Des Ukrainiens de Montréal se recueillent en pensant à leurs proches
Gabriel Ouimet
Des dizaines d’Ukrainiens se sont réunis dimanche afin de prier pour leurs proches dans une messe émotive à Montréal, quelques heures après que les bombes russes aient commencé à secouer des quartiers habités de Kiev.
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Reniflements, joues mouillées, accolades : tiraillés entre l’espoir, la tristesse et la peur, plusieurs fidèles ukrainiens de Montréal se sont déplacés pour venir se recueillir au côté du prêtre Volodymyr Kouchnir dans l’enceinte de la Cathédrale orthodoxe ukrainienne Sainte-Sophie à Montréal.
«Gardez espoir, soyez solidaires les uns envers les autres et tentez d’aider vos proches comme vous le pouvez. Je connais le peuple ukrainien, je connais notre pays : nous sommes forts. Nous nous battons pour notre liberté contre un régime malade, aussi malade que le régime d’Hitler l’était. Souvenez-vous que nous sommes du bon côté de l’histoire», leur a insufflé l’homme de Dieu.
Détaillant des histoires rapportées d’Ukraine selon lesquelles des soldats russes auraient fait demi-tour après avoir discuté avec de villageois au moment d’envahir leurs terres, le prêtre a rappelé que «nous sommes tous humains» et a demandé aux fidèles présents de prier pour leurs proches, mais aussi pour que «l’humanité triomphe».
Une dose d’espoir de laquelle avaient bien besoin certains des citoyens interrogés sur place, pour qui les dernières heures ont été éprouvantes. C’est notamment le cas d’Oksana Nyzhyk, rencontrée par le 24 heures quelques minutes après la cérémonie.
Se cacher des bombes
Originaire de la région de Tchernobyl, mais ayant habité plusieurs années à Kiev avant de déménager à Montréal en 2017, Mme Nyzhnyk indique que ce service religieux avait une importance particulière pour elle.
«Ma mère, mon frère, mes oncles, tantes, cousins et cousines, mes nièces... ils sont tous restés à Kiev et Kharvik. Ils doivent maintenant se cacher dans leur cave pour espérer se mettre à l’abri des bombes, puisque l’armée russe a commencé à attaquer de plus en plus de civils. Je leur ai dédié mes prières», détaille-t-elle entre deux sanglots.
Bien qu’elle soit contente des sanctions adoptées par les pays occidentaux contre les banques russes, qui les ont notamment exclues de la plateforme interbancaire Swift, Mme Nyzhnyk implore la communauté internationale à en faire plus afin de protéger les civils ukrainiens.
« Notre armée est très forte, mais la Russie a beaucoup plus de ressources. Il faut que la communauté internationale nous aide à mieux protéger notre espace aérien pour que l’armée russe ne puisse lâcher ses bombes. Nous avons aussi besoin d’une meilleure protection contre les missiles russes qui visent des civils », demande-t-elle.
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Des familles déchirées
Parmi les premiers arrivés dimanche, M. Zenon tenait à venir prier pour « son peuple » après que les attaques russes aient pris de l’ampleur dans les dernières heures.
L’homme dans la soixantaine a aussi de la difficulté à retenir ses larmes lorsqu’il pense à ce que doivent endurer ses proches, plus d’une dizaine, restés en Ukraine. Il évoque notamment les décisions difficiles auxquelles sont confrontées les familles en raison de l’interdiction pour les hommes de 18 à 60 ans de quitter le pays.
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«La fille de mon cousin et son mari ont attendu plus de 24 heures à la frontière polonaise avec leurs trois enfants âgés de 2, 7 et 10 ans. Quand leur tour est enfin arrivé, on a indiqué à son mari qu’il ne pouvait pas passer. Pour elle, c’était inconcevable de quitter son mari pour aller seule avec ses trois enfants en Pologne, donc ils sont restés», dit-il la voie tordue par l’émotion.
Bien que la plupart de ses proches disent être en sécurité, il craint pour ses cousins et leurs fils, puisqu’il rappelle que les hommes, même les plus vieux, seront bientôt officiellement appelés à se battre.
«Ils ont reçu un avis officiellement hier. Ils doivent se préparer parce qu’on cognera bientôt à leur porte pour qu’ils aillent se battre. Ils n’auront que quelques minutes pour dire au revoir à leurs proches. C’est horrible», dit-il.
Maintenant que tout le monde parle du conflit, il entretient également l’espoir que l’Occident vienne en aide à son pays.
«Mes seuls espoirs, ce sont Dieu et les États-Unis. Il y avait déjà eu plus de 14 000 morts depuis le début des conflits en 2014, mais maintenant que tout le monde en parle, j’espère que la communauté internationale interviendra pour protéger les Ukrainiens», dit-il.
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