La conjointe de Corneille s'implique d’une certaine façon à La Voix
Nathalie Slight
En 2003, les Québécois découvraient le talent de Corneille grâce à son premier album, Parce qu’on vient de loin. Vingt ans plus tard, le public redécouvre l’artiste à travers son rôle de coach à La Voix. Ses interventions justes, pertinentes et empathique nous font inévitablement tomber sous le charme de cet être charismatique, bienveillant et profondément humain.
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Corneille, depuis maintenant 20 ans, tu te livres généreusement à travers tes chansons, alors que tu es quelqu’un d’assez réservé dans la vie...
C’est vrai. J’ai toujours été très discret en dehors de mes projets artistiques. Lorsque je n’ai pas d’album à promouvoir, on ne me voit pas. Je ne vais pas souvent dans les soirs de premières, et je ne participe pas à différents shows de télé. Je suis tout aussi heureux dans l’ombre que sous les feux des projecteurs.
Et voilà que, pour la première fois, grâce à La Voix, le public a non seulement accès à l’artiste, mais également à la personne que tu es...
C’est vrai. Le public a rarement eu l’occasion de m’entendre m’exprimer sur d’autres sujets que mes propres projets. Je crois que c’est ce qui explique pourquoi plusieurs ont l’impression de me redécouvrir — ce qui, soit dit en passant, représente tout un privilège. Après 20 ans de métier, j’ai l’impression d’entrer dans une nouvelle phase de ma vie d’artiste.
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Que veux-tu dire?
Des gens que je ne connais pas m’arrêtent dans la rue pour me jaser de La Voix. À l’école, on parle à mes enfants de mon rôle de coach. Mes proches me font part des commentaires positifs qu’ils lisent à mon sujet sur les réseaux sociaux. Cet engouement me touche profondément, mais j’ai l’impression que c’est seulement une fois la grande finale diffusée que je vais pouvoir en mesurer l’ampleur. Pour l’instant, je suis trop occupé: je suis totalement investi dans cette mission d’accompagnement et de mentorat des candidats de l’équipe Corneille.
Tu es un excellent pédagogue. Tes parents étaient-ils enseignants?
Non. Mon père était ingénieur électricien de formation, et ma mère travaillait à la banque commerciale de Kigali. Mais c’est tout de même une belle coïncidence que les gens perçoivent un pédagogue en moi, puisqu’en fait,au Rwanda, les noms de famille sont tous des phrases ayant une signification précise, et le mien, Nyungura, veut justement dire «apprends-moi»!
Pour vrai?!
Oui! C’est fou la vie, hein? La Voix me permet, pour la première fois de mon existence, d’être en accord avec mon nom de famille. Jusqu’à tout récemment, j’ai toujours cru que j’allais chanter et écrire des chansons le reste de mes jours, parce que c’est ce qui me faisait vibrer. Et à ma grande surprise, grâce à un show télé, je réalise que le partage de mon expérience et l’aide que j’apporte aux autres artistes, ça me nourrit autant sinon plus que de travailler sur mes propres projets. Cette facette du transfert des connaissances est définitivement dans ma vie pour y rester.
Depuis 14 ans déjà, tu collabores avec ton épouse, l’autrice-compositrice Sofia de Medeiros: vous composez ensemble des chansons et travaillez de concert sur tous vos projets. Est-ce difficile pour toi de ne pas l’avoir à tes côtés à La Voix?
Elle a suivi chaque étape de La Voix. Je parle tellement de mes candidats à la maison qu’elle les connaît autant que moi. En plus, elle est ma styliste pour le show: elle est responsable de tous mes looks sur le plateau.
Pour la première fois, tes enfants te voient participer à une émission grand public, semaine après semaine. De quelle façon cela les touche-t-il?
À 12 ans, bientôt 13, Merik trouve ça cool que son papa soit coach à La Voix, mais il n’en fait pas de cas. Il est à la veille de l’adolescence, alors, sa vie sociale avec sa gang d’amis est beaucoup plus importante que les occupations de ses parents. Il traverse une phase d’indépendance. On dirait quasiment qu’il est prêt à partir en appartement! (rires) Sportif dans l’âme, il écoute beaucoup de musique, mais il n’exprime pas le désir d’en faire.
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Et ta fille?
Pour ce qui est de Mila, à sept ans, elle possède définitivement un côté artistique. D’ailleurs, elle est à l’affût de tout ce qui concerne La Voix. Elle regarde assidûment les émissions avec nous. Elle adore ça quand Marjo fait des kicks en l’air et elle commente toutes les prestations.
A-t-elle des candidats préférés?
