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L'article provient de 24 heures

3 activistes québécois nous parlent des impacts de la mort de George Floyd, 2 ans après

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Photo portrait de Anne-Lovely Etienne

Anne-Lovely Etienne

2022-05-25T10:00:00Z
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Deux ans se sont écoulés depuis la mort tragique de George Floyd, qui a eu des répercussions partout dans le monde, incluant au Québec. Pour l’occasion, le 24 heures a rencontré trois voix engagées de la communauté noire d’ici, qui partagent un bilan ni tout noir ni tout blanc des impacts que ç’a eu.  

• À lire aussi: Histoire: le mouvement Black Lives Matter en 7 dates

Anastasia Marcelin  

Militante et fondatrice de la Ligue des noirs nouvelle génération 

Anastasia Marcelin
Anastasia Marcelin Photo courtoisie

Devenue activiste après que son frère soit victime de profilage racial à Montréal-Nord, Anastasia Marcelin a créé l’organisme la Ligue des noirs nouvelle génération. Elle est aussi l’instigatrice de la deuxième marche Black Lives Matter, qui a eu lieu à Montréal au printemps 2020. 

Est-ce que le symbole fort d’un Noir asphyxié sous un genou d’un policier blanc a changé les mentalités au Québec?

 «Je veux être sincère avec toi! Cela n’a pas changé à 100%, mais on est à la moitié. Je trouve que les gens sont plus portés à dénoncer qu’auparavant. Nos parents vivaient l’injustice dans le silence. Personne ne disait rien», raconte-t-elle. 

«Aujourd’hui, on est capable de mettre les mots sur le profilage racial et ce n’était pas quelque chose de connu de tous avant», croit l’activiste. 

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Que faut-il faire pour promouvoir l’inclusion et la justice sociale?

«Il faut plus de policiers noirs au sein du corps de la police pour comprendre la réalité des Noirs. Si deux Noirs se tiennent ensemble, cela ne veut pas dire qu’ils viennent d’un gang de rue. Il faut avoir une compréhension d’un certain quartier X ou Y et des différentes réalités culturelles», avance-t-elle. 

As-tu espoir d’un réel changement pour les futures générations?

«J’ai une fille d’un an. Ce n’est pas un changement qui se fera du jour au lendemain, mais rappelez-vous, il fut un temps les femmes ne pouvaient même pas voter! Mais aujourd’hui, elles sont indépendantes. Est-ce parfait? Non. Toutefois, il y a un chemin qui a été fait et j’imagine que ce sera le cas pour l’égalité et le racisme», note-t-elle.  

• À lire aussi: Le mot «woke» bientôt dans le dictionnaire: d’où vient le terme et que veut-il dire aujourd’hui

*

Renzel Dashington  

Humoriste engagé, cofondateur des Bad Boys du Rire  

Renzel Dashington
Renzel Dashington Photo courtoisie

Sur TikTok et Instagram, l’humoriste Renzel Dashington a créé des vidéos très engagées pour dénoncer la violence des policiers à l’égard des hommes noirs. Ayant craint lui-même pour sa vie lors d’une arrestation musclée, Renzel a animé durant 24 heures deux web-o-thon en collaboration avec la Clinique juridique Saint-Michel, en aide aux victimes de profilage racial. 

Est-ce que le symbole fort d’un Noir asphyxié sous un genou d’un policier blanc a changé les mentalités au Québec?

«Pour moi, c’est du pareil au même. J’appelle ça des efforts performatifs, c’est-à-dire que les instances gouvernementales ont pris la parole et les entreprises ont fait des actions pour se donner bonne conscience», estime-t-il.  

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«Les personnes de couleur sont interpellées quatre fois plus que les personnes blanches [NDLR : personnes noires et autochtones interpellées par le SPVM, d’après un rapport produit par des chercheurs indépendants en 2019]. Dans les 5 dernières années, nomme-moi une action ou une loi concrète pour protéger des personnes comme moi, de la part du gouvernement», poursuit-il. 

