Jacques Doucet: le Vin Scully du Québec
François Paquet
Il y a quelques semaines, lors de la diffusion d’un match Phillies – Dodgers sur les ondes de TVA Sports, nous avons parlé de Vin Scully, l’éminent descripteur des Dodgers, qui a été la voix de l’équipe pendant plus de 65 ans, de Brooklyn à Los Angeles.
Mon collègue Rodger Brulotte a mentionné à un certain moment «Jacques Doucet, c’est le Vin Scully du Québec», et je trouvais qu’il ne pouvait pas mieux dire.
Le 18 juin prochain à St. Marys en Ontario, celui qui a été la voix des Expos pendant plus de 30 ans, sera intronisé au Temple de la renommée du baseball canadien. Un honneur pleinement mérité, qui sera célébré avec quelques années de retard en raison de la pandémie. Comme bien des Québécois, la voix de Jacques Doucet a été la trame sonore de mon adolescence et de mes étés. Et comme jeune passionné de baseball, j’étais en amour avec les Expos, et la meilleure façon de les suivre, c’était à la radio, parce qu’il y avait très peu de matchs à la télévision à cette époque.
Que ce soit avec Rodger Brulotte, Marc Griffin ou Claude Raymond, il y avait toujours une chimie entre Jacques et son analyste. Il savait exceller dans sa description, nous parler de Nos Z'Amours mais aussi de mettre en valeur la personne qui travaillait avec lui, peu importe son expérience dans le monde du baseball. Mais je ne savais pas à quel point celui que j’écoutais religieusement allait avoir un impact majeur sur ma vie et ma carrière.
Des Expos aux Capitales
En 2006, mon patron de l’époque à CHRC-Québec 800, Jean-François Gilbert, m’a annoncé qu’on m’avait trouvé un collègue pour travailler avec moi à la description des Capitales. Au départ, je n’étais pas très emballé par l’idée de travailler avec une autre personne, surtout que je ne savais même pas que mes patrons étaient en mode recherche. Lorsqu’on m’a annoncé que ce nouveau collègue s’appelait Jacques Doucet, j’étais emballé mais aussi sous le choc. Comment la voix des Expos pouvait-elle s’intéresser à venir travailler dans le monde folklorique du baseball indépendant?
Nous devions faire un match préparatoire ensemble, mais il avait été annulé en raison du mauvais temps. Alors notre premier match ensemble a été au mois de mai 2006, et ce soir-là, les Capitales avaient joué un match horrible et commis six erreurs lors de leur match d’ouverture. Mais cela n’allait pas empêcher Jacques de faire un travail quasi impeccable et de vraiment créer un «buzz» autour de l’équipe et de la station. Il décrivait les exploits des Eddie Lantigua et Michel Simard, comme si c’était Tim Raines et Steve Rogers. On appelle ça avoir la passion de son sport.
Cette soirée a été magique pour moi, parce que cette première rencontre en ondes s’était tellement bien passée. Le fait d’avoir écouté Jacques m’avait donné l’avantage de connaitre sa façon de travailler et tout a cliqué dès le premier soir. Et ç’a été le début d’une belle amitié qui existe toujours aujourd’hui, une quinzaine d’années plus tard.
J’avais des craintes au départ, parce que je ne connaissais pas Jacques personnellement, je ne l’avais jamais rencontré, et j’avais peur qu’un descripteur du baseball majeur arrive avec ses gros sabots et nous disent comment nous devrions travailler. Mais ça été tout le contraire, puisqu’une des premières choses que Jacques m’a mentionné lors de notre première rencontre, m’avait beaucoup marqué : «J’ai certainement beaucoup de choses à te montrer sur le baseball et la description de matchs, mais tu as beaucoup de choses à m’apprendre sur la Ligue Can Am».
Et non seulement j’ai appris en étant assis à la droite de Jacques, mais on a eu un plaisir fou dans notre petit studio situé en plein milieu des estrades au Stade municipal.
Apprendre du maître
J’ai travaillé avec Jacques de 2006 à 2011, jusqu’au moment où il est rentré au bercail pour travailler à TVA Sports. Durant ces années, j’étais devenu une espèce d’éponge qui absorbait tout ce qui était possible pour être meilleur dans mon domaine. Mais pas seulement sur le baseball et la description de matchs, mais aussi sur la préparation, parce que Jacques restera toujours pour moi l’exemple de quelqu’un qui travaille bien, qui travaille fort et qui s’assure d’être prêt lorsque vient le temps d’aller en ondes. Et tous les gens qui ont travaillé avec lui pourraient vous le confirmer. Et même encore aujourd’hui, il a gardé ses bonnes vieilles habitudes lorsqu’il décrit des matchs des Blue Jays ou du baseball majeur.
Sa façon de se comporter avec les spectateurs et les auditeurs m’a aussi fasciné. La proximité que nous avions avec les amateurs faisait en sorte que Jacques signait beaucoup d’autographes, serrait une tonne de mains et prenait énormément de photos. Et il le faisait toujours avec plaisir et gentillesse. Même qu’il m’obligeait à être des photos, parce que nous étions des partenaires. De la classe, jusqu’au bout des ongles.
Cet honneur pour le Temple de la renommée du baseball canadien est amplement mérité. Jacques a tellement fait pour le baseball au Québec et au Canada et il a eu un impact positif sur tellement de personnes. Et sans oublier qu’il fait partie de ceux qui ont francisé le baseball et qui nous permettent de décrire l’action aujourd’hui, sans utiliser d’anglicismes et de respecter notre langue française.
Jacques, j’espère que tu profiteras pleinement de cet honneur bien mérité et j’ose croire et espérer que le prochain arrêt sera à Cooperstown, au Temple de la renommée du baseball majeur, parce que tu le mérites amplement.
Au nom de tous les amateurs de baseball au Québec, merci pour tout!