Denis Talbot a craint l’amputation

Érick Rémy
À voir le sourire qu’il affiche lorsqu’il m’accueille chez lui, jamais on ne pourrait croire que Denis Talbot, le légendaire Grand Talbot et M. Net de MusiquePlus, a vécu, à la fin septembre, les pires moments de sa vie. Un bête accident à la maison qui aurait pu avoir de fâcheuses conséquences...
Regarde ce magnifique gazebo. (Il pointe le doigt en direction de sa porte-fenêtre.) Ma conjointe, Isabelle, et moi l’avons assemblé ensemble. Alors qu’on croyait avoir posé tous les morceaux, on s’est aperçus qu’il nous restait quelques pièces en main.» Denis s’est agenouillé sous la structure pour examiner le plan afin de voir où elles allaient, oubliant que tout n’était pas encore totalement fixé. Un coup de vent a fait tomber l’un des montants du gazebo, qui a percuté sa jambe gauche. «J’ai ressenti une vive douleur, mais, bizarrement, celle-ci s’est rapidement estompée. Je n’avais qu’un léger saignement, alors nous avons pu finir l’assemblage du gazebo. Quelques jours plus tard, parce que la douleur était encore bien présente, je suis allé à l’hôpital. La radiographie n’a décelé aucune fracture. À première vue, c’était une énorme ecchymose qui allait du pied au genou. On m’a suggéré de continuer à mettre de la glace dessus en me disant que le temps ferait son oeuvre.»
De mal en pis
L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais les choses sont allées en empirant. «Plus le temps passait, plus ma jambe enflait. Heureusement, j’ai réussi à avoir un rendez-vous immédiatement avec mon médecin de famille à Marieville. Lors de son examen, il a pris une aiguille hypodermique et a percé un petit trou dans la partie enflée. Un liquide d’une couleur douteuse s’en est échappé. J’ai vu l’inquiétude dans son regard, et il m’a dit de me rendre tout de suite à l’Hôpital Pierre-Boucher. Quand je suis arrivé à l’urgence, un billet de mon médecin en main, on m’a hospitalisé à l’étage sans attendre et administré par intraveineuse des doses massives d’antibiotiques. Les médecins craignaient que je sois atteint de la bactérie mangeuse de chair», raconte l’animateur.
«Une course folle s’est ensuivie afin d’identifier cette bactérie, pour pouvoir m’administrer l’antibiotique qui pourrait la combattre. Quelques heures plus tard, tout le monde a poussé un soupir de soulagement lorsque l’analyse du laboratoire a confirmé qu’il s’agissait d’un staphylocoque plutôt qu’un streptocoque. C’était une bonne et une mauvaise nouvelle, car les staphylocoques ont développé, avec le temps, une grande résistance aux antibiotiques. Encore fallait-il qu’on trouve celui qui fonctionnerait. Pendant ce temps, ma jambe devenait de plus en plus sensible. Le moindre effleurement sur ma peau provoquait des douleurs horribles. On m’a administré de la morphine. La situation devenait critique parce qu’aucun traitement ne faisait encore effet.»
Scénario catastrophe
C’est alors que son imagination s’est emballée. Si les médecins ne trouvaient pas le remède à son mal, allaient-ils être obligés de prendre les grands moyens? «En combattant ma panique, j’envisageais le pire tout en m’y résignant. Malgré ma peur, je n’en ai parlé à personne et surtout pas à Isabelle, qui était à mon chevet. Je ne voulais pas l’inquiéter, mais puisque nous sommes ensemble depuis 25 ans, elle a bien vu la détresse dans mes yeux. Elle m’a demandé ce qui n’allait pas, et j’ai fondu en larmes en lui disant ce que je craignais.»
Le moment présent, c’est maintenant
Après de longs moments d’angoisse qui se sont étendus sur au moins 72 heures, enfin une bonne nouvelle: les médecins avaient trouvé la combinaison gagnante et sa jambe désenflait. «Même si j’étais dans les vapes, je voyais bien que le personnel médical était content. J’avoue que, jusqu’à cet incident, peut-être à cause de toutes les péripéties que j’ai vécues, entre autres avec mon émission Les aventures du Grand Talbot, je m’étais toujours senti invincible, invulnérable. Maintenant, je me dis: “Là, ça fait. Fais attention à toi, le vieux.” (rires)»
Âgé de 65 ans, l’éternel adolescent spécialiste de jeux vidéos et de technologie, animateur de la populaire émission Radio Talbot sur le Web, a eu une prise de conscience importante. «Cela va avoir l’air très cliché, mais je profite de tous les moments en famille. Si les autres veulent aller manger à tel endroit, même si je n’aime pas ça, j’y vais quand même. (rires) Si mon fils veut jouer au billard, même si je suis fatigué, je le fais. Tu ne sais jamais quand ça va arrêter», confie Denis en riant avec des larmes dans les yeux, ajoutant que sa blessure est presque complètement guérie.
Il faut dire qu’il est choyé par la vie. Heureux en amour depuis un quart de siècle, lui et Isabelle voient leur fils unique, Samuel, qu’ils ont adopté en 2008 au Kazakhstan et qui est maintenant âgé de 16 ans, devenir un athlète de haut niveau en plongeon, récoltant médailles et bonnes notes à l’école. «Cet été, il a gagné la médaille d’or au tremplin de 10 m, à Gatineau. Je n’ai malheureusement pas pu y aller à cause de ma jambe. Le mois prochain, il participera aux mondiaux juniors aquatiques, qui auront lieu à Rio de Janeiro, au Brésil, et sa mère l’accompagnera. Je nous vois déjà, Isabelle et moi, l’applaudir dans les gradins aux Olympiques à Los Angeles, en 2028», dit-il avec un large sourire.

Denis est suivi chaque semaine par des dizaines de milliers d’internautes sur radiotalbot.tv. Le 31 octobre, il publiera Les aventures de M. Net et du Grand Talbot, un récit de sa vie et de sa carrière, dont la préface est signée par nulle autre que Geneviève Borne, son ex-collègue de MusiquePlus.