Bien sûr! Mais je ne vous les dévoilerai pas, par souci d’équité. Par contre, je peux vous dire que, lors des auditions à l’aveugle, elle n’était pas contente quand les candidats pour lesquels je m’étais retourné choisissaient un autre coach. Et lorsqu’aucun de nous ne se retournait, ça venait vraiment la chercher aussi. Une chance qu’elle n’a pas accès aux réseaux sociaux parce qu’elle serait du genre à écrire: «Ça n’a pas d’allure! Vous n’avez pas d’oreille ou quoi?» et à y aller d’autres cmentaires pour le moins intenses à la Mila. (rires)
Il y a quelques années, dans une entrevue à 7 Jours, tu as révélé que tu avais de la difficulté à dire «Je t’aime» et que tu travaillais fort là-dessus. Tes efforts ont visiblement porté leurs fruits puisqu’à La Voix, la première chose que tu as dite à tes candidats, c’est: «Je vous aime tous!»
Il y a 15 ans, je l’aurais pensé, mais je ne l’aurais pas dit à haute voix. C’est à la suite d’un cheminement personnel, mais surtout grâce à ma femme et à mes enfants, que je m’ouvre aujourd’hui plus facilement sur ce que je ressens. Ce «Je vous aime tous!» lancé à mes candidats était une déclaration spontanée qui venait directement du cœur.
Est-ce que ça te surprend d’être aussi proche de tes candidats?
Pour être franc, oui. Je m’attendais, bien humblement, à être un bon coach. Parce que j’ai écrit des chansons pour d’autres artistes et que j’ai produit des albums, je savais que je possédais un talent pour transmettre mes connaissances. Par contre, j’ignorais ce que La Voix allait faire ressortir en moi, humainement parlant. Cette émission fait tomber mes barrières: elle me permet de m’ouvrir comme jamais à de purs étrangers et à m’attacher rapidement à eux. Ce fort sentiment envers mes candidats, quasiment paternel, je ne l’avais pas vu venir. C’est un des plus beaux cadeaux que la vie m’a offerts jusqu’à présent.
Ta famille musicale s’agrandit!
Exact. En côtoyant mes candidats, je retrouve la naïveté, l’arrogance et l’impatience de ma jeunesse. Ça me rappelle la personne que j’étais il y a 20 ans, lorsque je débutais dans le métier avec mon premier album, Parce qu’on vient de loin. Être coach à La Voix, ça nourrit l’artiste et l’humain que je suis dans toutes les sphères de ma vie.
Belles leçons de vie
Dans le cadre des duels, Corneille a ému tout le Québec en rendant hommage à la candidate la plus âgée de l’histoire de La Voix, Nadia-Lyse. «De par mon histoire, je suis conscient que c’est un privilège de vieillir. Et ça fait aussi partie des valeurs qui m’ont été transmises lorsque j’étais petit. En Afrique, les personnes les plus respectées, les plus admirées, les intouchables de la société, ce sont les personnes âgées. Adolescent, j’appelais mon père “mon vieux”; c’était quasiment un titre de noblesse. Et c’est cette mentalité d’estime envers les personnes âgées que je désire léguer à mes enfants, Merik et Mila. Malheureusement, en Occident, faire référence à quelqu’un en utilisant le mot vieux est péjoratif, l’équivalent d’une insulte. Il faut réfléchir à la place que l’on réserve aux aînés ici... La façon dont ils ont été traités durant la pandémie n’a aucun bon sens. Il n’y a pas de date de péremption sur les humains. Ce n’est pas parce que quelqu’un prend de l’âge qu’il ne peut pas réaliser de grandes choses. Et c’est ce que Nadia-Lyse de l’équipe Marjo a prouvé à tout le Québec en participant à La Voix à l’âge de 76 ans. Je voulais souligner son audace, son courage et, par le fait même, rendre hommage à toutes les personnes âgées qui osent réaliser leurs rêves!» De plus, parmi les candidats de Corneille, il y a une personne nommée Sylveo qui s’identifie comme non binaire.
«C’est une personne brillante, intelligente et talentueuse, originaire de France, qui a récemment immigré au Québec. Sylveo souhaite simplement qu’on s’attarde à l’artiste, au-delà de ses origines et son identité de genre. Et ça, je trouve ça beau et inspirant. Notre société est en pleine mutation: des valeurs qu’on tenait autrefois pour acquises sont en train d’éclater, de se réinventer! Ce peut être confrontant, le changement. Que La Voix participe à ce mouvement, en mettant de l’avant la diversité sous toutes ses formes, ça me rend fier. Cette émission est bien plus efficace que n’importe quelle campagne politique sur l’ouverture face à la différence, puisque la musique n’a pas de genre, elle est universelle.»
La Voix, dimanche 19 h 30, à TVA.
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