Fini l’analyse de la COVID dans les eaux usées
Nora T. Lamontagne | Journal de Montréal
Des chercheurs québécois dénoncent l’abandon récent de la surveillance de la COVID-19 dans les eaux usées de la province, faisant valoir son utilité pour anticiper les vagues d’infections.
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« Si on avait eu ces données-là, on aurait vu la montée des cas plus tôt. Peut-être que François Legault n’aurait jamais autorisé 20 invités à Noël et se serait plutôt dit “il y a quelque chose qui s’en vient” », fait remarquer Peter Vanrolleghem, professeur en génie des eaux à l’Université Laval.
Depuis janvier 2021, un projet pilote auquel il participait scrutait la présence du virus dans les égouts de plusieurs grandes villes du Québec.
L’analyse d’un verre d’eaux usées permettait de mesurer la propagation du coronavirus dans la population grâce à sa présence dans l’urine et les selles des malades.
Or, alors que les cas montent en flèche et que le variant Omicron laisse présager le pire, les scientifiques ont dû mettre une croix sur leurs recherches.
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Dernier échantillon
La subvention gouvernementale du projet pilote s’est terminée à la fin juin, et les fonds de recherche des professeurs qui le finançaient depuis sont à sec.
Le dernier échantillon a été prélevé ce vendredi à Montréal, et le 1er décembre à Québec.
« Pourtant, c’est exactement le moment où on aurait besoin de ce type d’analyse », laisse tomber Sarah Dorner, professeure en génie à Polytechnique, qui prenait part à l’étude.
La surveillance de 13 villes pendant 6 mois a coûté 1,5 million, une bagatelle à côté des millions dépensés chaque mois pour dépister individuellement la population.
Bien que le ministère de la Santé « reconna[isse] la validité technique » de l’analyse des eaux usées, il attend un rapport de l’Institut national de santé publique (INSPQ) avant de la recommander.
Ledit rapport ne sera pas publié avant quelques semaines et l’INSPQ a refusé de répondre aux questions du Journal en attendant.
Boule de cristal
Le microbiologiste Marc Hamilton considère que le désintérêt du gouvernement pour cette méthode de détection est « strictement politique ».
Il se l’explique mal, car elle est peu coûteuse, elle sert à détecter les variants et elle est largement utilisée en Europe et dans le reste du Canada, soutient-il.
« C’est le seul moyen efficace qu’on a de prédire le nombre de cas positifs de 3 à 10 jours plus tôt. C’est comme une mini-boule de cristal », dit le scientifique.
À l’aube de la troisième vague dans la ville de Québec, cette surveillance a pesé dans la décision d’augmenter la capacité de dépistage et de traçage, illustre Peter Vanrolleghem.