Julie Bélanger nous raconte comment elle a surmonté la non-maternité avec son conjoint
Michèle Lemieux
Après une année d’importants changements, Julie Bélanger s’est consacrée à un projet très personnel: Imparfaite. Dans le cadre de cette série documentaire, l’animatrice nous ouvre à la fois son jardin secret et les portes de sa maison qui devient le lieu privilégié pour recevoir ses invités, discuter, se confier. Imparfaite amène Julie à s’ouvrir comme jamais puisqu’il sera question de pardon, de vieillissement, de non-maternité, de thérapie, d’épuisement professionnel, mais aussi de santé mentale — un sujet cher à son cœur et qu’elle a été l’une des premières à oser aborder.
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Julie, une autre belle saison de Ça finit bien la semaine vient de se terminer. Est-ce que la transition entre tes coanimateurs s’est bien déroulée?
Oui. Ç’a été ma 10e année. Ça me donne un choc, quand j’y pense. Cette saison s’est vécue dans le bonheur et le renouveau. Le départ de José nous a insécurisés, mais j’ai trouvé mon match avec Jean-Michel. Je suis bénie des dieux! Nous avions déjà travaillé ensemble et nous avons vite retrouvé cette complicité. Cela a apporté une autre énergie et donné un souffle nouveau au show. Nous nous encourageons l’un l’autre. En fait, nous avons les mêmes valeurs au travail.
Un projet important, Imparfaite, a vu le jour cette semaine. Est-ce que ça faisait un moment que tu y travaillais?
Oui. Les premières discussions remontent à deux ans. Il y a longtemps que je porte ce projet et que j’ai hâte de le présenter. C’est une série documentaire de huit épisodes inspirée de mon site Web et de mon livre, Être Bien. La réalisatrice, Maude Éthier-Boutet, a fait un travail extraordinaire! Un jour, j’ai souffert d’un épuisement professionnel et un de mes proches a sombré dans la dépression. Ç’a été le point de départ de ce projet. À partir de ce moment-là, il y avait une urgence chez moi de parler d’hygiène mentale. On en parlait dans nos vies privées, mais pas sur la place publique. Pour rejoindre le plus de gens possible, je pense que ça doit passer par la télé. Je voulais aborder certains thèmes qui me sont chers. Chaque épisode a une thématique, et nous commençons par la dépression.
Des invités viennent témoigner de leur propre expérience...
Oui. Dans chacun des épisodes, nous avons des artistes invités, mais aussi des spécialistes. Le point de départ est toujours personnel. Lorsque j’évoquais un proche qui a fait une dépression, il s’agissait de mon frère. Il était prêt à en parler. Six ans plus tard, il est complètement ailleurs dans sa vie. Il va bien. En fait, il s’est replacé sur le chemin où il devait être. Comme ç’a été le premier tournage, j’ai pleuré durant la première heure. J’avoue que je me suis demandé dans quoi je m’étais embarquée. Avec Imparfaite, on est dans mon cœur. Mon frère a raconté ce qu’il a vécu, mais c’est surtout pour donner de l’espoir. Nous avons tourné chez lui à Québec, et mes parents étaient présents. J’ai donc fait aussi une entrevue avec mon père. Ç’a été un beau moment. Nous avions tous vécu cette situation, mais nous n’en avions jamais reparlé par la suite. Nous avons vécu une grosse crise familiale et nous avons eu peur, puis nous avons mis le couvercle là-dessus et regardé ailleurs.
Pouvoir en parler, c’est déjà un signe de guérison...
Oui,etçaafaitdubienà tout le monde. J’ai aussi parlé à José Gaudet qui n’a pas fait de dépression, mais qui a souffert d’anxiété. Dans le deuxième épisode, on parle de thérapie avec, entre autres, Ingrid Falaise, que j’ai rencontrée en thérapie. Nous sommes retournées ensemble au monastère où nous avons fait une thérapie fermée. Je ne la connaissais pas, mais j’avais remarqué qu’elle était en état de panique; alors, je suis allée spontanément vers elle. Nous sommes devenues des amies. Dans Imparfaite, elle me confie des choses qu’elle ne m’avait jamais dites avant.
