Fin des bus aux 10 minutes: des usagers grondent
Daphnée Hacker-B. et Audrey Sanikopoulos
Pour illustrer ce qu’ils considèrent être une coupure de service complètement ridicule, des militants en faveur du transport collectif ont organisé de fausses funérailles jeudi matin au centre-ville de Montréal. Ils ont dénoncé la fin du service d’autobus aux 10 minutes, qui était offert sur 31 lignes depuis 2010.
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«Chaque fois que j’attends l’autobus, ça devient de plus en plus long», a lâché Jérémy Steele, qui utilise fréquemment la ligne 24 (Sherbrooke).
Il faisait partie de la vingtaine de Montréalais qui se sont rassemblés jeudi matin sous la neige pour demander plus d’investissements de Québec dans la Société de transport de Montréal (STM).
«Le transport collectif est essentiel pour pas mal de Montréalais et c’est assez ahurissant qu’on puisse juste couper le service comme ça, sans vraiment l’accord de l’opinion collective», a-t-il ajouté.
Début janvier, la STM a mis fin à son offre d’autobus aux 10 minutes lors des heures de pointe. Elle a coupé les huit dernières lignes qui bénéficiaient encore de cette fréquence rapide, qui comptait jusqu’à 31 lignes avant la pandémie.
«J’ai grandi dans la ville de Québec et la ligne Métrobus est vitale là-bas, ce serait inimaginable de lui mettre fin. À Montréal le service aux 10 minutes c’était un peu l’équivalent, c’est désolant, surtout dans un contexte d’urgence climatique», soutient Guillaume Drouin, usager régulier du service de transport en commun.
Cette coupe survient alors que Québec vient d’annoncer un investissement de 296,6 millions $ dans la ligne bleue du métro.
Revenir aux objectifs de mobilité durable
Trajectoire Québec et le Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal) organisaient le rassemblement de jeudi, qui se voulait des «funérailles» symboliques pour le service 10 minutes max.
Un livre de condoléances était donc disponible à l’intersection des rues Jeanne-Mance et de Maisonneuve, où le service avait vu le jour en 2010.
«On a un modèle qui n’a jamais vraiment fonctionné, puis aujourd’hui il est carrément désuet et empêche les transports collectifs de répondre à leur mission», a déclaré Blaise Rémillard, responsable transport et urbanisme du CRE-Montréal.
«Il faut revenir aux objectifs de mobilité durable qui étaient d’augmenter les transports collectifs de 5% par année, pas de baisser de 5%», a-t-il précisé.
Un manque de financement
Plus tôt cette semaine, le président du conseil d’administration de la STM, Éric Alan Caldwell, avait déclaré faire son maximum avec les ressources disponibles.
«On est évidemment très déçu de la fin du réseau 10 minutes max, mais on comprend qu’avec un trou de 78 millions $ dans le budget, il faut faire des ajustements de service», a réagi Sarah Doyon, directrice générale de Trajectoire Québec.
Elle souhaite mettre de la pression sur la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, dans les prochaines semaines.
«Je suis optimiste que [le service] pourrait revenir éventuellement, parce qu’on parle quand même du transport en commun dans notre métropole», a soutenu Anthony Gagné, qui a déménagé près d’une station de métro pour se déplacer plus facilement.
Le service 10 minutes max en chiffres:
– 568 000 usagers transportés sur les 31 lignes du réseau en 2010, soit 60% de l’achalandage quotidien de l’ensemble du réseau de bus.
– 3988 voyages offerts en janvier 2023 avant la fin du service
– Selon Trajectoire Québec et le CRE-Montréal, il s’agit d’une réduction de service de 11,2%
Source: STM, horaire des bus en janvier 2023