Vendre des vêtements usagés en empruntant les codes de la fast fashion
Élizabeth Ménard
Jeunes mannequins à la moue sexy, crop tops, chaussures de sport: les photos de l’entreprise québécoise Détour semblent tout droit sorties d’un magazine de mode, à une exception près... c’est que les vêtements qu’elle vend sont usagés.
À première vue, rien sur le site de Détour ne laisse présager qu’il s’agit d’une entreprise d’économie circulaire. On doit descendre au bas de la page d’accueil ou aller farfouiller dans la section «À propos» pour le comprendre.
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«J’ai essayé de trouver ce que je pourrais créer avec une conscience environnementale, sans que ce soit la première chose qu’on voit», explique la fondatrice de l’entreprise basée à Québec, Abby Marino.
«Côté marketing, j’ai voulu me positionner exactement comme une compagnie de fast fashion», dit-elle.
Écolo, mais pas grano
Le site web de Détour a été pensé pour offrir une expérience de magasinage similaire à celle des grandes chaînes comme H&M.
«Je ne voulais pas que les gens aient cette espèce de vision «granola» des trucs usagés. Je pense que c'est de cette façon-là qu'on va être capable d'initier plus de gens à la consommation seconde main», fait valoir la jeune femme de 22 ans.
Détour se distingue des autres sites de revente en offrant des boîtes de tenues complètes (chandail, pantalon, veste, par exemple). On combine donc un service de stylisme à l’achat seconde main.
Abby Marino estime que son modèle d’affaires peut attirer une tranche de la population qui ne va normalement pas en friperie parce qu’elle n’aime pas l’expérience de magasinage.
Une vision à long terme
Lancée en 2020, Détour n’en est encore qu’à ses débuts.
« Étant donné que c'est à petite échelle, c'est moi qui vais dans les friperies, les centres de tri et des endroits où j'ai des contacts pour me procurer des vêtements. Je fais ça à partir d'un plan mode que j'ai développé d'avance», explique la jeune entrepreneure.
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Elle travaille aussi avec une couturière qui fait des altérations sur environ 10% des morceaux choisis.
Étudiante à temps plein en comptabilité, Abby Marino ne vit pas encore des fruits de son entreprise.
«J'ai une grande vision à long terme, dit-elle. Je ne travaille pas pour faire de l'argent à court terme.»
Tout ce qu’elle fait présentement vise à lui permettre de développer un système opérationnel efficace puisqu’elle est convaincue que le marché de l’usagé continuera à croître.
«Le Québec et le Canada sont relativement en retard. En Norvège, par exemple, il existe un centre d'achat où il y a juste des boutiques de seconde main. C'est vraiment cool!»
«De plus en plus, les gens voient ce secteur comme une opportunité plutôt que comme une contrainte environnementale, juge-t-elle. C'est vers là qu'on se dirige.»
Au cours des prochaines années, l’entrepreneure travaillera à développer une collaboration avec d’autres entreprises similaires à la sienne pour réduire les coûts de production.