Gaza coupée du monde
Des frappes sans précédent ont coupé les communications, alors que l’armée israélienne étend ses opérations
Olivier Faucher
Communications coupées, bombardements sans précédent, opérations terrestres « étendues » : l’étau d’Israël sur la bande de Gaza s’est considérablement resserré ce vendredi, faisant craindre le pire pour le sort de ses millions d’habitants.
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L’armée a indiqué, vendredi, qu’elle avait intensifié ses frappes « d’une manière très significative » en soirée sur l’enclave palestinienne, où elle compte « étendre » ses opérations terrestres.
Ces frappes, très intenses selon des images de l’AFP, ont atteint une ampleur inédite depuis le début de la guerre déclenchée par l’attaque sanglante du Hamas sur le sol israélien il y a trois semaines, a indiqué la télévision publique israélienne Kan.
De son côté, le Hamas a fait état dans un communiqué de « violents combats » en soirée dans le nord de la bande de Gaza.
L’État hébreu n’a pas confirmé si cela constituait le déclenchement de l’invasion terrestre à laquelle son armée se prépare depuis maintenant près de trois semaines, avec des milliers de soldats et des centaines de véhicules blindés déployés à la frontière du territoire palestinien.
« Si Nétanyahou [premier ministre d’Israël] a décidé d’entrer [avec son armée] dans Gaza ce soir, la résistance est prête », a déclaré vendredi Izzat al-Rishq, haut responsable du bureau politique du Hamas.
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— Saudi News FR (@SaudiNewsFR) October 27, 2023
📹 Les bombardements s'intensifient au nord de #Gaza cette nuit et personne n'est épargné des crimes de guerre flagrants de l'occupant israélien. #Palestine#PalestineGenocidePeople#PalestineWillBeFree #GazaHospital… pic.twitter.com/PuhIgTuYlP
Silence radio à Gaza
Israël, qui impose un siège total à la bande de Gaza depuis trois semaines, a mené, vendredi, des frappes qui ont coupé les réseaux téléphoniques et internet de deux opérateurs de télécommunications palestiniens majeurs, selon ce que ces derniers ont affirmé.
Les journalistes de l’AFP ont expliqué qu’ils ne pouvaient communiquer que dans les zones où ils captaient le réseau israélien.
« Nous avons perdu le contact avec notre personnel à Gaza, avec les établissements de santé, les agents de santé et le reste de nos partenaires humanitaires sur le terrain », a publié sur X (anciennement Twitter), vendredi, le directeur général de l’Organi-sation mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus.
De nombreuses autres ONG ont également rapporté qu’elles ne pouvaient plus communiquer avec leurs équipes sur le terrain.
« Sans un changement fondamental, la population de Gaza va subir une avalanche sans précédent de souffrances humaines », a alerté le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU), Antonio Guterres.
Cessez-le-feu demandé
L’Assemblée générale de l’ONU a adopté, vendredi, une résolution déposée par la Jordanie réclamant un cessez-le-feu dans la guerre entre Israël et le Hamas.
Le texte qui a reçu 120 voix pour, 14 contre et 45 abstentions (dont le Canada) demande une « trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue », à ce que toutes les parties respectent le droit international et une aide continue et sans entrave dans la bande de Gaza.
Vives tensions à l’ONU
En outre, la résolution demande de relâcher « immédiatement tous les civils détenus illégalement », sans toutefois mentionner le Hamas comme le groupe les ayant capturés.
« Honte à vous ! » a lancé l’ambassadeur israélien à l’ONU en réaction au vote qu’il a qualifié « d’infamie ».
L’État hébreu et les États-Unis ont dénoncé la motion, à laquelle ils ont reproché de ne pas contenir de critique explicite du Hamas.
Quelques heures plus tôt, le Canada avait d’ailleurs introduit un amendement pour inclure dans le texte un langage plus dur à l’égard du Hamas, mais la proposition a été rejetée par l’Assemblée.
