Ingérence étrangère: l’enquête présidée par la juge Marie-Josée Hogue
Anne Caroline Desplanques
OTTAWA – Une juge québécoise qui a déjà fait au moins un don au Parti conservateur du Canada mènera l’enquête publique sur l’ingérence étrangère réclamée depuis des mois par tous les partis d’opposition fédéraux.
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Après des mois de recherche, c’est finalement la juge Marie-Josée Hogue de la Cour d'appel du Québec qui a accepté cette tâche.
«La Juge Hogue aura pour tâche d’examiner et évaluer l’ingérence de la Chine, de la Russie et d’autres acteurs étatiques ou non étatiques étrangers (...) afin de confirmer l’intégrité des élections générales de 2019 et 2021», a annoncé le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc.
Le ministre a souligné qu’elle aura «tous les outils pour aller au fond des choses» et pour faire ses recommandations et qu’il lui reviendrait de décider quelles portions des audiences seraient devant les caméras.
La magistrate entrera en poste de 18 septembre et devra livrer un rapport intérimaire d’ici le 29 février 2024, puis un rapport final d’ici le 31 décembre 2024.
Bien qu’elle ait fait un don de 1000$ au Parti conservateur en 2015, d’après les registres d’Élections Canada, Mme Hogue a été nommée avec l’assentiment de tous les partis d’opposition et bénéficie donc de la confiance de toute la Chambre, contrairement à David Johnston forcé de démissionner en juin du poste de rapporteur spécial sur l’ingérence étrangère.
Le chef conservateur Pierre Poilievre a cependant prévenu le gouvernement qu’il n’enterrait pas la hache de guerre pour autant.
«Bien que nous acceptions le mandat et la commissaire pour cette enquête, nous n’hésiterons pas à les (les libéraux) rappeler à l’ordre si ce processus n’apporte pas de vraies réponses aux Canadiens», a-t-il dit.
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«C’est une femme hyper compétente. On est très très content, vraiment», a déclaré le leader en Chambre du Bloc Québécois, Alain Therrien. «La juge Hogue possède non seulement l’expertise et les qualités recherchées pour ce mandat, mais elle dispose également de l’indépendance que nous souhaitions», a-t-il poursuivi.
Entrée au Barreau du Québec en 1987, la juge Hogue a développé une expertise dans les litiges liés au droit des sociétés, le contentieux des affaires civiles et la responsabilité professionnelle, en plus de consacrer une partie de sa pratique aux litiges de droit administratif et de droit constitutionnel.
Le ministre LeBlanc juge positivement le fait qu’elle n’ait pas d’expérience spécifique en matière d’ingérence étrangère, ce qui lui donne «un regard frais» sur cet enjeu, a-t-il dit.
La Faculté de droit de l’Université de Sherbrooke, où elle a étudié puis enseigné, ne tarit pas d’éloges à son égard. Il s’agit d’une «femme intègre, ouverte d’esprit et d’une intelligence remarquable», qui «s’impose par son calme, sa retenue, son assurance et ses compétences», écrivait-elle en 2017.
Sa nomination intervient trois mois après la démission de M.Johnston. En mai, l’ex-gouverneur général avait publié un rapport dans lequel il excluait la tenue d’une enquête publique et recommandait plutôt diverses réformes et la tenue d’audiences publiques pour sensibiliser la population.
Près de 40 ans de carrière
Au cours de sa longue carrière, Marie-Josée Hogue a plaidé devant toutes les instances judiciaires du Québec, la Cour suprême du Canada et des tribunaux d’arbitrage nationaux et internationaux.
- 1986 diplômée du baccalauréat en droit de l'Université de Sherbrooke
- 1987 admise au Barreau du Québec
- 1987 à 2014 associée au cabinet Heenan Blaikie
- 1988 à 1989 clerc de l'honorable juge Antonio Lamer de la Cour suprême du Canada
- 1991 à 1995 chargée de cours à la maîtrise en droit de la santé, Université de Sherbrooke
-Avec le Bureau d’enquête
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