Qu’est-ce qui t’avait amenée en thérapie?
L’épuisement professionnel. C’était en 2008. Ça fait donc 15 ans. J’ai organisé un party de filles et, ensemble, nous revenons sur les bienfaits de la thérapie. Dans le troisième épisode, nous parlons de non-maternité. Mon chum, qui préfère l’ombre, a accepté de parler à la caméra. Je trouvais ça intéressant d’avoir son point de vue en tant que conjoint.
Parce que certains, dans ce contexte, choisissent de partir?
Oui, mais nous sommes passés au travers, car nous avions la même vision de la vie. Je nous trouve chanceux. Geneviève Brouillette m’a raconté son histoire. Elle a voulu avoir des enfants, elle a eu un long processus ardu en fertilité, mais ça n’a pas fonctionné. Même si ça fait des années, elle est encore très émotive quand elle revient sur cette période. Andrée Martin, journaliste à TVA Québec, a pour sa part décidé d’aller en clinique de fertilité à 40 ans. Elle n’avait pas de conjoint. Son meilleur ami gai lui a proposé d’être le père. Ils ont donc créé un nouveau modèle. Elle est aujourd’hui maman d’une petite fille.
As-tu toi-même songé à la fécondation in vitro?
Non, c’était ma limite. J’en parle dans l’épisode. J’admire les filles qui le font, car ça semble douloureux sur tous les plans, mais je ne m’en sentais pas la force. Je sortais de mon épuisement professionnel. J’étais fragile. J’étais en reconstruction. Je ne voulais pas jouer avec mes hormones. C’était trop. Je me suis dit que si la vie ne nous donnait pas d’enfant, j’allais l’accepter et que j’allais vivre ma vie autrement. Mon chum était à la même place que moi. Le quatrième épisode s’intitule Rebondir après l’épreuve, avec Maripier Morin et Dominique Bertrand. Elles ont traversé des épreuves différentes. Maripier a eu des comportements toxiques. Nous avons parlé de la période où ç’a été souffrant pour elle et de la façon dont elle s’est reconstruite. Dominique, quant à elle, a perdu son conjoint il y a 25 ans, et ç’a été l’épreuve de sa vie. La voir aussi sereine et heureuse aujourd’hui donne de l’espoir. Elle est grand-maman. Elle est heureuse. Sa vie a fleuri autrement. J’ai aussi fait un épisode sur le pardon.
Et avec qui as-tu fait ce processus?
Avec Mélanie Maynard. Nous ne nous étions ni vues ni parlé depuis 14 ans... (Rappelons que Julie a quitté Deux filles le matin pour plusieurs raisons et que la discorde entre elle et Mélanie en faisait partie.) Comme je suis productrice au contenu sur ce show, j’ai pensé à faire un épisode sur le pardon, car je suis rancunière. (sourire) J’ai écrit à Mélanie pour lui demander si je pouvais lui téléphoner. J’étais fébrile. Elle m’a spontanément répondu oui. Je l’ai appelée et, quand elle a décroché, nous nous sommes mises à rire. C’était fini, tout ça... Mélanie est venue à la maison. J’étais stressée. Nous sommes tombées dans les bras l’une de l’autre et nous nous sommes demandé ce qui avait bien pu se passer pour qu’entre elle et moi ça fasse tant mal! Nous avons ri, il y a eu des larmes. Ç’a été un beau moment. On me suivra durant cet épisode dans une thérapie sur le pardon. Je me suis dit que ça allait servir à tous les rancuniers du Québec. Parmi les autres thèmes des épisodes, il y a apprendre à s’aimer, faire sa place en tant que femme et bien vieillir.
Le vieillissement interpelle tout le monde...
Je m’interroge beaucoup sur le fait de vieillir dans mon métier et même sur le fait d’être une femme et de vieillir. On sait à quel point les standards pour les hommes et les femmes ne sont pas les mêmes... J’ai décidé de faire un party de filles avec Judi Richards, Shirley Théroux et Édith Butler, qui a 81 ans. Elle construit encore des maisons. Elle mord dans la vie. Elle m’a donné des perles de sagesse!
