Guillaume Cyr confie que devenir père a changé l’acteur qu’il est
Michèle Lemieux
Voilà près de 20 ans que l’on voit la carrière de Guillaume Cyr évoluer. Il enchaîne les projets à succès comme Une autre histoire, Léo, Le bonheur et Bellefleur. Maintenant, c’est dans Indéfendable qu’il donnera des frissons au public québécois. Rencontre avec un acteur de grand talent.
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Guillaume, tu arrives dès le début de la nouvelle saison d’Indéfendable. Que peux-tu nous dire sur ce nouveau personnage?
Je joue Adam Benoit, un grand chef connu du public, car il fait de la télé depuis plusieurs années avec sa femme. C’est un peu un croisement entre Ricardo et Martin Picard, finalement! (rires) La grande différence est qu’Adam est accusé du meurtre de sa femme. Mais est-il vraiment coupable?
Je me trompe ou c’est très rare qu’on te voit incarner des personnages violents?
En effet. J’ai joué quelques fois les méchants ou les hommes violents au cinéma, mais c’est la première fois à la télé. Cela dit, il faut faire la part des choses. Mon personnage a commis un geste épouvantable, mais il affirme qu’il n’a aucun souvenir de ce qui s’est passé. Toute cette histoire est très complexe. Il n’est peut-être pas la crapule qu’on pense. L’histoire est vraiment bonne, et je sais que le public va vite embarquer dans cette intrigue.
Comment as-tu obtenu ce rôle?
Ces temps-ci, on obtient rarement des rôles sans passer d’auditions, mais pour Indéfendable, on me l’a offert sur un plateau d’argent. On m’a approché en me disant que la production voulait un bon comédien pour incarner ce personnage dans une intrigue très complexe. J’ai évidemment été très flatté, alors j’ai sauté à pieds joints dans le projet.
Bravo! J’imagine qu’avec une telle intrigue, il y a eu des scènes de violence difficiles à tourner... Est-ce que ça demande une certaine préparation?
Parce que mon personnage ne se souvenait pas d’avoir commis un tel crime, je pouvais y aller sans trop de préparation. Adam est lui-même dépassé par les événements, je n’ai donc pas eu à me préparer ou à faire de la recherche comme je l’aurais fait si j’avais incarné un tueur en série ou un homme violent.
Indéfendable est une quotidienne, c’est une grosse machine qui roule vite. Comment as-tu vécu cette expérience?
Je savais dans quoi je m’embarquais, car j’ai joué dans la dernière saison de 30 Vies, ainsi que dans Clash, à Vrak. Le rythme d’une quotidienne, je connaissais ça. C’est vrai que ça va vite, mais en même temps, ça se passe tellement bien sur le plateau. Sur Indéfendable, j’ai tout de suite senti que j’étais le bienvenu. L’ambiance était bonne, j’ai eu du fun. Et je tiens à souligner à quel point Sébastien Delorme a été accueillant et bienveillant. Avec moi, mais aussi avec tout le monde sur le plateau. Il veut absolument qu’on vive une belle expérience et ça se voit.
Tu disais ne pas avoir souvent joué le méchant, mais entre le bon gars et le «pas fin», lequel préfères-tu incarner?
C’est certain que de jouer un méchant, un pas fin, un tout croche, c’est plus coloré que d’incarner un simple bon gars. Celui-là peut même être un peu plate et unidimensionnel du point de vue d’un acteur. Cela dit, plus je vieillis — et surtout depuis que j’ai des enfants —, plus je me rends compte que je ne jouerais plus n’importe quel méchant. Le dernier était Roland, dans le film Nos belles-soeurs. Je ne pouvais pas dire non à ce genre de projet. Jouer du Michel Tremblay au cinéma, ça ne se refuse pas. Mais si on me demandait d’incarner un personnage violent, surtout à l’endroit d’enfants, c’est clair que je passerais mon tour. Je ne plongerais pas dans ce genre d’univers.
C’est très logique. Donc le fait d’être devenu père influence l’acteur que tu es?
Absolument! Mon jeu d’acteur est tellement relié à l’homme que je suis. Dès que j’ai eu des enfants, mon jeu a changé. Il y a quelque chose qui s’est déposé. La maturité s’installe, et l’égo disparaît. En tant qu’homme, plus je vieillis dans mon métier, meilleur je deviens, notamment grâce à mes rôles. Tout ça est d’ailleurs paradoxal, car c’est un métier où on valorise beaucoup la jeunesse et l’apparence physique. Malheureusement, les femmes ne vivent pas toujours la même expérience. Si elles deviennent aussi meilleures avec les années, elles perdent parfois des rôles forts en raison de leur âge. Chose certaine, j’ai joué beaucoup dans les dernières années et je me sens très privilégié.
Ils sont encore jeunes, mais as-tu remarqué si tes enfants avaient la fibre artistique?
Mon fils aura 10 ans bientôt, et il voulait être acteur jusqu’à ce que je l’amène sur un plateau de tournage. Il a trouvé ça tellement long et plate qu’il a changé d’idée! (rires) Ma fille, qui approche les cinq ans, développe beaucoup ses aptitudes en danse et en dessin. Alors jusqu’à présent, je dirais qu’elle a une bonne fibre artistique. Peu importe ce qu’ils choisiront de faire dans la vie, je les encouragerai. J’ai eu la chance d’avoir le soutien de mes parents et je sais à quel point ça fait une belle différence.
Y a-t-il un genre de personnage que tu n’as pas encore eu la chance d’incarner et que tu aimerais jouer?
C’est étonnant, mais je n’avais pas encore joué de policier dans une série et, tout ce que je peux dire — car ce n’est pas encore annoncé —, c’est que ça va se passer cet automne. C’est le genre d’idée que j’avais lancé dans l’univers. Après avoir passé une très belle audition, j’ai eu le rôle que je voulais. On commence les tournages dans les prochaines semaines, alors c’est à suivre...
Très hâte de savoir de quoi il s’agit. Guillaume, réalises-tu que tu souligneras tes 20 ans de carrière en 2025?
Je sais. Nos jours heureux, dans lequel j’ai tenu mon premier rôle à vie, était un film français, en 2005. Mais j’ai officiellement terminé l’école de théâtre en 2007. Quand j’y pense, le temps fly, ça n’a pas de sens! (rires)
C’est vrai! Et comment décrirais-tu l’évolution du milieu dans les 20 dernières années?
C’est fou et même inquiétant de constater à quel point notre milieu a changé. J’ai l’impression que les belles années de la télévision remontent à avant ma sortie de l’école. Je crois être arrivé alors que la pente descendante était déjà entamée. J’adore mon métier, mais je vois que les conditions sont de moins en moins bonnes, que certains aspects se détériorent. En revanche, je peux dire que la qualité de nos séries et de notre cinéma est exceptionnelle! On n’a rien à envier aux Américains, ne serait-ce que pour le budget qu’ils ont. Je crois qu’on n’a jamais fait de séries télé d’une aussi grande qualité. On a vraiment du grand talent au Québec!
Indéfendable, du lundi au jeudi 19h, à TVA. Nos belles-soeurs est à l’affiche au cinéma. Bellefleur est disponible sur Crave.