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La génération Z tourne de plus en plus le dos à l'alcool

Illustration Christine Lemus
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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2023-01-26T13:00:00Z
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Une bonne partie de la génération Z est en âge de boire. Pourtant, elle est la génération qui consomme le moins d’alcool de l’histoire. Elle boit 20% moins d’alcool par personne que les millénariaux à leur âge. L’alcool aurait-il perdu son charme rock and roll pour cette génération soucieuse de sa santé et de son portefeuille? On en a parlé avec des jeunes qui boivent peu ou pas du tout.  

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«Un petit verre tranquille à la maison» 

Sara, 25 ans, boit rarement. Et pendant des années, iel ne buvait pas du tout. «Aujourd’hui, l’alcool est une petite récompense que je m’accorde de temps en temps, plutôt qu’une activité sociale ou une béquille pour quand j’allais mal», explique-t-iel. 

Sara
Sara Photo courtoisie

C’est à cause des effets que l’alcool avait sur ellui que Sara a décidé d’arrêter d’en consommer.  

«Je prenais de la médication qui, combinée à l’alcool, provoquait des trous de mémoire. Je ne me souvenais plus ce que j’avais fait avec qui pendant la soirée et ça m’angoissait beaucoup», raconte Sara, qui n'a jamais eu l’habitude de boire de manière abusive.  

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Cette décision a transformé son cercle social.  

«Plutôt que d’être à l’aise avec le fait que je ne boive pas, on a arrêté de m’inviter à certains évènements. Maintenant, mes amis sont plus du genre à prendre un petit verre tranquille à la maison», raconte-t-iel.  

Si Sara préfère consommer du cannabis de manière récréative, iel ne le considère pas comme un substitut à l’alcool.  

La légalisation du cannabis est un des facteurs qui pourrait expliquer la baisse de popularité de l’alcool auprès des plus jeunes générations. Selon un sondage de New Frontier Data, 69% des 18 à 24 ans disent en effet préférer le cannabis à l’alcool. 

Les substances psychotropes, comme la psilocybine (champignons magiques), attirent également plus la génération Z que les précédentes. 

«Prendre soin de soi, ça, c’est cool» 

Si on demande à Jules, 21 ans, si c’est cool de boire de l’alcool, il vous répondra sans détour: «Non, pas vraiment. Prendre soin de soi, ça, c’est cool.» 

Il boit de temps en temps, surtout parce qu’il aime le goût d’une bonne bière. «Je bois rarement plus qu’une consommation, j’ai rarement été soûl dans ma vie», dit-il.  

Dans sa famille d’origine française, on boit généralement aux repas. Il lui arrive de refuser des verres lors des rencontres familiales, ce qui cause parfois la confusion chez ses parents.  

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S’il préférait auparavant le cannabis à l’alcool, il en consomme moins aujourd’hui. «Je commençais à ne plus aimer l’effet que ça avait sur moi», explique Jules.  

Selon un sondage, les jeunes qui délaissent l’alcool au profit d’autres substances récréatives invoquent souvent un souci pour leur santé pour expliquer leur choix. Bien que la consommation de drogue comporte bien évidemment aussi des risques, on parle de plus en plus des effets négatifs de l’alcool, longtemps sous-estimés, notamment dans les médias et sur les réseaux sociaux. 

Ces effets négatifs néfastes de la consommation d’alcool, Jules les redoute.  

«Je bois beaucoup d’eau et je fais de l’exercice pour me garder en forme. Quand je vois des gens qui boivent beaucoup, je m’inquiète pour eux, parce qu’ils ne prennent généralement pas soin d’eux-mêmes», affirme-t-il.  

«J’aime rester en contrôle» 

Célia boit un verre de temps en temps lorsqu’elle sort avec ses amis, mais pas plus. Elle n’a d’ailleurs jamais été attirée par le sentiment d’ivresse.  

