Les «combattants» de la «liberté»
Richard Martineau
O.K., j’ai une suggestion...
Peut-on imposer un moratoire sur le mot « liberté », s’il vous plaît ?
Pendant un mois, personne – aucun politicien ni aucun militant – n’a le droit d’utiliser ce mot hyper galvaudé.
Ni en privé ni en public.
Le temps qu’il retrouve son sens original.
PERDUS DANS L’ESPACE
Parce que depuis quelques semaines, on l’utilise tellement à toutes les sauces que je ferme les yeux et grince des dents quand je l’entends.
Comme si quelqu’un avait tiré une sonnette d’alarme.
J’ai le goût de crier : « Danger ! Danger ! Danger ! » comme le robot de Perdus dans l’espace.
Plus quelqu’un parle de liberté, plus je me méfie de lui.
Parce que lorsqu’un militant se présente comme étant un « défenseur de la liberté », ce qu’il veut dire, en fait, c’est que nous vivons sous un régime autoritaire.
Et ça, c’est de la foutaise.
Si le Canada était un pays autoritaire, Maxime Bernier et Éric Duhaime ne pourraient pas monter sur des tonneaux pour courtiser le vote des antivax.
Ils seraient en prison.
Comme les opposants de Vladimir Poutine et de Xi Jinping.
UN AIMANT À COUCOUS
Dès que j’ai entendu les organisateurs du convoi de camionneurs parler de « liberté », j’ai su qu’on était dans le trouble.
Parce que depuis le début de la pandémie, ce mot est un aimant qui attire tous les coucous de la planète.
« Build it and they will come », disait Kevin Costner dans le film Field of Dreams.
Maintenant, c’est : « Écris LIBERTÉ sur la boîte d’un camion de 18 roues, et tous les complotistes du pays vont sortir de leur trou pour aller te rejoindre ».
Des crackpots qui croient que la Terre est plate aux illuminés de QAnon qui sont convaincus que les gauchistes organisent des messes noires.
(P.S.: pour attirer Erin O’Toole, c’est aussi facile. Vous n’avez qu’à écrire F**K TRUDEAU, et le chef du Parti conservateur va traverser le pays pour vous serrer la main. Que voulez-vous, quand tu as désespérément besoin d’amis, tu n’es pas trop regardant et tu prends ce qui passe...)
LES COWBOYS
Je sais ce que vous allez dire : on est au Canada, ici, on n’est pas aux États-Unis, où le vent du radicalisme souffle pas mal plus fort.
Je vous rappellerais qu’on souligne aujourd’hui le cinquième anniversaire de l’attentat à la grande mosquée de Québec, alors...
Aucun peuple n’est à l’abri du virus de la rage.
On dit – à juste titre – que les camionneurs sont les cowboys des temps modernes.
Eh bien, on est en droit de se demander à quelle sorte de cowboys on a affaire, ce week-end, à Ottawa.
Les cowboys des films de John Ford, qui se battaient pour la justice et avaient un sens aigu de la communauté ?
Ou les cowboys des films de Sergio Leone, qui étaient prêts à tout pour arriver à leurs fins ?
Henry Fonda dans My Darling Clementine ou Lee Van Cleef dans Le bon, la brute et le truand ?
PILE OU FACE
Il se peut que cette manifestation se déroule de façon pacifique, c’est possible.
Mais il se peut que ça Scheer, aussi.
Euh, pardon – que ça chire.