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L'article provient de TVA Nouvelles
Justice et faits divers

Explosion des cas de sextorsion à Montréal: trois fois plus de plaintes cette année

La police veut sensibiliser les jeunes

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Photo portrait de Frédérique Giguère

Frédérique Giguère

2023-08-28T04:00:00Z
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Après avoir reçu trois fois plus de plaintes pour des cas de sextorsion cette année, la police de Montréal sonne l’alarme afin de sensibiliser les jeunes et leurs parents à ce type de fraude dévastatrice pour la santé mentale des ados.

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«La tendance est exponentielle, lance le commandant Marco Breton, responsable de la division contre l’exploitation sexuelle au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). On fait affaire avec des victimes isolées, fragiles, vulnérables, dépressives et même suicidaires dans certains cas.»

Marco Breton, commandant de la division contre l'exploitation sexuelle du SPVM.
Marco Breton, commandant de la division contre l'exploitation sexuelle du SPVM. Photo Chantal Poirier

Plus de 100 cas

À pareille date en 2022, les enquêteurs recensaient un peu plus d’une trentaine de dossiers. Cette année, déjà plus de 100 plaintes ont été déposées. 

Dans un cas type, une fraude par sextorsion s’amorce généralement par une victime contactée sur internet par un faux compte.

«La grande majorité des victimes sont des garçons âgés entre 14 et 17 ans, précise le commandant Breton. Les portes d’entrée sont les grands réseaux sociaux qu’on connaît.»

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Dans la majorité des cas, les faux comptes présentent des profils de belles jeunes femmes qui se disent intéressées à voir des photos intimes de leur victime. Si l’ado tombe dans le panneau et envoie des images personnelles, le ton change rapidement. Une somme d’argent sera alors exigée, sans quoi les photos seront envoyées à toute la liste d’amis de la personne piégée.  

  •  Écoutez l'entrevue avec Marco Breton, responsable de la division contre l’exploitation sexuelle au Service de police de la Ville de Montréal au micro via QUB radio :

Rares sont les arrestations

Le problème, c’est que même lorsque les jeunes trouvent le courage de dénoncer à la police, les dossiers d’enquête mènent rarement à des arrestations. Comme le SPVM n’a pas juridiction à l’extérieur de Montréal, toutes les informations recueillies lors des enquêtes sont transmises à la police du pays où vivent les escrocs.  

«On fait affaire avec des gens extrêmement criminalisés et qui sont organisés et généralement outre-mer, explique Christina Vlachos, lieutenante-détective à la section de l’Exploitation sexuelle des enfants sur internet. C’est très rare qu’on reçoive un feedback pour nous dire que quelqu’un a été arrêté.»

Considérant le faible taux de résolution malgré les efforts des enquêteurs, ceux-ci concentrent leurs efforts sur l’accompagnement auprès des victimes et la prévention. Dès qu’ils ont une plainte, les enquêteurs font tout ce qu’ils peuvent pour que l’adolescent soit encadré de façon appropriée et qu’il reçoive du soutien.

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En parallèle, prévenir les parents et les jeunes de ce type de fléau demeure la meilleure façon de l’éviter.

«On mise beaucoup sur la prévention, lance la lieutenante-détective Vlachos. Le but ici, c’est d’ouvrir une discussion entre les parents et leurs enfants. Il faut parler de ces situations-là à nos enfants. Il faut que les canaux soient ouverts.»

Sur une note plus positive, le commandant Marco Breton se réjouit toutefois d’une chose: les parents d’aujourd’hui sont beaucoup plus informés sur les problématiques qu’internet engendre qu’à l’époque.

«Quand moi j’avais des jeunes, je n’étais pas au courant de ces choses-là, admet-il. Aujourd’hui, je pense que les parents sont plus présents dans les cyberactivités de leurs enfants.»

  • Notre journaliste à la recherche Cybèle Olivier discute des enjeux de sextorsion en lien avec l'intelligence artificielle au micro de QUB radio :

L’intelligence artificielle au service de la sextorsion 

Pendant que l’intelligence artificielle soulève les passions aux quatre coins du globe, la police de Montréal remarque qu’elle facilite aussi la vie aux sextorqueurs.

Si les fraudeurs devaient autrefois voler des photos de gens innocents pour créer de faux comptes, voilà que l’intelligence artificielle leur permet maintenant de générer une multitude d’images sans trop de difficulté.

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«C’est un phénomène qu’on remarque, explique le commandant Marco Breton, responsable de la division contre l’exploitation sexuelle au SPVM. Ils sont capables de créer de toutes pièces des images de femmes pour en faire de faux comptes. Ça leur facilite la tâche encore plus.»

Quelques clics suffisent

En plus d’être bien souvent gratuites, ces plateformes d’intelligence artificielle sont facilement accessibles sur le web traditionnel. Quelques clics suffisent pour créer une personne de toute pièce. C’est aussi possible de personnaliser sa demande, par exemple en demandant de générer une image de jeune adolescente à la poitrine plantureuse. 

De plus en plus, les services policiers remarquent une collaboration grandissante des réseaux sociaux quant à la suppression rapide des comptes associés à de la fraude. Mais leur proactivité est parfois contrée par la facilité qu’on les fraudeurs à s’ouvrir de nouveaux comptes. 

En plus de la hausse marquée des plaintes en la matière, le SPVM précise qu’il s’agit probablement que de la «pointe de l’iceberg». D’après l’organisation, une grande proportion des victimes demeurent dans l’ombre, et il est ainsi impossible de mesurer avec exactitude l’ampleur du problème. 

La sextorsion en chiffres:

  • 91% des victimes sont des garçons 
  • 75% des cas sont via Instagram ou Snapchat 
  • Les conversations durent souvent moins de 20 minutes 
  • Les sommes demandées vont jusqu’à 7500$

Source: Cyberaide, statistique de juillet 2022 à janvier 2023

Comment éviter d’être piégé:

  • Avoir un compte privé 
  • Analyser chaque demande d’amitié
  • Ne jamais partager de contenu intime

Quoi faire si on est victime de sextorsion:

  • Faire des captures d’écran puis désactiver son compte immédiatement
  • Cesser toute communication
  • Ne jamais envoyer d’argent 
  • Dénoncer 

Des ressources d’aide pour les victimes ou leurs parents:

Aidez-moi SVP: www.aidezmoisvp.ca

Take it down (anglophonne seulement): https://takeitdown.ncmec.org/ 

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