Ça te donne espoir de pouvoir bien vieillir, toi aussi?
Oui, et je pense que ça prend de plus en plus de modèles sur ce plan. Ça m’a fait du bien, et je pense que ça fera du bien à tout le monde. Alors, finalement, c’est le projet le plus intime de ma carrière...
Comment te sens-tu à l’approche de la cinquantaine?
J’aurai 49 ans en septembre. Je sens une évolution, mais il y a quand même du chemin à faire dans notre milieu. Shirley a été congédiée à 40 ans, car elle était trop vieille. Je veux montrer à l’écran ces femmes qui ont trouvé le secret pour bien vieillir. Elles ont conservé leur cœur d’enfant et ont l’œil pétillant. Je crois que c’est une clé. Shirley m’a dit que, même si elle a travaillé comme une folle, elle s’est toujours réservé du temps pour faire du bénévolat et se consacrer à ses passe-temps. Moi qui ai toujours tout misé sur le travail, j’ai besoin d’apprendre à faire de la place pour autre chose...
Est-ce que tu y parviens de plus en plus?
Oui. J’ai commencé à suivre des cours de piano. Cet hiver, pour la première fois depuis très longtemps, je n’avais qu’un seul mandat: Ça finit bien la semaine. Cet horaire a créé de l’espace. Je ne suis pas bonne au piano, mais je trouve ça agréable. Il n’y a rien de productif, et ça me fait du bien.
Parce que tu es une performante de nature?
Je suis performante dans tout. Dans le cadre de la série, je suis allée faire de la poterie. J’étais stressée à l’idée de ne pas être bonne... Je voulais être performante même en faisant de la céramique! Je ne suis pas guérie, mais je me vois aller! (rires)
La série t’a-t-elle permis de constater à quel point tu as eu la faculté de te remettre de plusieurs épreuves?
Je ne vois pas les choses sous cet angle, car je me dis que nous avons tous nos épreuves. Il est rare que je m’arrête pour me dire que j’ai réussi quelque chose. J’ai fait la série pour partager des outils. Si ça fait du bien, tant mieux.
As-tu identifié des clés qui t’ont permis de traverser les moments difficiles?
Je pense que je n’ai pas peur d’aller chercher de l’aide. C’est la base. C’est pour cette raison que la série est aussi importante pour moi. Je sais qu’il y a des gens qui n’ont pas accès aux mêmes ressources que moi, ne serait-ce que parce qu’ils sont en région. Beaucoup de gens souffrent en ce moment. Ils veulent de l’aide et ne savent pas quoi faire ni où aller. Il ne faut pas avoir peur de lever la main quand ça ne va pas. Personnellement, dès que ça accroche, je prends rendez-vous chez ma psy. Ç’a été une clé importante dans ma vie.
Imagine si tu avais vécu toutes tes épreuves sans thérapie...
Je ne sais pas dans quel état je serais aujourd’hui... J’en serais peut-être à mon quatrième burnout. Nous avons tous un coffre d’outils, mais vient un moment où on l’a épuisé. C’est le temps d’aller vers quelqu’un qui nous montrera une autre façon de voir la vie pour évoluer. Je suis une grande adepte de la thérapie!
La série a été tournée chez toi, semble-t-il...
Oui, dans mon intimité. Je trouvais que ça s’imposait, car le sujet est très intime. Ici, c’est ma bulle. Je suis une anxieuse, alors c’est ici que je trouve mon calme et que je me recharge. J’ai besoin de solitude et de paix, et c’est ce que je retrouve avec mon fleuve, mon chien et mon chum. C’est mon point d’ancrage.
As-tu autre chose au programme, Julie?
Je serai de retour à Ça finit bien la semaine pour une 11e saison. Je vais aussi m’impliquer dans la production. J’y ai goûté avec Imparfaite et j’ai aimé ça. Je suis rendue là dans ma carrière. Entre-temps, comme mon frère et sa conjointe, Morgane, attendent un petit garçon, j’irai passer du temps sur la Côte-Nord cet été...
La série documentaire Imparfaite est maintenant disponible sur Vrai. Ça finit bien la semaine revient cet automne à TVA.
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