– Avec l’AFP
Des sites du Hamas détruits
Une offensive terrestre dans la bande de Gaza surpeuplée inquiète la communauté internationale, et les appels demandant à Israël d'épargner les civils se multiplient.
Les dirigeants de l'Union européenne ont demandé jeudi des «pauses» dans le conflit et l'ouverture de couloirs humanitaires pour faciliter l'acheminement de l'aide internationale.
Le président français Emmanuel Macron a appelé vendredi à une «trêve humanitaire» pour protéger les civils, estimant que la riposte israélienne devait «mieux cibler» les «terroristes».
«Les images que nous voyons d'une population qui souffre à Gaza, et surtout des enfants [...], ça me semble absolument inacceptable», a déclaré vendredi le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, pour qui il existe «un doute légitime» sur le respect par Israël du droit international.
Israël a dit vouloir «anéantir» le Hamas après l'attaque du 7 octobre. Ce jour-là, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, et au dernier jour des fêtes de Souccot, des centaines de combattants du mouvement islamiste s'étaient infiltrés sur le sol israélien depuis la bande de Gaza, semant la terreur.
Selon l'armée israélienne, 229 otages, israéliens, binationaux ou étrangers, ont été emmenés dans la bande de Gaza par le Hamas, qui a relâché quatre femmes depuis.
Le Hamas a estimé jeudi que «près de 50» otages ont été tués dans les bombardements israéliens.
«Des miettes»
Depuis le 21 octobre, 74 camions d'aide humanitaire sont arrivés depuis l'Égypte dans la bande de Gaza, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) jeudi soir, quand il en faudrait au moins cent par jour, selon l'ONU.
«Ces quelques camions ne sont rien d'autre que des miettes qui ne feront aucune différence» pour la population, a lancé Philippe Lazzarini.
L'UNRWA a annoncé avoir «réduit ses opérations de manière significative», en raison des bombardements et du manque de carburant, tandis que 12 des 35 hôpitaux de la bande de Gaza ont dû fermer.
Ce territoire pauvre soumis à un blocus israélien terrestre, aérien et maritime depuis que le Hamas y a pris le pouvoir, est placé depuis le 9 octobre en état de «siège total» par Israël, qui y a coupé l'eau, l'électricité et l'approvisionnement en nourriture.
Depuis le 15 octobre, l'armée israélienne appelle la population du nord du territoire, où les bombardements sont les plus intenses, à évacuer vers le sud. Au moins 1,4 million de Palestiniens ont fui leur foyer depuis le début de la guerre, selon l'ONU.
Mais les frappes continuent aussi de toucher le sud, où sont massés plusieurs centaines de milliers de civils près de la frontière égyptienne fermée.
Selon l'ONU, quelque 30 000 déplacés ont cependant regagné ces derniers jours le nord du territoire.
«Nous retournons pour mourir dans nos maisons. Ce sera plus digne», a affirmé Abdallah Ayyad, qui après s'être réfugié dans un hôpital à Deir el-Balah, retourne à Gaza-ville, avec sa femme et leurs cinq filles, serrés dans la remorque d'un triporteur.
Frappes américaines
La communauté internationale redoute un embrasement régional, alors que l'Iran, puissant soutien du Hamas, a lancé plusieurs avertissements aux États-Unis, alliés d'Israël.
Les États-Unis ont mené des frappes jeudi contre deux installations utilisées par les Gardiens de la révolution iraniens et des «groupes affiliés» dans l'est de la Syrie.
La tension est très vive aussi en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, où plus de cent Palestiniens ont été tués dans des violences depuis le 7 octobre, ainsi qu'à la frontière nord d'Israël avec le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah, soutenu par l'Iran et allié du Hamas.
Plusieurs milliers de personnes ont de nouveau manifesté vendredi en Cisjordanie occupée et dans plusieurs pays arabes en soutien aux Palestiniens de Gaza.
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