Célia
Célia Photo courtoisie

«Quand je sors, j’ai envie de me souvenir de ma soirée. Quand les gens sont trop soûls, ils sont malades, dépensent trop ou se mettent dans des situations compliquées. Pour moi, ce ne sont pas des risques qui valent la peine, parce que boire, ça ne m’apporte pas vraiment d’avantage», explique la jeune femme de 25 ans.  

«J’aime rester en contrôle, surtout quand tout le monde autour de moi est plus intoxiqué», poursuit-elle.  

À ses 18 ans, un incident lors d’une fête d’amis l’a particulièrement marquée à cet égard.  

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«J’ai un ami qui a trop bu et qui a tenté de se jeter devant les voitures dans la rue. On a réussi à l’arrêter, mais je me rappelle m’être dit que je ne voulais jamais perdre le contrôle comme ça», raconte Célia, qui n’apprécie pas le goût de l’alcool fort ni ses effets.  

Selon un sondage de Google Research sur le rapport qu’entretiennent les «Gen Z» avec l’alcool, 60% d’entre eux associaient le fait de boire à une perte de contrôle.  

Or, la perte de contrôle n’a plus la cote chez une partie de la jeune génération qui a grandi dans un contexte d’insécurité économique et à l’ombre de la crise climatique. Ils sont aussi moins nombreux que les autres générations à s’adonner à d’autres pratiques risquées, comme la conduite dangereuse ou les relations sexuelles non protégées. 

Selon un sondage, 49% des Gen Z disent par ailleurs se soucier de leur image en ligne constamment. L’idée qu’un employeur puisse tomber sur une vidéo d’eux en état d’ébriété sur les réseaux sociaux leur importe plus que les générations antérieures. 

«Je ne devrais pas devoir me justifier» 

Marie, 24 ans, se décrit comme «celle qui tient les cheveux des gens qui sont malades dans les partys».   

Marie
Marie

«Depuis toujours, je trouvais que l’alcool ne goûtait pas bon. Après un verre, je me sens déjà un peu pompette et je déteste le sentiment de tournis quand on est ivre», décrit celle qui affirme pouvoir compter sur ses doigts le nombre de fois où elle boit par année. 

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À force de s’occuper de ses amis qui vomissent, Marie n’a jamais vu l’intérêt de boire à l’excès.  

«Ça me paraissait encore pire qu’une gastro et j’avais peur qu’ils s’étouffent ou aient des séquelles», mentionne-t-elle.  

Plutôt que de lui poser des questions sur son choix de ne pas boire, ses amis ont compris que ça ne vaut pas la peine de l’inviter à une sortie dans un bar ou un club, car ça ne l’intéresse pas.  

«C’est juste un choix personnel que je ne devrais pas devoir justifier. Je ne me promène pas dans les partys en demandant aux gens pourquoi ils boivent. Pourquoi est-ce que c’est correct de faire le contraire alors?» 

«Je noyais mes chagrins dans l’alcool» 

Manon, 27 ans, a un passé de grande fêtarde.  

Photo courtoisie
Photo courtoisie

«Ça faisait partie de mon quotidien de boire beaucoup et souvent. C’était aussi une façon d’oublier mes problèmes et de me déresponsabiliser de mes actions», confie-t-elle. 

C'est après avoir reçu un diagnostic de trouble anxieux que Manon a décidé de réduire sa consommation d’alcool. «Les lendemains de fête, j’étais toujours ultra anxieuse, j’avais honte de ce que j’avais pu faire et dire la veille», explique-t-elle.  

Manon considère qu’on a tendance à trop minimiser les risques de dépendance lorsqu’il est question d’alcool.  

«On intègre que c’est normal de boire tout le temps, mais c’est une drogue. Il y a des périodes où je noyais mes chagrins dans l’alcool. Ce n’était pas loin de l’alcoolisme, à mon avis», soutient-elle.  

Lorsque Manon observe les membres plus jeunes de sa génération, elle a l’impression que les mentalités changent.  

«Quand j’avais 18 ans, on buvait pour s’émanciper, alors que perdre tous tes moyens, finalement, il n’y a rien de moins adulte. Les plus jeunes ont l’air d’avoir compris ça.» 

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