En thérapie depuis 10 ans, Rosalie Bonenfant avoue ne pas avoir le bonheur facile
Patrick Delisle-Crevier
Elle est arrivée dans le studio toute pimpante et souriante. Faire asseoir cette jeune femme dans notre fauteuil coloré le temps d’un entretien a été un véritable plaisir. Rosalie n’a pas peur de dire les vraies affaires. Généreuse, elle nous a parlé de ses rôles au petit et au grand écran, de sa carrière d’animatrice, de sa mère, de son célibat, de ses thérapies et de bien d’autres choses...
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Rosalie, comment vas-tu?
Ça va bien. Le plus drôle, c’est que je n’ai jamais répondu ça de ma vie.Ce n’est pas un secret: je suis en thérapie depuis 10 ans et je pense que ça commence à porter fruit. Je suis sereine.
Pourquoi 10 ans de thérapie?
Je n’ai pas le bonheur facile et je suis toujours en train de me questionner à savoir si je devrais en faire plus ou en faire moins. On dirait que j’ai appris à me contenter, à être un peu moins dans l’effort de plaire à tout prix. Je ne sais pas si ça vient avec l’âge, mais je me sens plus sereine et moins lourde.
En quoi ton bonheur consiste-t-il?
Il est fait de liberté. Je pense que je suis une petite vagabonde dans l’âme. Je suis faite pour vivre pieds nus, et je me suis acheté un autobus qui est converti en petite maison. Mon «bubus», c’est un fantasme que j’ai imaginé avec un ami alors que nous roulions sur la 40 en revenant d’un festival. On se disait que ça coûte cher de se loger lorsqu’on voyage et que ça nous prendrait un autobus dans lequel nous pourrions dormir. J’ai regardé les petites annonces, et il y en avait un à vendre. Ç’a été un coup de cœur. Il est vert forêt et il a été complètement retapé par un ébéniste. C’est une petite maison sur roues.
Que fais-tu avec ce «bubus»?
Nous partons à l’aventure, sans trop savoir où nous allons. Ça nous rapproche des étoiles aussi, puisqu’il y a une belle terrasse sur le toit. C’est une perle rare, et je suis tellement contente que ce soit ça, ma vie, en ce moment. Je suis aussi heureuse parce que maintenant j’apprends à me laisser transcender par ce qui m’arrive. Avant, j’essayais de le prendre, de le contrôler et d’en faire quelque chose, alors que maintenant je ne me demande plus pourquoi ça m’arrive et, surtout, je ne me demande plus si je le mérite. Je savoure ce qui m’arrive et je réagis de belle façon sans trop me poser de questions. C’est pas mal nouveau pour moi.
«PETITE MADAME»
Cette envie de liberté à tout prix, d’où vient-elle?
J’ai tellement voulu devenir une «petite madame» bien trop tôt! J’ai commencé ma carrière quand j’étais adolescente, et quand mes amis me proposaient d’aller faire un truc de jeune, comme aller aux glissades d’eau, je répondais que je ne pouvais pas parce que j’avais des textes à écrire ou à apprendre. Quand j’avais 19 ans, je m’habillais comme une «petite madame» avec des cols roulés et des lunettes pour qu’on devine mon intelligence.
Pourquoi avais-tu adopté cette image?
Je pense que la «petite madame» voulait absolument réussir. Elle avait une vision très monolithique du succès, alors elle a mis tous ses œufs dans le même panier. J’avais 20 ans, je vivais en appartement avec mon chum des sept dernières années et deux chats, j’avais une carrière et je menais une vie de madame. Là, je vis un peu ma crise d’adolescence. Je suis célibataire et je souhaite profiter de la vie.
Habiter seule après avoir vécu en couple pendant plusieurs années, comment vis-tu ça?
J’ai été en couple avec Miro de 16 à 24 ans. Nous avons encore un super beau lien. Mais j’aime l’idée d’être complètement libre et d’aller vers quelque chose que je ne contrôle pas. Je trouve ça nourrissant parce que pour la première fois de ma vie, je me donne la chance de me laisser surprendre. J’ai réalisé que le bonheur vient beaucoup plus facilement quand tu le laisses arriver plutôt que quand tu le cherches absolument et que tu tentes de le façonner. J’ai fait ça pendant trop longtemps, au point de trouver un bonheur qui n’était pas le mien. J’ai aussi ce syndrome de l’imposteur qui n’est jamais très loin. Je me dis souvent que si ce n’est pas venu avec de l’effort et de la souffrance, j’ai du mal à le valoriser.
Avoir une mère qui fait ce métier et qui s’appelle Mélanie Maynard, c’est un atout ou c’est tout le contraire?
C’est certain que ça joue. Ma mère prend beaucoup de place. Aujourd’hui, je réalise que j’ai grandi dans la lumière de ma mère alors que, pendant longtemps, j’ai pensé avoir grandi dans son ombre. J’essayais donc de me faire plus discrète. Ça aussi, c’est une chose que tu apprends en thérapie: à savoir que tu n’es pas l’extension de tes parents. J’ai compris récemment que j’étais une personne à part entière qui s’appartenait, et ça fait en sorte qu’elle et moi, nous avons un super beau lien maintenant.
