Des joueurs de la LNH ont raté un méchant gros party


Nicolas Cloutier
On pourrait penser que les projections très emballantes de la Ligue nationale de hockey (LNH) vis-à-vis le plafond salarial, qui pourrait grimper jusqu’à 113,5 millions $ dans les trois prochaines années, font l’affaire de tous les joueurs. C’est faux.
La présente convention collective signée par le syndicat des joueurs et la partie patronale vient à échéance en 2026. Et il sera compliqué pour des joueurs avec des intérêts divergents de faire front commun.
Ce que nous explique le réputé agent de la LNH Allain Roy, c’est qu’il y aura les «haves» et les «have-nots». Autrement dit, les joueurs qui ont déjà signé un contrat à long terme avant la hausse considérable du plafond et ceux qui s’apprêtent à toucher à une augmentation très onéreuse.
Rendons ça encore plus simple : les joueurs déjà sous contrat avant la publication des projections de la Ligue ont l’impression d’avoir raté un méchant party!
«Je pense qu’il devrait y avoir un mécanisme pour compenser ces joueurs-là, plaide Roy au téléphone. Est-ce qu’ils pourraient recevoir une partie des frais d’expansion [Houston et Atlanta ont été mentionnés récemment, NDLR]? Ça pourrait être une façon d’aplanir le terrain pour ceux qui ont manqué la grosse hausse.»
Et il y a une conversation à avoir sur l’escrow. Ah, le fameux escrow. Cette notion demeure obscure pour la grande majorité des partisans. C’est grossièrement de l’argent dans un compte en fiducie pour s’assurer que le partage 50-50 des revenus entre les joueurs et les propriétaires soit respecté, même quand lesdits revenus ne sont pas au rendez-vous pour la Ligue.
«La semaine passée, on se disait que l’escrow, c’était fini pour toujours [comme les proprios ont fini d’être remboursés pour les pertes financières de la pandémie, NDLR], mentionne Allain Roy. À un certain montant, l’escrow peut être à zéro, mais si tu montes trop, l’escrow revient.»
Tout ce qu’il importe de comprendre ici, c’est que, si l’escrow fait un retour, les joueurs qui ont manqué le party ne seront vraiment, mais vraiment pas contents.
«Si un joueur a déjà signé avant la hausse et qu’en plus, une partie de son salaire va à l’escrow, c’est doublement frustrant», explique notre intervenant.
Encore là, des mesures de mitigation peuvent être négociées pour la prochaine convention.
«Est-ce que l’escrow peut être différent pour ceux qui ont signé à partir de 2020, par exemple?», s’interroge Roy.
Au sein des Canadiens, Juraj Slafkovsky et Kaiden Guhle ont signé des contrats importants à long terme l'été dernier. En ce moment, on ne trouvera personne pour dire qu'ils sont sous-payés, mais dans quelques années, s'ils progressent à vue d'œil, on pourrait, qui sait, parler d'aubaine... au même titre que Nick Suzuki est en train d'en devenir une alors que l'on trouvait son salaire exorbitant de prime abord.
Le nouveau plafond va briser les échelles salariales telles qu'on les connaissait.
Chacun tirera la couverture
Ne pensez donc pas que tout le monde négociera dans la paix et le bonheur, car la conjoncture économique est plus encourageante que jamais pour la Ligue et les coffres pourraient être remplis à ras bord par deux expansions. C'est plus complexe.
De la façon que les choses se dessinent, le syndicat pourrait être divisé en trois clans.
«Il y a les gars qui ont déjà signé, commence Roy. Ils vont avoir une opinion différente de ceux qui sont sur le point de signer et qui n’ont pas encore été joueurs autonomes.»
Les joueurs du troisième groupe nous intriguent, puisqu’ils ne peuvent vraiment se faire justice à la table de négociations à moins que quelqu’un ne le fasse pour eux.
«Il y a les recrues qui ne sont pas encore dans la ligue, souligne Allain Roy. Eux, ils n’ont pas vraiment un siège à la table, mais, pourtant, il existe des règlements qui les affectent, surtout une fois qu’ils font leur entrée dans le circuit.»
Par exemple, la convention actuelle prévoit un montant maximal de 950 000$ pour les contrats d’entrée dans la LNH, typiquement d’une durée de trois ans. Ce montant suivra-t-il lui aussi la hausse du plafond?
Pour les Canadiens, ce ne sera pas un enjeu à court terme, puisqu’Ivan Demidov signera sans doute son contrat d’entrée dans la LNH l’été prochain, avant l’échéance de l’actuelle convention collective.
Décidément, les négociations s’annoncent intéressantes.
«C’est presque toujours ça le problème, du côté des joueurs, admet Roy. L’agenda est différent pour les joueurs sous contrat et ceux qui n’ont pas encore signé.»