GES: les États-Unis et d’autres pays riches ont causé des billions $ en dommages ailleurs dans le monde
Andrea Lubeck
Les grands pays pollueurs ont causé des billions de dollars en dommages à d’autres pays en raison de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), révèle une étude qui évalue pour la première fois la responsabilité des États dans l’aggravation de la crise climatique.
• À lire aussi: Y a-t-il encore des climatosceptiques au Canada?
• À lire aussi: Pétro-masculinité: quand brûler du gaz dans un gros char est synonyme de virilité
Et nos voisins du sud sont les cancres en la matière. Les émissions de GES des États-Unis ont provoqué de tels dommages, comme des vagues de chaleur et de mauvaises récoltes, dans des pays pour la plupart pauvres, que l’étude évalue la perte de revenus mondiaux à 1,91 billion de dollars depuis 1990, rapporte le quotidien britannique The Guardian.
En plus du pays de l’oncle Sam, la Chine, l’Inde, le Brésil et la Russie ont également contribué à la dégradation du climat dans les deux dernières décennies. Ils sont responsables d’un total de 6 billions de dollars de pertes dans le monde.
«C'est un chiffre énorme», a déclaré Chris Callahan, chercheur au Dartmouth College et auteur principal de l'étude, à propos de la perte économique globale, en entrevue au Guardian.
• À lire aussi: Cryptomonnaies: «un problème croissant» pour le climat
«Pour la première fois, nous pouvons montrer que les émissions d'un pays sont à l'origine de dommages spécifiques», a-t-il ajouté.
«C'est une étape positive que cette étude commence à quantifier les préjudices de ces acteurs nationaux; nous pouvons voir que l'échelle des préjudices est énorme», a pour sa part souligné Carroll Muffett, directeur général du Center for International Environmental Law, au Guardian.
Les pays riches moins touchés
Sur le plan économique, ce sont les pays riches de la latitude nord, comme ceux d’Amérique du Nord et d’Europe, qui souffrent le moins des changements climatiques, alors qu’ils y sont les plus grands contributeurs, révèle l’étude.
À l'inverse, les pays plus pauvres, situés sous les tropiques ou les îles basses du Pacifique, sont ceux qui nuisent le moins aux autres nations avec leurs émissions de GES. Ce sont pourtant eux qui subissent davantage de conséquences des changements climatiques.
• À lire aussi: Pour réduire la pollution, les Pays-Bas limiteront les vols vers Amsterdam
Si les chercheurs de Dartmouth ont utilisé plusieurs facteurs pour réaliser leur étude, comme les émissions de GES, les conditions climatiques locales et les changements économiques, l’analyse ne tient pas compte d’éléments non économiques, comme la perte de biodiversité, les dommages culturels et les décès liés à des catastrophes. Cela signifie donc que le bilan est en réalité plus lourd.
«Dans les endroits où il fait déjà chaud, il est de plus en plus difficile de travailler à l'extérieur, la mortalité due à la chaleur est en hausse et il est plus difficile de cultiver», a déclaré Justin Mankin, géographe à Dartmouth et coauteur de l'étude.
«Il y a cette énorme inégalité, a-t-il ajouté. Des pays comme les États-Unis ont causé des dommages disproportionnés aux pays à faible revenu du sud de la planète et cela a profité de manière disproportionnée aux pays plus froids et à revenu plus élevé du nord de la planète.»
Pas de compensation financière en vue
Malgré les pressions de pays en développement et de groupes de défense du climat, il est peu probable que des paiements pour «pertes et dommages» soient versés aux pays les plus affectés par les changements climatiques.
Les États-Unis, imputables d’environ le quart de toutes les émissions à ce jour, s’opposent à la création d’un tel fonds, par crainte d’être tenus responsables des conséquences de leur dépendance aux combustibles fossiles.
• À lire aussi: Injustice: «Nous ne sommes pas tous égaux devant les changements climatiques»
Les pays riches n’ont d’ailleurs pas tenu leur engagement de verser 100 milliards de dollars d’aide climatique aux pays vulnérables par an, entre 2020 et 2025, comme convenu dans l’accord de Paris.
«Le principal obstacle aux réclamations d'un pays contre un autre pour des dommages climatiques n'est pas leur fondement scientifique, mais leur fondement juridique», a déclaré Michael Gerrard, directeur du Sabin Center for Climate Change Law de la Columbia Law School. C’est que la plupart des pays en cause ne reconnaissent pas la juridiction de la Cour internationale de justice de La Haye, qui permettrait d’emprunter la voie juridique pour obtenir des dommages et intérêts en lien avec la crise climatique.
• À lire aussi: L’autre crise qui nous guette: celle de la biodiversité
«Les pays bénéficient d'une immunité souveraine contre la plupart des types de poursuites, sauf s'ils y ont renoncé», a-t-il ajouté.