Guy Lafleur: après les pleurs, les sourires
Yvon Lambert et Réjean Houle racontent des anecdotes sur leur grand ami
Jean-François Chaumont
Le numéro 10 scintillait au-dessus du cercueil fermé de Guy Lafleur lors de la première journée de la chapelle ardente au Centre Bell.
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À la gauche de la bannière, il y avait les trophées Art-Ross, Ted-Lindsay, Hart, Conn-Smythe, la coupe Stanley et un hélicoptère, une grande passion du Démon blond. À la droite, on retrouvait les membres de la famille du défunt qui recevaient les condoléances de la population.
La scène était solennelle. C’était sobre, mais beau en même temps.
« C’est beau à l’intérieur du Centre Bell, a dit Yvon Lambert. Je trouve ça remarquable. C’est Guy Lafleur, c’est grandiose. »
« Je me répète depuis une semaine. Mais c’est réellement sérieux. Avec les gens qui attendent dehors pour rentrer dans le Centre Bell, c’est une image de la vie de Guy Lafleur, a ajouté Lambert. Il était un homme près du peuple. Il incarnait la générosité et la bonté. »
« Guy était bien quand il faisait plaisir aux gens, a renchéri Réjean Houle. Quand on avait des événements, Guy s’assurait toujours de remettre des souvenirs à tout le monde, aux parents, aux enfants ou aux grands-parents. »
« Guy était heureux de rendre le monde heureux, a ajouté Houle. Parfois, on avait des objets pour la fondation. On en avait quatre ou cinq à donner. Il nous appelait : “J’en veux 50”. Il signait les 50 objets et donnait ça à son monde. Il avait une générosité naturelle. Ça lui faisait du bien. »
Des histoires
Dans la salle de conférence de presse de l’entraîneur en chef au Centre Bell, Houle et Lambert ont raconté avec plaisir des anecdotes au sujet de leur complice et ami.
« Guy Lafleur allait à cent milles à l’heure partout, a rappelé Houle. Cent milles à l’heure quand il partait en voiture pour Québec. Cent milles à l’heure quand il patinait sur la glace et cent milles à l’heure sur la rue Crescent. »
Lambert a interprété cette citation comme une passe parfaite sur sa palette.
« Apparemment, c’est véridique. Guy et Gilles Villeneuve, ont conduit du tunnel Lafontaine au vieux pont de Québec en 58 minutes. La pédale était au fond en tabarouette. »
Une bière à la fois
Auteur du but gagnant en prolongation du 7e match de la demi-finale contre les Bruins de Boston le 10 mai 1979, Lambert avait le sourire dans le visage en rappelant ce moment fort de sa carrière. Lafleur avait marqué le but égalisateur en fin de troisième période lors de cette victoire de 5 à 4.
« Guy m’a mis au monde en 1979, a-t-il lancé. J’ai connu le vedettariat pour 24 heures. J’étais en demande et je réalisais à quoi ressemblait la vie de Guy Lafleur. »
Houle a aussi rappelé le grand cœur de son célèbre coéquipier.
« Quand on gagnait et qu’on sortait quelque part après un match, Guy ramassait toujours la facture. Il refusait de voir les autres gars payer. Il était heureux quand il restait avec nous. »
« Quand tu es une super vedette, on te demande partout, a enchaîné Lambert. Guy Carbonneau l’avait dit, mais il n’a jamais vu Flower venir à un entraînement avec des jeans. Il était toujours bien habillé puisqu’il avait toujours des demandes pour lui. »
« Nous, nous pouvions partir boire une petite bière et manger un repas après l’entraînement. Comme je le dis toujours, nous prenions une bière à la fois. Nous avions besoin de jaser aussi. Nous parlions de notre défaite à nos 15 derniers matchs. »
Pas un joueur de balle
Il y avait le hockey l’hiver, mais aussi des tournées de balle-molle l’été.
« Guy nous coachait à la balle, a mentionné Houle. Ce n’était pas un bon joueur de balle. Malgré tout, quand on arrivait quelque part, tout le monde voulait savoir si Guy était là. »
« Ce n’était pas un bon golfeur ni un bon joueur de balle, mais il était pas pire au hockey, a ajouté Lambert. Larry Robinson était tout un joueur de balle. Pierre Mondou et Ken Dryden aussi, mais pas Guy. »
S’ils ont laissé couler plusieurs larmes sur leurs joues lors des derniers jours, Lambert et Houle avaient le cœur plus léger en cette journée de recueillement.
« Je connais Guy et je sais qu’il voudrait nous voir sourire », a dit Lambert.