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L'article provient de 24 heures

L’horreur des pensionnats autochtones les pousse à se faire débaptiser et à tourner le dos à l’Église catholique

Illustration Marilyne Houde
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Photo portrait de Andrea Lubeck

Andrea Lubeck

2021-07-01T13:00:00Z
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Les récentes découvertes de restes d’enfants sur les sites d'anciens pensionnats autochtones au pays, dont plusieurs étaient gérés par l’Église catholique, s’ajoutent à la liste de scandales entourant l'institution religieuse. Et certains considèrent ces événements comme le coup de pied nécessaire pour carrément se faire débaptiser en faisant une demande d’apostasie. 

C’est le cas de Catherine Gendreau, 39 ans, baptisée à Montréal. Elle y songeait depuis plusieurs années, mais les horreurs sur les pensionnats autochtones récemment mises au jour ont été «la goutte qui a fait déborder le vase».

«Jusque-là, ma vie n’était pas trop dérangée par le fait que j’étais malgré moi dans l’Église catholique. Les nouvelles sur les pensionnats autochtones sont ce qui m’a poussée à télécharger le formulaire [de demande d’apostasie] et à l’envoyer», explique-t-elle.

Catherine Gendreau
Catherine Gendreau Photo courtoisie

«Les valeurs de l’Église ne correspondent pas aux miennes à plusieurs niveaux, que ce soit par rapport aux femmes, à la communauté LGBTQ+, aux autochtones ou aux crimes pédophiles», ajoute Catherine Gendreau, soulignant au passage qu’elle n’a rien contre les croyants. «Ce n’est pas la foi, le problème; pour moi, c’est l’institution.»

Se dissocier de l’Église  

De son côté, Jany Tremblay, baptisée comme plusieurs lorsqu’elle était bébé, souligne que malgré le fait qu’elle ait reçu tous les sacrements — «par tradition, je suppose» —, elle ne s’est jamais sentie liée à l’Église, «encore moins lorsqu’on a commencé à dévoiler au grand jour tous les actes d’agressions, d’abus et de pédophilie faits par des prêtres dans les pensionnats».

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«Depuis quelques mois, en prenant connaissance de l’implication des Églises dans le colonialisme, et maintenant avec ces horribles faits qui refont surface, je me suis dit qu’il était temps de me dissocier complètement de cette religion qui a fait tant de mal. Ne plus compter dans les statistiques de l’Église catholique est primordial pour moi aujourd’hui. Ça ne règle rien, ça ne change rien... C’est plutôt un geste symbolique pour exprimer mon empathie, ma compassion et la reconnaissance de l’histoire vécue par les peuples autochtones», note-t-elle.

Démontrer son mécontentement  

Julie, qui désire préserver son anonymat parce qu’elle n’a pas encore annoncé sa décision à sa famille, a également entrepris la démarche d’apostasie pour manifester son mécontentement à propos des récents événements. 

«Je suis révoltée. Je ne veux pas être associée à cette Église qui a maltraité des enfants autochtones pendant plusieurs années. Ça m’insulte aussi de voir que le Vatican refuse de s’excuser. C’est comme se mettre la tête dans le sable face à quelque chose qui est clairement arrivé», soutient celle qui dit ne militer pour aucune cause. L’acte d’apostasie est plutôt sa manière de démontrer sa solidarité envers les peuples autochtones, précise la résidante de Chicoutimi.

Plutôt que d’envoyer un formulaire avec les informations de base, Julie préfère écrire une lettre témoignant des raisons qui la motivent à se dissocier de l’Église. «Je voulais leur dire que, jusqu’à maintenant, je suis restée, mais que [ces événements], c’est l’erreur de jugement de trop; c’est carrément un acte criminel.»

C’est quoi, l’apostasie?  

Selon le dictionnaire, c’est «l’abandon volontaire et public d’une religion, en particulier de la foi chrétienne». 

En pratique, l’apostasie est une démarche procédurale, un acte juridique notarié. Un apostat «perd certains droits», affirme le diocèse de Montréal, comme celui d’assumer le rôle de parrain ou de marraine, d’occuper des postes ou des offices dans la communauté catholique, ou encore d’enseigner dans des instituts catholiques.

Pour apostasier au Québec, il faut écrire à son diocèse, en incluant certaines informations de base, comme son nom et son adresse, mais aussi la date du baptême et la paroisse, et le diocèse où la personne a été baptisée. Deux témoins doivent aussi signer le formulaire. Le processus peut prendre plusieurs mois, selon le diocèse où la demande est envoyée.

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