Que faut-il faire pour promouvoir l’inclusion et la justice sociale?

«Arrêtons les gestes sporadiques pour se donner bonne conscience! Ils sont rarement ancrés dans les véritables besoins», dit-il. 

«Par exemple, en humour, le Bye Bye 2020 a invité pour la première fois de l’histoire des créateurs noirs à participer et à écrire... Ces gens-là ont créé un numéro qui a même gagné un prix Gémeaux», relate l’homme comique.  

«L’année suivante, personne de ces gens-là n’a été invité à écrire sur le Bye Bye 2021. Le ratio est revenu ce qu’il était. Il n’y avait plus personne derrière la caméra», remarque-t-il. 

As-tu espoir d’un réel changement pour les futures générations?

«En 2007, un reportage du Journal de Montréal rapportait que 59% des Québécois se disaient racistes à des points de vue différents. Aujourd’hui, lorsque je reçois des vidéos de maltraitance policière, 80% d’entre elles viennent de personnes blanches», rapporte celui qui lance son premier one-man-show au Ausgang Plaza à Montréal, le 26 mai prochain. 

«Grâce à Internet, on ne peut pas faire abstractions des bobos et de la maltraitance. Internet nous a donné de le pouvoir de s’ouvrir les oreilles. C’est un outil qu’on n’avait pas avant», conclut-il. 

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Vanessa Destiné  

Journaliste, chroniqueuse et animatrice 

Vanessa Destiné
Vanessa Destiné Photo courtoisie

Durant toute la foulée du Black Lives Matter, Vanessa Destiné a participé à un débat nécessaire sur le mot qui début en N, notamment à l’émission Tout le monde en parle, en plus d’être aux commandes de l’émission Décoloniser l’histoire. Elle se proclame à la blague «prêtresse woke», et la justice sociale et le féminisme intersectionnel font partie des enjeux qu’elle porte dans les médias québécois.  

Est-ce que le symbole fort d’un Noir asphyxié sous un genou d’un policier blanc a changé les mentalités au Québec?

«Je pense que le BLM a ouvert les yeux des gens sur la différence entre le simple fait de "ne pas être raciste" et l'antiracisme. On doit jouer un rôle actif lorsqu'on est témoin d'un acte raciste», avance-t-elle. 

«Cela a aussi aidé à amorcer la discussion sur les réalités autochtones, car il est impossible de parler de racisme sans parler des Autochtones. Et donc, ce mouvement a aidé la majorité silencieuse à prendre conscience des injustices sociales», dit-elle. 

Que faut-il faire pour promouvoir l’inclusion et la justice sociale?

«Je trouve que la place médiatique accordée à ce sujet, notamment en publicité a forcé les décideurs culturels, économiques et politiques à emboîter le pas d’exposer des scénarios qui mettent en vedette les personnes discriminées», observe-t-elle. 

«Je crois donc que le changement passe notamment par la culture», croit-elle. 

As-tu espoir d’un réel changement pour les futures générations?

«Hmmmm... Chaque fois, que l’on fait de la place à des nouvelles voix ou de nouvelles perspectives sociales, on nous accuse de censure. Je pense que les gens – chroniqueurs, élite intellectuelle médiatique et politique, prennent les discours progressistes pour des blessures d’ego et pour atteintes à la liberté d’expression. Ce sont des gens qui ne supportent pas qu’on leur dise qu’ils n’ont pas toujours raison», avise-t-elle. 

«Et on en connaît énormément...e.ils se sentent attaqués et c’est comme ça qu’on voit le retour de la théorie du grand remplacement ou le mouvement Stop Woke Act, dont on ne parle pas assez dans les médias d’ici», juge-t-elle. 

«Toutefois, ce que je vois en journalisme et sur le terrain est différent. Les gens sont plus ouverts dans la rue que dans les salles de nouvelles», s’exclame-t-elle. 

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