Es-tu très proche de ta mère?
Oui. Ma mère a été ma meilleure amie durant une longue partie de ma vie, et ça me gossait. Des fois, je lui demandais d’être ma mère et non mon amie, d’arrêter de me faire confiance et d’être un parent. Ma mère a toujours été une mère super permissive. Parfois, j’aurais voulu qu’elle soit plus autoritaire et qu’elle prenne les rênes plutôt que de me faire confiance. Mais ça m’a permis de devenir responsable trèstôtetjesuisfièredeçaenfinde compte. Aujourd’hui, on se retrouve dans une liberté complète, elle me parle de ce qu’elle vit, et moi aussi. Je pense qu’on est arrivées à un stade où nous sommes deux adultes. Ce n’est plus la mère et l’enfant. Nous sommes deux femmes qui se ressemblent et nous vivons de beaux moments ensemble. J’aime tellement ma mère. Je pense qu’elle va m’aimer encore plus quand je vais faire d’elle une grand-mère, mais elle va devoir prendre son mal en patience parce qu’elle va attendre longtemps.
Quel genre d’enfance as-tu eue?
Une enfance heureuse. Je me souviens que ma mère prenait toujours ma défense par rapport à mon beau-père, qui me trouvait un peu dissipée. Il disait de moi que j’étais une tornade qui n’aimait pas l’autorité. Ma mère lui disait qu’elle aimait mieux avoir une fille qui a trop de caractère qu’une fille qui se laisse piler sur les pieds. J’ai eu une enfance durant laquelle on louangeait tout ce que j’étais. Mais j’ai pogné un petit mur quand je suis arrivée au secondaire, alors j’ai commencé à me déprécier. J’étais un peu tomboy.
Est-ce que tu te déprécies encore?
Disons que c’est encore un chantier, mais oui. Je dois apprendre à apprécier qui je suis et arrêter de me juger. Par exemple, ça fait 13 ans que je vis avec mes troubles alimentaires et je fais mon deuil actuellement de me guérir complètement de ça un jour. C’est encore présent, et j’en parle de plus en plus. Vivre avec un trouble alimentaire et un trouble de l’image de soi, c’est omniprésent! En plus, je fais un métier d’image... Mais ça fait partie de ma vie, et je dois vivre au mieux avec ça. Merci, mon Dieu, pour le Zoloft, qui a changé ma vie! Ce médicament a été pour moi une libération. Oui, je pleure encore chaque jour, mais pour quelque chose de beau, et non parce que je suis déprimée. Je me laisse exister dans toute mon intensité, et ça fait du bien à l’estime.
SOIF DE VIVRE
Veux-tu des enfants?
Je ne le sais pas. J’aurais le goût de faire une période d’essai de 30 jours, mais ce n’est pas possible! Je ne suis pas celle qui souhaite absolument avoir des enfants. Même que l’idée me terrifie. Pourtant, plus jeune, j’en voulais. Mais rendue en âge d’en avoir, je vois mes amis qui en ont et je trouve ça traumatisant. C’est un contrat à vie et, en ce moment, j’ai envie d’être libre. J’ai été en couple longtemps et on dirait que je ne souhaite pas avoir d’attaches pour le moment. J’aime prendre soin des gens autour de moi, mais je ne sais pas si j’ai envie d’un tel engagement à vie avec un petit être.
As-tu un idéal de couple?
Je n’ai pas rencontré l’homme avec un grand H ou la femme avec un grand F, il faut croire, et je ne suis pas non plus convaincue que je sois monogame. Je m’explique très mal pourquoi nous pouvons avoir plusieurs amis dans la vie, mais que nous devons avoir un seul amoureux ou amoureuse à la fois. Pourquoi mettre sur un seul partenaire la pression de combler tous nos besoins? Je trouve que c’est beaucoup demander à quelqu’un. Je crois à l’amour, mais pas aux carcans.
Qu’est-ce qui t’occupe présentement?
J’ai eu la chance de jouer dans la série Aller simple: Survivre. C’était un beau rôle. Il y a aussi l’émission Deux hommes en or et Rosalie qui est de retour. C’est déjà ma quatrième année à l’animation, alors je suis un peu plus dans mes pompes. Je tourne présentement la série Tout le monde s’habille, un nouveau magazine sur les mouvements sociaux vus à travers la loupe du vêtement.
Parle-moi du film Villeneuve, sur la vie de Gilles Villeneuve. Qu’est-ce que cela représente de jouer sa femme, Joann?
C’est emballant, mais c’est aussi terrifiant parce que les gens l’attendent. Je dois surtout ne pas me laisser déconcentrer par le fait que Joann elle-même ira probablement voir le film. C’est le genre de rôle que j’avais sur ma liste, mais plus tard au cours de ma carrière, et non au début. Alors je capote un peu. Mais je suis reconnaissante. Je travaille très fort pour préparer ce rôle et j’ai hâte de tourner.
Aller simple: Survivre, mercredi 20 h, à Noovo.
Deux hommes en or et Rosalie, vendredi 20 h, à Télé-Québec.
Tout le monde s’habille sera diffusée à Télé-Québec en janvier 2024.
La sortie du film Villeneuve est prévue pour 2025.