui cherche à être reconduit à la fin de l'année à la tête du parti au pouvoir et se présente comme l'homme qui a protégé la Chine de l'épidémie.
Quel coût pour le pays?
La mise sous cloche de régions entières, particulièrement les plus industrialisées, perturbe gravement les chaînes d'approvisionnement, y compris à l'international.
Des secteurs entiers comme le tourisme, les transports ou la restauration continuent à pâtir des restrictions. Des millions de travailleurs migrants se retrouvent par ailleurs régulièrement bloqués dans leur province, incapables de retourner sur leur lieu de travail.
En plus du coût économique, le coût humain est élevé. Nombre d'habitants confinés se sont plaints de problème d'approvisionnement.
En tout début d'année, le drame d'une femme victime d'une fausse couche à la porte d'un hôpital avait ému les réseaux sociaux. Son dernier test n'étant plus valable, elle n'avait pu être hospitalisée.
De rares voix qui se sont élevées pour réclamer un changement de politique ont été qualifiées de traîtres à la patrie sur les réseaux sociaux. Mais les choses pourraient être en train de changer.
Jusqu'à quand?
Au début du mois, un prestigieux épidémiologiste, Zeng Guang, a estimé que le zéro COVID ne pourrait rester éternellement à l'ordre du jour et appelé à «coexister» avec le virus.
Faute de contamination, la population n'a atteint l'immunité collective que par les vaccins, a-t-il souligné, alors que le pays n'a administré à ses citoyens que des produits de fabrication nationale.
Mais compte tenu de la surpopulation chinoise et du manque de lits d'hôpitaux, un relâchement des mesures de précaution pourrait se traduire par «une contamination colossale», ont averti des chercheurs de l'Université de Pékin fin 2021.
Les autorités chinoises surveillent de près la situation à Hong Kong, où les hôpitaux peinent à faire face à une récente flambée épidémique.
Le territoire semi-autonome aux portes de la Chine détient désormais l'un des taux de mortalité due au COVID-19 les plus élevés du monde.